Ces travaux entendent soumettre à l’épreuve des textes fin-de-siècle d’Arthur Machen (1863-1947) deux hypothèses : celle d’une appartenance au décadentisme et au symbolisme, d’une part, et celle d’un principe de consistance régulant les tensions qui sous-tendent son œuvre mineure, d’autre part, celle-ci mêlant les pratiques issues des corpus sapientiaux de la Bible et des récits intertestamentaires aux rites thérianthropiques du totémisme primitif. Le syncrétisme entre christianisme et paganisme ainsi que l’oscillation entre ascétisme apollonien et esthétisme dionysiaque reflètent aussi bien la résilience que les pathologies de l’artiste, qui façonne à la manière d’un homo faber des Künstlerromane et des autoportraits révélant sa nature protéenne. Inspirés des multiples courants artistiques jalonnant l’époque victorienne, les textes de Machen composés au tournant du siècle font de lui un auteur difficile à classer et trop souvent étiqueté parmi les écrivains gothiques et fantastiques – indétermination générique notamment due à l’anthologisation de son œuvre et nécessitant un travail de fouille dans des domaines variés tels que l’archéologie, l’anthropologie et l’ethnologie. La nouvelle, le roman par épisodes, le conte et le poème en prose en particulier deviennent des formes expérimentales où les diaristes établissent les prémices de l’écriture automatique des surréalistes. Perçu tantôt comme l’emblème de la contagion héréditaire, tantôt comme le héraut d’une civilisation décadente, l’artiste porte plusieurs masques que parasitent les fausses pistes laissées par l’auteur. Ayant exploré l’hypothèse d’un Machen poète, théologien, puis essayiste et théoricien du Beau, il sera possible, dès lors, de comprendre le décalage qui oppose la fiction et la vie de ce fervent anglican de la Haute Église, de cet époux fidèle qui cultive néanmoins, dans ses textes, des fantasmes paraphiliques, des rêves de l’Orient et de la Grèce ou, au contraire, des itinéraires pénitentiels douloureux régis par une tradition galloise médiévale supposant autoflagellation et jeûnes anorexiques. Loin de représenter un « calice vide », la liturgie devient chez Machen un pouvoir sacré, comme l’atteste la corrélation entre l’humiliation du corps et l’élévation de l’esprit dans The Hill of Dreams. En revendiquant également la richesse d’une culture galloise minoritaire, Machen participe au « Celtic Revival » et compose des chroniques du Gallois déraciné, exilé à Londres, tentant de survivre à un environnement urbain hostile en le reterritorialisant, spatialement et temporellement. / The present study sustains an analogy between the fin-de-siècle texts of Arthur Machen and the aesthetics of Decadence and Symbolism, first, and a principle of consistency regulating the tensions that underlie his minor works – id est, the customs originating from the sapiential corpus of the Bible and the intertestamental narratives being blended with the therianthropic rites of primitive totemism. The syncretism between Christian and Pagan rites and the oscillation between Apollonian ascesis and Dionysiac aestheticism mirror the resilience as well as the pathologies of the artist in his Protean Künstlerromane and self-portraits. Inspired by the numerous artistic currents of the Victorian age, Machen’s turn-of-the-century texts are quite complex to classify and account for the too frequent association made between his style and that of Gothic or Fantastic authors. This generic indetermination, notably triggered by the anthologization of Machen’s texts, requires a work of investigation in diverse domains such as archaeology, anthropology and ethnology. Episodic novels, short stories, tales, and prose poems, in particular, become experimental diaries foreshadowing the Surrealists’ automatic writing. Deemed to be either the emblem of hereditary contagion or the herald of a decadent civilization, the artist wears several masks which are further distorted by the author’s misleading autobiographical hints. After showing that Machen is not only a poet but also a theologian and an essayist and a theorician on aesthetics, it will be possible to understand the discrepancy between the fiction and the life of a fervent High-Branch Anglican, a faithful husband who nevertheless cultivated, in his texts, paraphilic fantasies, dreams of a new Orient and an Ancient Greece, or quite the contrary, extreme penitential itineraries grounded in a Medieval Welsh tradition requiring self-flagellation and anorexic fasting. Far from representing a “chalice empty of wine”, liturgy becomes a sacred power as the correlation between physical losses and spiritual gains in The Hill of Dreams shows. By championing the beauty of a minor Welsh culture, Machen partook in the “Celtic Revival” and wrote the chronicles of uprooted Welsh subjects exiled in the hostile environment of fin-de-siècle London and striving to reterritorialize its spatial and temporal constitution.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2016PA040148 |
Date | 25 November 2016 |
Creators | Sitayeb, Stéphane |
Contributors | Paris 4, Aquien, Pascal |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text, Image |
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