La Terre contient une quantité significative d’eau et son manteau est très oxydé par rapport aux conditions canoniques de la nébuleuse solaire, ce qui est contradictoire avec l’existence de son noyau métallique et sa position dans le Système solaire. Ceci implique que l’état rédox de la Terre ait augmenté au début de son histoire. Aujourd’hui, de nombreuses études suggèrent que cette évolution se soit faite à travers une accrétion hétérogène. Ainsi les premières briques élémentaires de notre planète seraient constituées de matériel très réduit et une grande partie de la différenciation précoce (extraction du noyau et différenciation silicatée) se seraient donc déroulées en conditions très réductrices (entre IW-5.5 et IW-2). L’objectif de cette thèse est de mesurer l’impact de ces conditions sur le comportement des terres rares (REE) et des éléments fortement chargés (HSFE), et de modéliser leur répartition dans les différents réservoirs lors de la différenciation précoce de la Terre. Nous réalisons une soixantaine d’expériences de fusion – cristallisation à l’équilibre de matériel chondritique à basse (5 GPa) et haute (26 GPa) pression, dans une gamme de conditions rédox allant de IW (tampon fer – wüstite) à IW-8. Afin de caractériser le paramètre fO 2 dans ces conditions extrêmes, nous développons un formalisme thermodynamique adapté, basé sur l’équilibre Si-SiO 2 . En analysant les différentes phases à l’équilibre dans les différents échantillons, nous calculons et établissons la première banque de données de partage cristal (enstatite, bridgmanite = pérovskite silicatée, majorite) – liquide silicaté, métal-silicate et sulfure-silicate pour les HFSE et les REE en conditions très réductrices. Grâce aux données enstatite – liquide nous développons un proxy de la fO 2 , basé sur le rapport D(Cr)/D(V) et grâce auquel nous mesurons la fO 2 de chondres de type I comme étant similaires aux conditions canoniques de la nébuleuse (IW-7). Nos données de partage métal – silicate prouvent que l’extraction du noyau terrestre n’est pas à l’origine d’un fractionnement des terres rares. Au contraire, en mesurant pour la première fois le spectre XANES du Nb 2+ et du Ta 3+ dans des verres silicatés à des teneurs de l’ordre du ppm, nous prouvons que le comportement de Nb et Ta est contrôlé par la fO 2 . En intégrant nos données de partage à un modèle d’accrétion hétérogène nous montrons que la signature sous-chondritique en Nb/Ta de la Terre silicatée peut être le résultat de l’accrétion d’un matériel chondritique évoluant avec le temps combinée à l’extraction du noyau en conditions réductrices, ce qui réfute l’hypothèse d’une Terre se formant à partir d’un matériel oxydé. Nos expériences de haute pression montrent que le partage des REE et des HFSE dans la majorite et la bridgmanite est très sensible à la fO 2. De plus, le processus de dismutation du fer, invoqué pour expliquer l’augmentation de la fO 2 du manteau lors de la cristallisation de l’océan magmatique, ne semble pas être un mécanisme efficace en-dessous de IW. Enfin, nos données montrent que Ti, V, Cr, Mn, Nb et Ta sont chalcophiles en conditions très réductrices. L’extraction précoce d’un liquide sulfuré dans ces conditions a donc pu modifier les rapports élémentaires supposés chondritiques dans la Terre silicatée. L’extraction d’une importante quantité de FeS pourrait aussi être à l’origine d’un découplage Zr/Hf. / The Earth contains significant amounts of water and its mantle is highly oxidized compared to the solar nebula canonical conditions, which is inconsistent with the existence of its metallic core and its location in the Solar System. This implies the redox state of the Earth has increased during its early history as suggested in heterogeneous accretion models. Thus, the first building blocks of our planet would have been made of highly reduced material, and the early Earth’s differentiation (core extraction and silicate differentiation) would have taken place under highly reducing conditions (between IW-5.5 and IW-2). The aim of this thesis is to measure the impact of these conditions on rare earth elements (REE) and high field strength elements (HFSE) behavior, and model their distribution into the main reservoirs formed early in Earth’s history. We run about sixteen melting – crystallization experiments, starting from chondritic material and equilibrating it at low (5 GPa) and high (26 GPa) pressure, spanning a redox range going from IW (iron – wüstite buffer) to IW-8. In order to characterize the fO 2 parameter in these extreme conditions, we develop an adapted thermodynamic formalism, based on Si-SiO 2 equilibrium. Analyzing the various equilibrated phases within our experimental samples, we calculate and propose the first crystal (enstatite, bridgmanite = Mg-perovskite, majorite) – silicate liquid, metal – silicate, sulfide – silicate partition coefficients database for HFSE and REE under highly reducing conditions. Using our enstatite-liquid data we develop a fO 2 proxy based on D(Cr)/D(V) ratio and we measure type I chondrule fO 2 as being similar to canonical nebular conditions (IW-7). Our metal-silicate partitioning data prove that Earth core extraction is not responsible for REE fractionation. On the contrary, recording for the first time Nb 2+ and Ta 3+ XANES spectra in silicate glasses and at ppm level concentrations, we prove that Nb and Ta behavior is mainly controlled by fO 2 . Using our partitioning data in a heterogeneous accretion model, we show that sub-chondritic Nb/Ta signature of the silicate Earth (14 ± 0.3) can be the result of the accretion of chondritic material changing with time, combined with the progressive extraction of the core in reducing conditions. This refutes the hypothesis of an oxidized material building the Earth. Our high-pressure experiments show that REE and HFSE partitioning in majorite and bridgmanite is very sensitive to fO 2 . Moreover, iron dismutation process, invoked to explain mantle fO 2 increase during magma ocean crystallization, does not seem to be an efficient mechanism below IW. Finally, our data show that Ti, V, Cr, Mn, Nb and Ta are chalcophiles under highly reducing conditions. Consequently, early extraction of a sulfide melt at an early and reduced stage could have modified chondritic elementary ratios in the silicate Earth. Extraction of a substantial amount of FeS may also cause a Zr/Hf decoupling.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2014CLF22525 |
Date | 11 December 2014 |
Creators | Cartier, Camille |
Contributors | Clermont-Ferrand 2, Hammouda, Tahar, Boyet, Maud |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French, English |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
Page generated in 0.0031 seconds