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Les paradoxes de la professionnalisation de la gouvernance des entreprises d'économie sociale

Le tournant du XXIe siècle a été le théâtre de scandales financiers qui ont poussé tant la société civile que le milieu universitaire à amorcer une réflexion renouvelée et approfondie sur la qualité de la gouvernance des organisations. La crise financière de 2008 et la crise de confiance qui en a découlé ont poussé les organisations ainsi que les écoles de gestion à un sérieux examen de conscience. Si les préoccupations éthiques ont dominé la scène à plusieurs égards, les questionnements concernant l'efficacité des conseils d'administration, leur capacité à prendre les meilleures décisions dans l'intérêt supérieur de l'organisation, de ses propriétaires et autres parties prenantes, se sont également multipliés. À cet égard, les entreprises d'économie sociale -- qui visent la réalisation d'une mission sociale tout en maintenant leur autonomie financière -- ne font pas exception. Depuis plusieurs années, elles sont poussées par différentes pressions systémiques à se « professionnaliser », ce qui a des répercussions sur toute leur structure organisationnelle, notamment sur leur gouvernance. Or, peu d'études se consacrent à comprendre, analyser et expliquer les processus à l'œuvre ainsi que les conséquences de la professionnalisation de la gouvernance des entreprises d'économie sociale. Dans cette optique, cette thèse a pour objectif d'analyser le phénomène de professionnalisation de la gouvernance des entreprises d'économie sociale, de décrire les tensions qui en découlent, et d'explorer les stratégies de réponses adoptées par les organisations pour répondre à ces tensions. À cette fin, le premier article de cette thèse a pour objectif de mettre au jour les tensions créées par l'application de théories et pratiques de gouvernance, conçues pour les sociétés à capital-actions, aux entreprises collectives à vocation sociale comme les coopératives. À partir d'une exploration de la littérature, il met au jour sept paradoxes de gouvernance, qui sont autant d'enjeux spécifiques auxquels les coopératives font face, et pour lesquels les théories issues de l'économie néo-classique n'apportent pas de réponse satisfaisante. Le deuxième article de cette thèse explore une tension propre aux entreprises qui s'appuient sur une gouvernance démocratique et inclusive, c'est-à-dire, la tension entre les pôles opposés d'expertise et de représentation. S'appuyant sur une étude de cas multiple, il explore les différentes dimensions de cette tension en proposant une analyse multiniveau. L'attention portée aux stratégies de réponse à ces tensions permet de mettre en évidence la dynamique complexe des paradoxes, en montrant que les stratégies de réponses utilisées pour gérer une tension à un niveau créent de nouvelles tensions à un autre niveau. Enfin, le troisième article de cette thèse permet d'explorer les tensions découlant du caractère bénévole des tâches liées à gouvernance des entreprises d'économie sociale, dont la participation au conseil d'administration est la plus exigeante. Cet article met au jour une tension entre professionnalisme et bénévolat, deux pôles fonctionnant sur des logiques contradictoires, mais qui doivent être réconciliées par les entreprises d'économie sociale. En fin de compte, cette thèse montre que la gouvernance des entreprises d'économie sociale peut se professionnaliser, mais que ce processus doit être effectué avec prudence et dans le respect des particularités qui font la force de ces organisations. / The turn of the 21st century has been the scene of financial scandals that have prompted both civil society and academia to renew and deepen their reflection on the quality of governance in organizations. The financial crisis of 2008 and the ensuing crisis of trust have urged organizations and business schools to a serious soul-searching. While ethical concerns have dominated the scene in many respects, criticism towards the effectiveness of boards of directors and their ability to make decisions in the organization's, its owner's and stakeholder's best interests, have also grown. In this respect, social economy enterprises - which aim to achieve a social mission while maintaining their financial autonomy - are no exception. For several years, various systemic pressures towards "professionalization" have engaged social economy enterprises to the point of impacting their entire organizational structure, including governance. However, few studies are devoted to understanding, analyzing, and explaining the processes at work and the consequences of the professionalization of the governance of social economy enterprises. With this in mind, the objective of this thesis is to analyze the phenomenon of professionalization of the governance of social economy enterprises, describe the tensions that arise from it, and explore the response strategies adopted by the organizations to address these tensions. To this end, this thesis's first article reveals the tensions created when applying governance theories and practices designed for investor-owned corporations to collective enterprises with a social vocation, such as co-operatives. Based on an exploration of the literature, we highlight seven governance paradoxes faced specifically by co-operatives. We show that the neoclassical paradigm does not provide satisfactory answers to theorize or cope with such paradoxes. The second article explores a tension between expertise and representation, which are inherent and opposing poles of the organizations relying on democratic and inclusive governance. Based on a multiple case study, we perform a multi-level analysis to explore the dimensions of this tension. The attention paid to the response strategies to these tensions allows highlighting the complex dynamics of paradoxes, showing that the strategies used to manage a tension at one level create new tensions at another level. Finally, the third article explores the tensions arising from the voluntary nature of the governance tasks in social economy enterprises, of which participation in the board of directors is the most demanding. This article uncovers a tension between professionalism and volunteerism, two poles operating on contradictory rationales, but which must be reconciled by social economy enterprises. Overall, this thesis shows that the governance of social economy enterprises can be professionalized, but that this process must be carried out with caution and with respect for the particularities that make these organizations strong.

Identiferoai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/73589
Date20 June 2022
CreatorsMichaud, Myriam
ContributorsAudebrand, Luc K.
Source SetsUniversité Laval
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
Typethèse de doctorat, COAR1_1::Texte::Thèse::Thèse de doctorat
Format1 ressource en ligne (xvii, 143 pages), application/pdf
Rightshttp://purl.org/coar/access_right/c_abf2

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