Pour un chercheur en apprentissage symbolique automatique amateur de musique, formaliser certains aspects de la représentation, de la pratique et de la pédagogie musicale est un thème séduisant. Mieux, ce thème peut prendre place au sein des préoccupations et des ambitions de l'intelligence artificielle. En effet, s'il est important que l'intelligence artificielle se renforce dans ses domaines de prédilection, il lui reste des références à élargir et des champs à gagner, comme ceux que lui soumet la problématique musicale.<br />C'est ainsi que ce thème devient un objectif d'études et de recherches : mais dans cette optique, il est nécessaire de prendre en compte l'état de l'art en informatique musicale, et d'écouter les besoins manifestés par les musiciens, afin de prendre pied sur une réelle communauté d'intérêts entre les deux disciplines.<br />En toute hypothèse, la musique est un objet abstrait dont il existe plusieurs représentations, aucune n'étant complète ni générale, et chacune possédant des propriétés spécifiques. Qui plus est, ces représentations ont tendance à évoluer, naître et mourir au gré des besoins des musiciens, même si la représentation sonore reste essentielle et par définition indissociable de l'objet abstrait : mais il faut bien admettre que le son musical n'est pas seul à évoquer la musique, et que si l'homme éprouve le besoin d'inventer des représentations pour mieux s'approprier le phénomène musical, il peut être enrichissant d'examiner la transposition de ce comportement aux machines.<br />On peut certes isoler une de ces représentations, la traduire informatiquement et lui dédier des outils : c'est ainsi que de nombreux systèmes informatiques abordent la musique. Mais il existe une approche plus typique de l'intelligence artificielle, qui consiste à chercher à atteindre l'objet abstrait à travers l'ensemble de ses représentations et de leurs relations : pour un système informatique, faire preuve d'intelligence dans ce contexte, c'est utiliser cette diversité et cette multiplicité de représentation; c'est savoir s'appuyer sur une réalité mouvante et se déplacer dans un univers d'abstractions.<br />Mais les représentations ne prennent leur sens qu'avec ceux qui communiquent à travers elles, qu'avec les activités qu'elles engendrent. On peut alors imaginer un système qui constituerait un véritable lieu de rencontre, de réflexion, de création, en un mot de communication : car la musique est avant tout un médium de communication. Mais quelle est la nature de ce qu'on pourra communiquer à travers un tel système ? Par exemple, on pourra s'exercer aux pratiques musicales, expérimenter de nouveaux rapports entre les représentations, en un mot s'approprier le médium musical lui-même.<br />Mais alors, on a besoin d'un système qui sache témoigner de ces rencontres, plus précisément qui apprenne à en témoigner; c'est là notre définition de l'apprentissage dans le contexte : on dira qu'un système apprend s'il témoigne, et éventuellement s'adapte à un univers de communication musicale. Sans cette exigence, la valeur de la communication est perdue : en effet les parties prenantes quittent le système avec leur nouvelle richesse, quelle que soit la réussite de la médiation. Aussi, l'enjeu pour un système apprenti consiste à retourner un témoignage aux musiciens, aux pédagogues et aux informaticiens, afin qu'ils puissent en tirer profit : bien entendu, on exigera de ce témoignage qu'il produise de la connaissance utile, sans se contenter de cumuls d'événements ou de faits ordonnés historiquement.<br />Ainsi, à travers un enseignement ouvert, il s'agira pour des élèves d'appréhender et d'expérimenter le médium musical, d'enrichir leurs connaissances et d'obtenir des explications. Pour des enseignants, il s'agira de créer et d'organiser cette médiation, et de rendre des oracles pédagogiques au système. Mais l'intelligence artificielle et l'apprentissage symbolique automatique sont les sciences de l'explication : il faut mettre en jeu la dimension cognitive qui permettra d'expertiser l'adéquation du lieu de rencontre; il faut se placer au cœur des besoins et des préoccupations des enseignants et des élèves, en tentant de formaliser les théories cognitives de la musique. On pourra même inventer des représentations à vocations cognitive et explicative : à terme, un système construit sur un tel modèle pourrait bien être capable de faire lui-même des découvertes dans ce domaine.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-00417579 |
Date | 08 February 1990 |
Creators | Rousseaux, Francis |
Publisher | Université Pierre et Marie Curie - Paris VI |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | PhD thesis |
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