Marie de Bourgogne (1457–1482), fille unique de Charles le Téméraire et de ce fait « la plus grande héritière qui fust de son temps », a jusqu’ici attiré assez peu d’attention de la part des spécialistes du XVe siècle. Une figure ambiguë, dont l’image oscille entre deux concepts opposés : une duchesse faible et inexpérimentée, qui ne joua qu'un rôle de pion dans la grande partie diplomatique entre l’Empire et la France, – ou bien une princesse résolue et indépendante qui savait ce qu'elle voulait et réussit à imposer sa volonté, Marie reste généralement dans l'ombre de ses proches parents. Il semble bien que cette attitude envers la duchesse est surtout le fait de la politique de ses descendants et successeurs, qui employaient son image dans leurs propres intérêts. Désireux de légitimer la transition du pouvoir de la Maison de Valois à celle des Habsbourg, ils ont opté pour la représentation de Marie comme héritière de Bourgogne, dame noble et pieuse dévouée à son mari et à sa famille, et non comme une femme de pouvoir. Cette image de la princesse semble être si puissante que souvent les historiens furent amenés à croire que l’œuvre politique sous le règne de Marie était principalement l'affaire de son époux. Ils concentrèrent alors leur attention sur Maximilien, le faisant ainsi – volontairement ou non – le héros principal de l'épopée bourguignonne pendant les années de crise qui ont suivi la mort du Téméraire. Or la réalité fut plus complexe. Jamais réellement retirée de la vie politique, ne cessant de voyager à travers ses pays afin d'assurer et affirmer l'omniprésence de l'autorité ducale, suivant de près les affaires politiques, Marie prit aussi un soin tout particulier à la création et la promotion de son image. La jeune duchesse qui, dès son accès inattendu au pouvoir en janvier 1477, dut affronter les attaques et les intrigues de Louis XI ainsi que les émeutes de ses sujets, fut de toute évidence parfaitement consciente, non seulement d’être la dernière héritière de la glorieuse maison de Bourgogne-Valois, mais encore d’être en position de faiblesse de par sa condition de femme. Elle chercha alors des réponses adéquates à ses défis – réponses militaires et diplomatiques ainsi qu’« iconographiques ». Ses ambitions, de souligner les liens dynastiques, d’appuyer la légitimité de sa succession et de son pouvoir suo jure, d’affirmer ses droits aux pays bourguignons, ainsi que d’asseoir son autorité sur les sujets indociles, ont influencé considérablement sa conséquente politique de représentation. Une étude de cette politique, fondée sur le regroupement inédit d’œuvres littéraires, historiographiques et iconographiques, et leur analyse, nous permettra d’abord de souligner la construction et l’évolution symbolique de l’image de Marie de Bourgogne en tant que femme régnante, mais aussi de reconsidérer une période de l’histoire de l’État bourguignon, celle de la transmission du pouvoir de la maison de Valois de Bourgogne à la dynastie des Habsbourg. / Mary of Burgundy (1457-1482) as ruler seems to be rather a non sequitur topic for a study as her short reign – sandwiched between those more important of her belligerent father, Charles the Bold, and her imposing spouse, Maximilian of Austria – is often marginalized by researchers. A somewhat ambiguous figure, whose image hovers somewhere in the space limited by two opposing concepts – an inexperienced and weak duchess, a mere pawn in the great political game played between France and the Holy Roman Empire, and a self-determined young princess who knew what she wanted and managed to dictate her will, praised by her biographers, Mary still remains generally in the shade of her nearest kinsmen despite the abundant publications concerning the Duchy of Burgundy.This attitude towards Mary was mainly formed by the politics of her successors and descendants, who employed her image in their own interests; eager to legitimize the transition of power from the House of Valois to that of the Habsburgs, they opted for the representation of Mary as the heiress of Burgundy, a noble and pious lady devoted to her family, and not as an independent sovereign. This image of “Mary the Rich” appears to be so powerful that often historians focus their attention primarily on Maximilian, thus – involuntarily or not – making him the main hero of the Burgundian epic of the crisis years. The real situation was, however, more complex. Never in fact retired from political life, never ceasing to travel across her lands in order to ensure and state the ubiquity of ducal authority, Mary was taking great care in creating and promoting her image, sending out to her contemporaries easily recognizable signs communicating her strong sense of who she was and how she wished to be seen. Recollected and examined with closer attention, these symbolic messages could depict a different image of this “lady of the country”, who was “revered and feared more than her husband”, according to the omniscient Philippe de Commynes, and reveal the clear political and cultural intentions she wanted to convey. Based on a number of important works of literature, history and iconography associated with the duchess as well as on various accounts on her, provided either by her contemporaries or – in a certain manner – by herself, principally through performing highly symbolic acts or through artistic commissions, the present research aims thus to reassess the person and the actual role of Mary of Burgundy in the history of the Burgundian state.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2014LIL30019 |
Date | 21 March 2014 |
Creators | Karaskova, Olga |
Contributors | Lille 3, Musée de l'Ermitage (Saint-Pétersbourg, Russie), Legaré, Anne-Marie, Grigoriev, Roman |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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