La critique n'est que l'art de jouir des livres.
J. LEMAITRE
Nous sommes des Aquiniens.
Ce que cela veut dire d'abord et avant tout, c'est que nous formons un maillon fort
de la litterature quebecoise. Et si l'une d'entre nous, il y a une quinzaine d'annees, s'est
mise a jouer un tantinet de l'uterus en annoncant la <canadianisation de la litterature
quebecoise>, par le biais de la reception d'Aquin, c'est qu'apres la mort de l'ecrivain
maudit, il reste encore le texte (et les fantomes qui s'y degagent), que nous, aquiniens,
concretisons d'apres nos lectures.
Sur le lecteur et l'acte de lecture, Aquin en avait long a dire. En 1973, lors du
colloque «Litterature quebecoise. Ecriture-lecture» tenu a l'Universite du Quebec a
Montreal, Hubert Aquin prononce une conference ou l'ecriture et la lecture ne sont pas
vues comme dissociees et comparees, mais plutot comme des actions successives et
essentiellement interdependantes compte tenu de la fonction communicative de l'ecriture.
Ainsi, depuis «Litterature et alienation», ou il reconnaissait «la liberie d'ecrire pour
ecrire» (150), jusqu'a «La disparition elocutoire du poete», la conception de la
litterature d'Aquin suivra le ton de l'epoque qui annoncait <la naissance du lecteur>:
Quand l'ecriture a rempli son role elle s'est transmuee en lecture. La
litterature jaillit, pour ainsi dire, de cette union entre un ecrivain et un
lecteur. Au mieux, cette rencontre ressemble au coup de foudre, a un
accouplement fulgurant qui dure le temps de la lecture. Cette conjunction
revet un caractere sacre. C'est l'evenement originaire de la litterature, le
choc instaurateur de joie, d'exaltation, de pensee. (315)
En 1981, dans son etude L 'Imaginaire captif. Hubert Aquin, Rene Lapierre ecrit a
propos de l'oeuvre d'Aquin:
Elle exerce indiscutablement sur ses lecteurs - la fascination dont
temoignent la plupart des etudes qui lui ont ete consacrees a ce jour
l'atteste - un tres fort pouvoir de seduction; il existe de toute evidence un
<mythe> d'Aquin dont la portee reelle semble echapper au simple merite
d'avoir ecrit de bons livres pour toucher plutot, en chacun, quelque chose
de plus vulnerable et de plus secret. (11)
Ce <quelque chose> de plus <vulnerable> et de plus <secret>, qui faconne la
critique aquinienne depuis plus de trente ans, rend un vibrant hommage a l'oeuvre de
l'auteur quebecois en revetant le meme pouvoir de seduction et en creant peut-etre ainsi
une veritable critique <mythique>. En effet, l'ecrivain le plus institutionnalise au
Quebec et l'un des auteurs quebecois les plus recus au Canada continue a susciter un
interet soutenu qui pousse la critique vers un desir constant de depassement comme en
temoignent le projet de l'edition critique de l'oeuvre d'Aquin et quelques articles
metacritiques.
Malgre l'encre qu'il a fait couler, Hubert Aquin demeure encore un des auteurs les
moins democratises, un secret bien garde. Meme si un des mandats de l'edition critique
d'Aquin visait a initier un nouveau public (plus large?) a son oeuvre, dans 1'ensemble,
l'oeuvre de l'auteur publiee chez BQ ne ressemble guere aux petites editions scolaires.
Aquin est-il toujours promis a un lecteur elu? Auteur charismatique, critique elue... / Arts, Faculty of / French, Hispanic, and Italian Studies, Department of / Graduate
Identifer | oai:union.ndltd.org:UBC/oai:circle.library.ubc.ca:2429/10345 |
Date | 05 1900 |
Creators | Stevens, Marie Nancy |
Source Sets | University of British Columbia |
Language | English |
Detected Language | French |
Type | Text, Thesis/Dissertation |
Format | 4335328 bytes, application/pdf |
Rights | For non-commercial purposes only, such as research, private study and education. Additional conditions apply, see Terms of Use https://open.library.ubc.ca/terms_of_use. |
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