Lors de récents travaux de terrain et une importante campagne de forage, Anglo American Exploration (Canada) Ltée et Knight Resources Ltée ont découvert des indices de Ni-Cu-ÉGP dans la zone Frontier près du lac Chukotat, La zone Frontier mesure 3 km de long par 1.5 km de large et est située dans la partie centrale-ouest de la ceinture protérozoïque de Cape Smith à environ 130 kilomètres à l'ouest de la mine de nickel Raglan. Elle a été choisie pour une étude géologique, pétrographique et géochimique détaillée du complexe mafique-ultramafique qui comprend d'importantes minéralisations magmatiques de Ni-Cu-ÉGP. Les principaux objectifs de cette étude sont de caractériser le complexe en question ainsi que les sulfures associés et de comparer les résultats avec les modèles d'exploration actuellement utilisés dans la Formation de Raglan.
Les observations pétrographiques et de terrain font penser à une mise en place extrusive à subvolcanique dans des sédiments humides et non consolidés. Toutes les roches de la zone Frontier ont été métamorphisées au faciès schiste vert à amphibolite inférieur. Les structures sédimentaires et volcaniques ainsi que les textures ignées sont généralement bien préservées. La presque totalité des roches a donc pu être nommée d'après les textures et la minéralogie d'origine. Les principales volcanites rencontrées sont les unités uitramafiques, les basaltes komatiitiques et les basaltes ophitiques. Les unités uitramafiques sont des cumulais à olivine et/ou des cumulais à olivine et clinopyroxènes poecilitiques souvent entourés de bordures figées métamorphisées. Lorsque ces roches sont très fortement métamorphisées et déformées, elles ont été transformées en schistes à actinote-chlorite. À l'exception des sulfures remobilisés, la minéralisation niekélifère est associée aux roches uitramafiques et peut être subdivisée en sulfures disséminés, matriciels et massifs. Les principaux sulfures observés sont la pyrrhotite, la pentlandite et la chalcopyrite. Plusieurs horizons sédimentaires sont présents et consistent essentiellement en des mudstones-siltstones et des iitharénites volcaniques carbonatisées. Les mudstones-siltstones se caractérisent par leur richesse en sulfure avec de la pyrite et/ou pyrrhotite massive à semi-massive.
La géochimie des éléments majeurs montre que les roches de la zone Frontier sont semblables aux roches de la Formation de Raglan. Les roches uitramafiques et les basaltes komatiitiques de la zone Frontier présentent des affinités avec les laves du Groupe de Chukotat tandis que les basaltes ophitiques sont interprétés comme étant associés au Groupe de Povungnituk. Les éléments traces indiquent deux groupes de sédiments distincts : les mudstones-siltstones qui s'apparentent grandement aux sédiments du Povungnituk du bloc de Raglan et les Iitharénites volcaniques carbonatisées qui montrent des concentrations en ÉTR plus élevées et un contenu en Nb anormalement haut. Ceci pourrait être expliqué par la présence de fragments d'andésites potassiques, trachyandésites et phonolites riches en Nb dans les sédiments. D'après le contenu en nickel, les minéralisations sulfureuses se divisent en trois types : (1) une minéralisation riche en nickel avec des concentrations se situant entre celles des gisements 2-3 et Cross Lake, on parle d'une moyenne d'environ 7.5% nickel à 100% de sulfures, (2) une minéralisation moyennement riche en nickel qui consiste essentiellement en des sulfures remobilisés, et (3) une minéralisation pauvre en nickel typique des roches sédimentaires et des basaltes.
La majorité des roches contenant des sulfures riches en nickel ont des rapports Cu/Pd entre 5000 et 10000, ce qui est semblable au manteau primitif. Ces rapports ainsi que le contenu en Pd (50-1000 ppb) de ces roches suggèrent que ces dernières contiennent 1 à 20% de sulfures formés à des facteurs R de 100 à 500. Ces unités se sont donc formées à partir d'un magma n'ayant pas été appauvri en ÉGP indiquant ainsi l'absence d'une ségrégation précoce de sulfures. Les quelques échantillons montrant un facteur R de 1000 auraient pu avoir été formés dans un système plus dynamique. En effet, un contenu élevé en Pd dans les sulfures comparativement au Cu peut être expliqué par une interaction plus prononcée des goutelettes de sulfures avec un gros volume de magma.
La géochimie totale et la composition des clinopyroxènes indiquent une signature de contamination crustale dans quelques roches ultramafiques et basaltes komatiitiques. En effet, ces quelques échantillons sont légèrement enrichis en éléments incompatibles lithophiles. L'interprétation du degré de contamination est toutefois compliquée par les effets de l'altération. Plusieurs échantillons apparaissant contaminés ont aussi tendance à être fortement métamorphisés. Le patron des ÉTR et l'enrichissement en Nb pourraient donc être expliqués par la contamination et/ou par l'altération. De plus, la contamination n'est pas systématiquement détectée dans les roches minéralisées. Ceci pourrait suggérer un système très dynamique où la pulsion initiale de magma induit la ségrégation des sulfures et où une seconde arrivée de magma non contaminé entraîne le liquide silicate préalablement accumulé et le précipite à nouveau un peu plus loin dans le conduit.
En comparant la zone Frontier et la Formation de Raglan, on remarque de nombreuses similitudes mais aussi quelques différences. Les ressemblances majeures sont : (1) une position stratigraphique similaire le long de la limite concordante approximative entre le Groupe de Povungnituk supérieur et le Groupe de Chukotat inférieur; (2) la localisation des zones minéralisées à ou près de la base des unités ultramafiques dans des dépressions (embayments) qui tronquent les roches sous-jacentes, (3) un système de chenaux invasifs de lave, c'est-à-dire des coulées qui se s'épanchent d'abord sous forme de chenaux de lave puis érodent de plus en plus profondément leur substrat jusqu'à développer un caractère intrasif; et (4) des rapports Cu/Pd se rapprochant de ceux du manteau indiquant une absence de ségrégation de sulfures en profondeur. Les principales différences sont : (1) un contenu moyen en nickel à 100% sulfures inférieur dans la zone Frontier; (2) un facteur R moyen plus bas; (3) des lentilles minéralisées de tailles relativement réduites; (4) des signatures de contamination crustale moins prononcées; (5) une quantité inférieure en divine dans les unités ultramafiques; et (6) l'abondance des sulfures remobilisés.
En général, le système magmatique de la zone Frontier était probablement moins dynamique que celui de la Formation de Raglan. Cette interprétation n'exclut cependant pas la possibilité d'un gisement économique à Frontier. En effet, les rapports Ni/S élevés et Cu/Pd bas ainsi que la grande épaisseur de quelques horizons ultramafiques montrent un potentiel accru d'accumulation de sulfures riches en nickel. Ces unités particulières furent probablement formées dans un environnement d'écoulement magmatique bien spécifique plus favorable aux gisements magmatiques de Ni-Cu-ÉGP économiquement importants. Par le fait même, il est primordial d'obtenir plus d'information afin d'établir une distinction entre les roches générées durant des processus de minéralisation et les roches stériles générées lors d'une cristallisation normale. Il est également important de mieux comprendre la localisation spatiale des sulfures qui sont souvent affectés par une intense déformation et métamorphisme.
Identifer | oai:union.ndltd.org:Quebec/oai:constellation.uqac.ca:394 |
Date | January 2007 |
Creators | Dionne-Foster, Catherine |
Source Sets | Université du Québec à Chicoutimi |
Language | French, French |
Detected Language | French |
Type | Thèse ou mémoire de l'UQAC, NonPeerReviewed |
Format | application/pdf, application/msword |
Relation | http://constellation.uqac.ca/394/, doi:10.1522/030008268 |
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