Dans L'écriture et l'expérience des limites, Philippe Sollers affirme que Dante représente à la fois le symbole de la reprise de l'antiquité et celui de l'annonce des temps modernes. Outre Sollers, d'autres interprétations historiques comme celle de Jacqueline Risset dans Dante écrivain ont montré que La divine comédie présentait de nombreux avatars quant à ses sources antiques, sa position dans le temps et son influence sur la littérature qui lui succède. Ce mémoire a pour but d'approfondir cette hypothèse en étudiant la nature, le sens et les enjeux de la relation problématique entre Dante et le temps, car elle anticipe selon moi la conception baudelairienne de la modernité, où il s'agit de « tirer l'éternel du transitoire ». Avec La divine comédie, Dante aurait, cinq siècles avant son invention, compris le sens baudelairien du terme « modernité » en exprimant, à la manière de l'auteur des Fleurs du Mal, la beauté qui émane de l'horreur, le sublime camouflé dans « la flore délaissée du Mal et de la Mort » (Claude Roy). Évidemment, il ne s'agit pas de faire le procès de Dante en prouvant qu'il a plagié le « kiosque bizarre » de Baudelaire, mais plutôt, de se soustraire aux obstacles factuels de la linéarité temporelle, le temps d'étudier la Comédie à partir d'une perspective plus moderne. Dans ce mémoire, il s'agit conséquemment de repenser l'œuvre poétique de Dante et son rapport au temps à partir de l'idée de « plagiat par anticipation » élaborée par Pierre Bayard, avec laquelle il est possible d'envisager la littérature comme un réseau qui ne fonctionnerait pas à partir d'une logique causale ou linéaire, mais qui serait plutôt constitué d'un enchevêtrement omnidirectionnel de liens. Du coup, il est possible de penser que Dante a plagié Baudelaire. Et la clé de ce délit se trouve dans le désir qu'a Baudelaire de faire renaître « l'âge d'or » de la poésie dans ses Fleurs du Mal, car pour y arriver, il effectue un saut dans le passé afin de pouvoir s'inspirer des grands poètes de l'antiquité. Mais en agissant de la sorte, Baudelaire s'expose au plagiat par anticipation. Pour écrire la Comédie, Dante retourne vers ce même passé idéalisé et à partir de cette « rencontre » entre les deux poètes, Dante est en mesure d'anticiper les motifs constitutifs de la modernité baudelairienne. Bref, si le plagiat de Dante sur Baudelaire est possible, c'est parce que les deux poètes ont visité les mêmes sources pour créer leurs œuvres respectives. Et si un tel voyage dans le temps est concevable, c'est parce que la Comédie et Les Fleurs du Mal présentent une conception du temps circulaire plutôt que linéaire.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Dante, Baudelaire, modernité poétique, plagiat, temps.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QMUQ.4329 |
Date | 08 1900 |
Creators | Belleau, Olivier |
Source Sets | Library and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada |
Detected Language | French |
Type | Mémoire accepté, NonPeerReviewed |
Format | application/pdf |
Relation | http://www.archipel.uqam.ca/4329/ |
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