Return to search

La recherche de la justice dans le theatre de Paul Claudel

Ce n'est pas sans apprehension que l'exegete de notre temps aborde l'oeuvre monumentale qu'est le theatre de Paul Claudel, et cela pour bien des raisons. D'abord, Claudel passe, a juste titre, pour un auteur difficile. 11 peut para1tre souvent obscur, paradoxal, presentant a ses lecteurs des textes dans lesquels se chevauchent plusieurs niveaux de signification. Les nombreuses allusions qu'on y trouve sont non seulement erudites, mais peuvent se rapporter a des evenements contemporains n'eveillant plus d'echo en nous, OU encore a des legendes purement locales. La syntaxe etant souvent deliberement desarticulee, il est parfois hecessaire de demonter completement certaines tirades pour en percevoir le sens. Le vocabulaire lui-meme presente de nombreuses difficultes. Les noms propres de la plupart des personnages sont symboliques et pretent a des jeux de mots multiples ; certains d'entre eux ont ete forges par l'auteur a partir d'elements latins, gaulois OU encore espagnols. Le langage employe par certains personnages est emaille de mots dialectiques et, pour ne citer que cet exemple, comment deviner, si l'on ne conna1t pas le patois du Nord de la France, que les "cesses" dont on parle dans La Jeune Fille Violaine designent une certaine espece de cerises ? Ensuite, d'autres difficultes se posent. L'oeuvre de Claudel a deja ete traitee par des centaines de critiques et tant de galeries ont deja ete creusees.dans cette mine qu'on serait tente de s'ecrier comme la Bruyere : "Tout est ditl et l'on vient trop tard ( ••• ) le plus beau et le meilleur est enleve ; l'on ne fait que glaner apres les anciens 1 et les habiles d'entre les modernes" • Enfin, l'envergure meme de cette oeuvre a de quoi decourager le chercheur. Car comment oser aborder ce theatre sans consacrer tout le temps qu'il faut a chacune des grandes pieces, 'sans se livrer a la comparaison ligne a ligne qui s'impose entre les multiples versions de certains drames. Ceux qui se sont attaques a l'ensemble de ce theatre, tels Messieurs M. Lioure et A. Vachon, pour ne citer que ces excellents critiques, se sont bien vus contraints, sous peine d'etre superficiels, a produire de fort longues etudes ; et un tel travail a de quoi effrayer le chercheur. Pourtant, paradoxalement, c'est de ces difficultes memes qu'est ne notre courage. D'abord parce que toute difficulte est le defi qui allume l'enthousiasme du chercheur. Ensuite parce que, une partie de notre jeunesse s'etant passee a la frontiere du Nord, nous nous sentions proche de cet esprit, de ce dialecte, de ce fond de folklore regional. Puis, l 'enorme travail accompli par les critiques, s 'i·1 representai t pour nous de longues heures d'etude, offrait aussi de precieuses clefs pour la comprehension de pieces particulierement obscures, et nous pensons ici particulierement aux magnifiques etudes de Monsieur J. Petit sur La Ville. Enfin, il nous a semble pouvoir apporter quelque chose de neuf dans ce champ d'etudes grace a l'examen approfondi d'un theme encore peu aborde : celui de la Justice, dans ce theatre. Certains critiques dent nous citons les articles dans notre bibliographie, en avaient deja decele l'importance. H.A. Waters, dans un article base sur les reflexions de Cla.udel dans "Propositions su.r la Justice" (Positions / . · et prorosi tions II), avai t note la distinction qui existe entre la Justice Divine et la justice hw11aine da.ns l 'oeuvre de Claudel. Plus recep..JTient, J. Streignart s I etai t intgrroge sur le·) sens de "Justice", l 'ee;lise b3.tie -~ par Pierre de Craon dans L'Annonce faite a. HarJ..Q• ilais, a part ces articles interessants, il manquait encore, a notre connaissance, une .etude d'ensemble de ce theme dans toute l'oeuvre theatrale de Claudel • ..... · .De plus, nous nous proposions de traiter ce theme de fayon a ' l'eclairer non seulement sur le plan philosophique, mais en l'abordant sous un certain angle, a partir de textes mi-philosophiques, mi-poetiques de l'auteur, textes qui, esperions-nous, pourraient nous fournir a la fois une structure de base et un reseau d'images, clef qui nous aiderait dans l'exploration et la comprehension de ces pieces. Au debut de notre etude, nous avons commenc~ par nous pencher sur la traduction que Claudel fit de l'Orestie, dont le grand theme est 9recisement la Justice, et sur ses reflexions a propos de ce travail. Puis, lors de notre ~tude de son oeuvre non-theatrale, c'est l'Art poetique qui, pour notre propos, se revela la source la plus feconde, nous donnant, dans sa densite, un raccourci saisissant du monde interieur claudelien. La lecture aes "Propositions sur la Justice", mentionnees ci-dessus, vint confirmer et preciser de fa9on. explic:i.te cortaines no-Hons qui steta.ient degagecs de notre etude de l'Art......I?.oetiaueo

Identiferoai:union.ndltd.org:netd.ac.za/oai:union.ndltd.org:uct/oai:localhost:11427/39001
Date02 October 2023
CreatorsVan de Ghinste, Josee
PublisherFaculty of Humanities, Department of Philosophy
Source SetsSouth African National ETD Portal
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeDoctoral Thesis, Doctoral, Doctor of Philosophy
Formatapplication/pdf

Page generated in 0.0146 seconds