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Identification des sources printanières de méthylmercure dans le manteau neigeux arctique

Depuis plusieurs décennies, l'environnement arctique est en proie à de nombreux changements notamment dus à l'activité humaine. L'Arctique est en effet très sensible aux espèces polluantes issues de l'industrie de masse ainsi qu'au réchauffement global accéléré par les émissions anthropogéniques. Leurs impacts sur les écosystèmes boréaux, visibles dès les années 1970, (Schindler et Smol, 2006) ont motivé de nombreuses études. Ainsi a été démontrée l'importance des sources ponctuelles et du transport atmosphérique longue distance sur la pollution des zones arctiques. Un des composants clés de l'écosystème arctique est le manteau neigeux saisonnier, car en directe interaction avec l'atmosphère, le sol et les systèmes aquatiques. La neige contient de nombreuses espèces chimiques, microorganismes, particules et impuretés qui en font un milieu chimiquement et biologiquement dynamique, siège de réactions et d'interactions diverses. L'important interface atmosphère - neige (milieu poreux) donne notamment lieu à de nombreuses réactions d'oxydoréduction photo-induites impliquées dans des cycles chimiques complexes. Néanmoins, peu de choses sont connues sur l'interaction entre les différentes espèces contenues dans le manteau neigeux, et si on sait désormais que les microorganismes y ont une activité significative, on ignore tout ou presque des interactions chimiques éventuelles. Lors de la fonte du manteau neigeux, ce sont toutes les espèces qui y ont été stockées et formées in situ qui seront libérées dans l'écosystème aquatique. Ainsi le manteau neigeux saisonnier constitue un réservoir et réacteur crucial d'espèces chimiques, biologiques et contaminantes pour l'environnement arctique. Le cycle du mercure est dominé par deux systèmes de réactions majeurs : 1) l'oxydo-réduction (Hg0 Hg2+) ; et 2) la méthylation-déméthylation (Hg2+ CH3Hg+ CH3HgCH3). Les espèces formées par méthylation sont le monométhylmercure CH3Hg+ (aussi appelé méthylmercure, noté MMHg) et le diméthylmercure CH3HgCH3 (noté DMHg). Dans les régions polaires, le mercure élémentaire gazeux atmosphérique est rapidement oxydé et déposé en très grande quantité lors d'épisodes appelés AMDEs (Atmospheric Mercury Depletion Events) survenant au printemps polaire (Schroeder et al., 1998; Steffen et al., 2008). Durant ces épisodes, la neige se comporte comme une " éponge " à mercure et retient des concentrations en mercure très élevées (de l'ordre de la centaine de ng/L). Plusieurs campagnes de terrain ont montré que le mercure pouvait être soit oxydé soit réduit dans le manteau neigeux (Lalonde et al., 2002; Dommergue et al., 2003; Poulain et al., 2004) bien qu'il soit admis que la plus grande partie du mercure divalent déposé dans le manteau neigeux est réduit puis réémis dans l'atmosphère (Poulain et al., 2004; Kirk et al., 2006). Le mercure stocké par le manteau neigeux est libéré dans les eaux de fontes en période de réchauffement, en partie sous forme monométhylée (MMHg) (Loseto et al., 2004; St. Louis et al., 2005). Un récapitulatif de la chimie du mercure ainsi que de sa réactivité en arctique et dans le manteau neigeux est présenté en chapitre introductif de cette thèse. L'objectif des travaux présentés dans ce manuscrit est de clarifier l'influence de la chimie du manteau neigeux saisonnier arctique sur la réactivité du mercure qu'il contient, en particulier celle de sa forme méthylmercure. Comment s'y retrouve-t-il ? Est-il transporté dans la neige ou s'y forme-t-il à partir d'autres espèces mercurielles ? Quel rôle joue le manteau neigeux sur la boucle méthylée du cycle du mercure ? Les résultats présentés ci-après exploitent les données d'échantillons de neige saisonnière, collectés entre avril et juin 2011 autour du site côtier de Ny-Ålesund, dans la région du Kongsfjorden (Svalbard). La thèse est divisée en six parties, subdivisées en chapitres. La première partie présente les connaissances de la biogéochimie du mercure ainsi que de la physico-chimie du manteau neigeux nécessaires à la compréhension des parties de développement qui suivent. La deuxième partie présente les différentes méthodes analytiques utilisées pour obtenir notre jeu de données à partir des échantillons de terrain. Il comprend aussi la description d'un dispositif de dosage d'ultra-traces de MMHg que nous avons développé au laboratoire, bien qu'il n'ait pas eu l'aboutissement nécessaire pour analyser nos échantillons. Ce travail de développement analytique fait partie intégrante du travail de thèse et a mobilisé beaucoup de temps et de moyens ; il permet aujourd'hui un dispositif fonctionnel dont les performances doivent encore être précisées. La mise en place de ce dispositif est décrite de manière très complète en abordant un point de vue très pratique sur problèmes rencontrés et leurs solutions. Suit un court mais indispensable chapitre de description du site d'étude, de la méthodologie de terrain et des conditions géochimiques et météorologiques du milieu étudié. Dans la troisième partie, dédiée à l'étude de la chimie de la neige, nous commencerons par quelques observations sur la dynamique du mercure dans le manteau neigeux avant d'aborder dans un deuxième chapitre la chimie du manteau neigeux saisonnier avec une méthodologie nouvelle dans ce domaine, impliquant des rapports de concentrations d'espèces chimiques (Robinson et al., 2006). Cette approche a permis d'identifier les principales sources d'espèces chimiques dans le manteau neigeux côtier, et notamment d'y identifier les principales sources de MMHg. Le troisième chapitre de cette partie s'appuie sur les résultats sur la chimie de la neige pour discuter de la nature de la source principale de MMHg, en raisonnant sur la chimie globale de la neige et des traceurs de source. Nous y développons une nouvelle explication de l'apport de MMHg dans la neige étudiée - basée sur nos résultats et étayée par une littérature fournie - clarifiant ainsi le faisceau d'hypothèses habituellement évoqué pour expliquer la présence de MMHg dans le manteau neigeux. Nous n'identifions pas de formation de MMHg in situ dans le manteau neigeux côtier étudié. En réponse et en complément à la partie précédente, la quatrième partie traite de la dynamique du MMHg dans la neige et l'eau de fonte. Dans un premier chapitre sont présentés les résultats d'une étude d'un puits de neige sur le glacier Kongsvegen (une année d'accumulation), un site éloigné de la côte du Kongsfjorden. En utilisant la même méthodologie que précédemment, nous observons un processus chimique reliant le MMHg à d'autres espèces chimiques, qui est certainement identifiable uniquement en raison des faibles concentrations et de la stabilité de ce manteau neigeux dans le temps. En se basant sur les résultats d'une étude de laboratoire sur la formation de MMHg (Gåardfeldt et al., 2003), nous attribuons les relations entre ces espèces chimiques à une réaction de méthylation du mercure in situ. L'importance de cette réaction dans le budget de MMHg du manteau neigeux ainsi que les implications potentielles de cette observation préliminaire y sont évaluées et discutées. Un dernier chapitre présentera les observations concernant le méthylmercure dans l'eau de fonte, en complément des résultats présentés plus tôt. Les cinquième et sixième parties sont constituées respectivement d'une discussion conclusive et des annexes.

Identiferoai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-01065074
Date04 November 2013
CreatorsRenard, Alexandre
PublisherUniversité de Grenoble
Source SetsCCSD theses-EN-ligne, France
Languagefra
Detected LanguageFrench
TypePhD thesis

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