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Épistémè du partage

Les positions de recherche exposées sous le titre Épistémè du partage sont une réponse à un doute épistémologique et à un embarras méthodologique. Le doute épistémologique est né du flou conceptuel qui entoure le terme « anthropologie » ; l'embarras méthodologique a été provoqué par le caractère faiblement opératoire - dans mes travaux sur la mémoire - de certains concepts hérités de la discipline, en particulier ceux qui relèvent du tropisme molaire des sciences humaines et sociales.<br /> L'argumentation est développée en trois parties. La première est consacrée, pour l'essentiel, à la présentation de ma posture épistémique. Revendiquer une telle posture suppose, au minimum, une théorie de la discipline. Après un inventaire critique des théories concurrentes, je développe la mienne, en défendant l'idée que l'anthropologie générale a un objet qui lui est propre : le partage. Du même coup, je dissipe mon doute épistémologique.<br />Après cette prise de position théorique, c'est à l'ontologie et à l'épistémologie de l'objet de l'anthropologie générale, à ce qu'il est et à ce qu'on peut en connaître, que sont consacrées les deux autres parties du mémoire. Dans la deuxième partie, intitulée Fictions du partage ?, je lève (partiellement) mon embarras méthodologique. En effet, en quatre chapitres, j'y précise la manière dont nous, anthropologues, travaillons sur notre objet (le partage). J'y décris à la fois la « fabrication » des concepts qui sont supposés en rendre compte (e.g., la « mémoire collective », l' « identité culturelle », la « communauté », etc.) et leur utilisation dans le cadre d'une rhétorique du partage. De ces deux points de vue (fabrication, utilisation), la pertinence de ces concepts est loin d'être évidente, ce qui justifie le titre interrogatif donné à cette deuxième partie. J'aborde en fait la thèse suivante, qui sera explorée plus systématiquement dans la troisième partie, mais dans une autre perspective qui est celle du discours de sens commun : si la rhétorique propre aux discours à prétention scientifique entretient les fictions du partage, il arrive parfois qu'elle autorise et ontologise le partage des fictions, bien que cette tendance soit actuellement contrariée par le vaste mouvement de réhabilitation du singulier qui touche nos disciplines.<br />Dans la troisième et dernière partie, intitulée Partage des fictions, j'essaie de repérer quelques unes des conditions objectives et subjectives du partage, en m'appuyant principalement sur les hypothèses relatives au degré de pertinence des rhétoriques holistes. Quelques unes seulement, car j'ai délibérément exclu de mon propos des phénomènes aussi importants que la possession d'une langue ou d'une histoire commune par les membres d'un groupe. A ces chemins bien balisés et largement parcourus, j'ai préféré un itinéraire plus hasardeux, celui qui consiste à explorer les modalités de la cognition partagée sous l'effet des variables suivantes : la taille des groupes, le rôle des dispositions protomémorielles, la densité des représentations publiques, l'intensité des interactions et la perméabilité au doute. Ma thèse principale est que les représentations du partage sont toujours plus généreuses que le partage réel. Toutefois, dans un groupe nominal, cette croyance dans le partage peut devenir un indice objectif du partage, précisément lorsqu'elle est une croyance partagée.<br />Cette croyance suppose l'utilisation d'un critère de ressemblance, ressource cognitive essentielle lors de toute perception du partage et du non-partage, que celui-ci soit réel ou purement idéel. Pour cette raison, il importe d'imaginer des programmes de recherche qui permettront de mieux comprendre la nature de cette ressource. Ce type d'exercice pose nombre de problèmes, dont la plupart restent irrésolus. Ils ouvrent néanmoins de nombreuses perspectives de recherche en anthropologie cognitive que je me contente d'évoquer à la fin de cette troisième partie.

Identiferoai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-00130544
Date24 September 1999
CreatorsCandau, Joël
PublisherUniversité de Nice Sophia-Antipolis
Source SetsCCSD theses-EN-ligne, France
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
Typehabilitation ࠤiriger des recherches

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