La chromoblastomycose (CBM) et la sporotrichose (SPT) sont des infections fongiques chroniques des tissus sous-cutanés. Elles touchent surtout les membres, après blessure végétale ou souillure tellurique. Les principaux agents fongiques responsables de CBM appartiennent aux genres Fonsecaea et Cladophialophora tandis que Sporothrix est à l’origine de la SPT. A Madagascar, les études menées entre 1955 et 1994 ont montré une prévalence de la CMB à 0,5/100 000 habitants faisant considérer ce pays comme le premier foyer mondial. Depuis, aucune donnée n’a permis d’actualiser ces observations. Malgré les nombreux cas de SPT observés par les médecins, son épidémiologie à Madagascar n’a jamais été décrite.L'objectif général était d'évaluer l’incidence actuelle de ces mycoses à Madagascar. Les objectifs spécifiques étaient de caractériser les espèces fongiques responsables et de mettre en place un réseau clinico-biologique pérenne permettant une gestion adaptée des patients et l’utilisation de méthodes moléculaires pour l’identification des souches.Une étude prospective conduite entre mars 2013 et juin 2017 a donné lieu à des consultations dans les régions ou dans le service de dermatologie de l’hôpital universitaire d’Antananarivo et a permis d’inclure des patients présentant des lésions sous-cutanées chroniques. Les méthodes conventionnelles de diagnostic mycologique ont été complétées par des méthodes moléculaires (PCR, séquençage, MALDI-TOF-MS). Les cas ont été classés au cours de réunions de concertation clinico-biologique.Au total, 148 patients d’âge moyen de 41 ans avec une prédominance d’hommes (75,0%) ont été inclus : 63 cas de SPT (42,5%) et 50 cas de CBM (33,8%) ont été confirmés. L’incidence annuelle de le CBM a été estimée à 0,38/100 000 habitants dans la région Sava au Nord où les cas prédominent avec au niveau du district Anosibe An’Ala (à l’Est) une incidence maximale de 1,12/100 000. Alors que la CBM était prédominante dans le Nord-Est, l'Est et le Sud de l'île, étonnamment, la SPT était presque exclusivement localisée sur les hautes terres centrales. L’incidence globale moyenne de SPT était de 0,17/100 000 habitants dans les hauts plateaux et de 0,07/100 000 pour l’ensemble de Madagascar. Pour la SPT, le risque est plus élevé chez les jeunes (< 18 ans) et les formes cutanéo-lymphatiques des membres supérieurs sont les plus fréquentes. Pour la CBM, le risque de contamination est élevé chez les agriculteurs et les professions de services et la majorité des lésions (82,9%) était localisée au niveau des membres inférieurs. Sur le plan mycologique, 63 Sporothrix schenckii, 7 Cladophialophora carrionii, 29 Fonsecaea sp dont 22 F. nubica ont été identifiés. Pour le genre Fonseceae, l’identification de l’espèce nubica remplace l‘espèce pedrosoi initialement proposée pour les isolats malgaches et souligne l’importance de l’identification moléculaire pour une classification précise des espèces.Cette première étude sur la SPT humaine à Madagascar a permis d’actualiser les données épidémiologiques mondiales et de classer Madagascar avec un niveau endémique modéré alors qu’il était considéré comme faible jusque-là. La CBM persiste à une incidence élevée et comparable à celle décrite jusqu’en 1994, illustrant l’absence de contrôle de cette mycose dans le pays. La constitution d’un réseau clinico-biologique local stable et les nouveaux outils diagnostics mis en place dans ce travail (PCR et le MALDI-TOF MS), vont faciliter la conduite de programmes de surveillance et de contrôle alors que l’OMS a récemment classé la CBM en maladie tropicale négligée. Une enquête environnementale est en cours pour détecter les sources de contamination dans l’environnement. Le réseau mis en place permettra dans un futur proche de nouvelles études thérapeutiques (nouveaux schémas thérapeutiques) ou génétique (facteurs d’hôtes) sur la CBM et SPT mais également sur d’autres mycoses endémiques et encore négligées à Madagascar / Chromoblastomycosis (CBM) and sporotrichosis (SPT) are chronic subcutaneous or cutanéo-lymphatic infections found mostly in tropical and subtropical regions. Studies carried out by the Institut Pasteur of Madagascar between 1955 and 1994 provided an inventory of the number of cases of CBM and identified this country as the leading focus of this mycosis worldwide. Mean incidence was estimated at about 0.5/100,000 inhabitants at the time. No new data have been obtained to update the epidemiological situation. About SPT, only sporadic cases have been reported in Madagascar, due to the absence of specific surveillance. CBM is usually caused by dematiaceous fungi, principally Fonsecaea spp. and Cladophialophora spp. The causal agent of SPT is Sporothrix schenckii, a dimorphic hyphomycete.The objectives of this study was to update the data on epidemiology and to evaluate the current burden of these two fungal infections. In addition, we aimed to set up a durable local bio-clinical network and to implement molecular tools to ensure reliable species identification (PCR, sequencing, mass spectrometry).A prospective study, involving the recruitment of patients with suspect lesions was undertaken from March 2013 to June 2017. Patients were included in the dermatology department of the univerity hospital of Antananarivo and through field campaigns in rural areas. Clinical samples were collected and analyzed with conventional mycological methods and molecular tools. Classification of the cases was achieved by the confrontation of mycological and clinical features.Among the 148 patients (mean age 41; male 75.0%): 63 SPT cases (42.5%) and 50 CBM cases (33.8%) were diagnosed. The highest annual incidence of CBM was estimated at 0.38/100,000 inhabitants in the Sava region located to the north. At the district level, the peak incidence was 1.12/100,000 at Anosibe An’Ala, eastern part of the country. Whereas CBM predominated at the periphery of the island, SPT was surprinsgly concentrated in the highlands where the mean incidence was 0.17/100,000 inhabitants. The incidence in the whole country was 0.07/100,000. SPT likelihood of infection was higher in young (<18 years) and the cutaneo-lymphatic forms of the upper limbs were the most frequent. For CBM, farmers and service workers were at high risk and the lesions were mostly (82.9%) located to the lower limbs. The mycological analyses revealed 63 strains of Sporothrix schenckii, 7 of Cladophialophora carrionii, 29 of Fonsecaea sp including 22 F. nubica. F. nubica identification corrected the one of F. pedrosoi previously found in Madagascar, highlighting the need for a molecular analysis of the strains.This is the first study describing human SPT in Madagascar. The SPT burden can now be considered as moderate instead of low as it was described before. It reveals an unexpected concentration of the patients in the central highlands. CBM burden was found at a high level, regrettably similar to the one described 20 years ago, showing the lack of control of this infection. The implementation of a durable bio-clinical network and of the new molecular tools (PCR et le MALDI-TOF MS) developed in this work will easy the development of surveillance programs, especially as the WHO recently added CBM in the neglected tropical diseases list. The network that was built for this work will be used for further therapeutic trials on new schedules of treatment, new drugs or new formulations as well as genetic studies about predisposing factors of CBM and SPT and others deep fungal infections that are still neglected in Madagascar. Yet, an environmental survey is ongoing to describe the sources of contamination.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2018GREAS028 |
Date | 29 October 2018 |
Creators | Rasamoelina, Tahinamandranto |
Contributors | Grenoble Alpes, Université d’Antananarivo, Madagascar, Gigou-Cornet, Murielle, Andriantsimahavandy, Abel |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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