Avec la population en constante croissance, les besoins alimentaires sont de plus en plus importants. Afin de répondre à la demande des populations, ainsi que pour s’assurer d’un bon rendement agricole, les agriculteurs suivant un mode d’agriculture qualifié de conventionnel doivent palier aux limitations naturelles des cultures. C’est par exemple en utilisant des pesticides ou herbicides pour la gestion des espèces nuisibles. Ce peut être aussi en utilisant des matières résiduelles fertilisantes pour apporter dans les sols les éléments essentiels à la bonne croissance des végétaux. Ces matières peuvent être des boues récupérées en sortie de station d’épuration, ou des fumiers. Les traitements mis en œuvre pour traiter ces matières étant insuffisants, divers contaminants sont introduits en même temps que les nutriments essentiels lors de leurs épandages. Pour les boues, ce sont les produits issus des activités humaines quotidiennes (produits pharmaceutiques et de soin corporel). Il est donc possible de retrouver dans les sols de cultures conventionnelles, un mélange de pesticides, herbicides, produits pharmaceutiques et de soin corporel et autres contaminants organiques. Ces substances, présentes dans les sols sous leurs formes initiales (ingrédient actif) ou dégradées (produits de dégradation), peuvent potentiellement interagir avec les organismes biologiques des sols et causer d’éventuels effets toxiques.
Les vers de terre représentent une grande partie de la biomasse animale des sols et contribuent à la régulation des processus majeurs des sols. Vivant dans les sols et s’en nourrissant, ils sont par conséquent directement exposés à tous les contaminants qui s’y trouvent. Il apparaît dans ces conditions importantes de déterminer les potentiels effets toxiques des mélanges de contaminants organiques (pesticides et produits pharmaceutiques) sur les vers de terre.
Les concentrations en contaminants organiques dans les sols sont faibles, de l’ordre du ng.g-1 (poids sec), et des effets létaux sur des organismes robustes comme les vers de terre sont peu probables. D’autres effets peuvent cependant apparaître, en altérant par exemple le comportement reproducteur des vers, leur croissance, ou encore en causant des dommages à leur ADN. Ces molécules organiques peuvent aussi s’accumuler dans les tissus des vers de terre, ce qui présente des risques supplémentaires pour les maillons supérieurs du réseau trophique. Des méthodes standardisées pour évaluer ces risques existent. Cela dit, elles ont été mises en place pour estimer les limites en termes de concentrations dans les sols auxquelles les effets toxiques vont apparaître. Les molécules sont par conséquent étudiées seules et à de hautes concentrations.
L’objectif principal de ces présents travaux est de mettre en place un protocole nous permettant de détecter un ensemble d’effets sublétaux des contaminants organiques sur les vers de terre de l’espèce Eisenia andrei en exposant les vers à des mélanges de pesticides et de produits pharmaceutiques à faibles concentrations (environnementales), ou bien à des produits marqueurs d’une contamination spécifique.
Le protocole expérimental retenu est basé sur un test de reproduction, auquel des analyses chimiques des tissus des vers de terre et des échantillons de sol pour évaluer la bioaccumulation des contaminants sont ajoutés. Dans ce cas d’étude, la bioaccumulation fait référence à l’accumulation des contaminants organiques provenant de toutes les sources d’exposition (alimentation, contact) dans les tissus des vers de terre. L’essai comètes appliqué aux vers de terre adultes pour déterminer l’endommagement de l’ADN vient compléter les données. Ce protocole a été appliqué à plusieurs reprises, en exposant les vers de terre à des mélanges divers de contaminants organiques (pesticides et produits pharmaceutiques) ajoutés directement au sol artificiel, en concentrations environnementales (< 100 ng.g-1 , masse sèche). L’effet le plus marquant est la bioaccumulation sélective des insecticides de la famille des néonicotinoides dans les tissus des vers de terre, quelle que soit la composition de mélange de contaminants organiques ajoutés au sol. Lorsqu’exposés au triclosan à 50 ng.g-1 (dw), les vers de terre modifient leur comportement de reproduction, et accumule cette molécule. Lorsque le triclosan est ajouté par l’intermédiaire d’une boue contaminée dans ces mêmes sol artificiel et à une concentration finale équivalente, la bioaccumulation est du même ordre de grandeur que précédemment. C’est la forme dérivée du triclosan, le méthyl-triclosan, qui apparaît progressivement dans les sols et est accumulé plus fortement que le triclosan lui-même. Ce phénomène n’était pas observé lors de l’ajout du triclosan dissous dans un solvant.
Bien que réalisés dans un système artificiel, les travaux présentés dans ce mémoire montrent l’importance de rechercher les effets écotoxicologiques des contaminants en conditions les plus réalistes possibles (mélanges, concentrations faibles). Le suivi de la composition chimique des sols d’exposition au cours des expériences permet de mieux comprendre l’origine des effets observés, particulièrement lorsque les produits de transformation peuvent également être analysés. Pour aller plus loin dans les études des effets sublétaux de contaminants organiques sur les vers de terre, des expériences incluant un suivi de plusieurs générations successives apporteraient de nombreuses informations sur la sensibilisation des jeunes vers et le risque pour les populations à long terme.
Identifer | oai:union.ndltd.org:usherbrooke.ca/oai:savoirs.usherbrooke.ca:11143/10613 |
Date | January 2017 |
Creators | Fanny Chevillot |
Contributors | Bellenger, Jean-Philippe, Cabana, Hubert |
Publisher | Université de Sherbrooke |
Source Sets | Université de Sherbrooke |
Language | French, English |
Detected Language | French |
Type | Mémoire |
Rights | © Fanny Chevillot |
Page generated in 0.0027 seconds