« Du mélange progressif dinfluences ethniques diverses, le temps a pu faire surgir un art spécial, ni rhénan, ni flamand, ni français, bien quil se rattache à tous les trois par de nombreuses affinités. Cet art, dont Liège a voulu étaler les productions dans lordre chronologique, il faudrait aujourdhui lui donner un nom, pourquoi pas « art mosan ». Charles de Linas, écrivait ces quelques lignes en se remémorant sa visite de lexposition dart ancien, organisée à Liège, en 1881, à loccasion du cinquantenaire de lindépendance belge. Frappé par la parenté de style, de conception et desprit des oeuvres quil avait pu y admirer, il proposait de les regrouper, sous le vocable commun dart mosan. En réalité, il ne sagissait pas là dune révélation soudaine. Une poignée dérudits avait, depuis quelques décennies, déjà, pressenti lexistence dun art spécifique aux rives de la Meuse. Une fois nommé, cet art mosan semblait toutefois accéder à un nouveau degré de vraisemblance. En portant lart mosan sur les fonts de baptême, Charles de Linas lui conférait une certaine légitimité. Il ouvrait le pas, sans le savoir, à une impressionnante littérature.
À lexception de quelques brèves synthèses, récapitulant en quelques lignes les étapes majeures du débat scientifique, ou dressant létat de la question pour certains aspects spécifiques, il nexistait, jusquà lheure actuelle, aucune étude historiographique de lart mosan. Après plus dun siècle et demi de recherches, il semblait nécessaire de faire le point, non seulement pour dresser un bilan, un état de la question, mais également pour situer lart mosan au sein de lévolution générale du débat historique, en évaluant linfluence du contexte historique, politique et culturel sur lévolution générale des débats qui lui étaient consacrés. Cette historiographie de lart mosan, est abordée sous une double démarche, appréhendant le phénomène, dune part sous une approche terminologique, identitaire, géographique et historique, et dautre part par le biais dun vaste état de la question, mettant en évidence les étapes majeures, les apports, et, le cas échéant, les manquements ou les failles du débat scientifique.
La première partie de cette étude retrace la manière dont le patrimoine artistique mosan fut perçu, à lépoque médiévale tout dabord, tout dabord, puis par les esthètes et les érudits des siècles suivants. Dans cette même optique, une importance toute particulière est accordée au destin du patrimoine mosan, tout au long du XIXe siècle, jusquà la création du terme art mosan, par Charles de Linas. Le rôle joué dans sa redécouverte et sa sauvegarde par les collectionneurs et les amateurs dart ancien, par les sociétés archéologiques, par les érudits locaux, par lÉtat belge et ses organes officiels, sont tour à tour évoqués. La manière dont le concept même dart mosan fut reçu, dès sa création, par les milieux scientifiques belges et étrangers est également analysée. Dès les premiers débats les spécialistes semblent avoir éprouvé du mal à saccorder quant à la définition géographique et chronologique du phénomène artistique mosan. De toute évidence, le concept dart mosan simposa dès le départ comme un concept à géométrie variable, de sorte quil nexiste pas une, mais plusieurs définitions de lart mosan, coexistant et se superposant tant bien que mal. Dans ce contexte, il nous semblait pertinent daborder la définition de lart mosan par le biais de plusieurs questionnements successifs : Lart mosan est-il un art flamand, un art wallon ou un art lotharigien ? Sagit-il dun art impérial ? Dun art chrétien ? Comment se situe-t-il par rapport à son voisin rhénan ? Lart mosan ne peut être perçu comme un phénomène indépendant et autonome, fonctionnant à huis clos. Il semblait, dans ce sens, utile daborder la question des échanges artistiques avec létranger : la Rhénanie, mais aussi la France, lAngleterre, la Basse-Saxe, la Scandinavie, la Pologne et lItalie. Quelques grandes expositions dart ancien, organisées, à des propos divers, depuis le milieu du XIXe siècle, sur un plan national, régional et international, jouèrent un rôle essentiel dans la diffusion et la vulgarisation des connaissances relatives au patrimoine mosan. Certaines dentre elles, comme par exemple lexposition de Malines en 1864, celle de Liège, en 1881, ou, plus récemment, la grande exposition Rhin-Meuse de 1972, purent savérer, à cet égard, particulièrement déterminantes. Aussi avons-nous tenu à leur consacrer un bref survol historique, envisageant tour à tour le contexte de leur organisation et leurs apports scientifiques essentiels.
La seconde partie de cette thèse se concentre essentiellement sur lévolution générale du débat scientifique. Elle dresse un vaste état de la question, retraçant les étapes majeures des recherches et en analysant certains points spécifiques du débat scientifique. Nous avons choisi de laborder par le biais des différentes techniques artistiques mosanes : lorfèvrerie tout dabord, art mosan par excellence, mais également la dinanderie, lenluminure, larchitecture et la sculpture. Cette parcellisation artificielle du sujet correspond à la situation réelle du corpus bibliographique. Présente dès les premiers débats, cette catégorisation sous la forme de terrains de recherche ponctuels, dut incontestablement contribuer à brouiller la perception que lon se faisait de certains domaines de recherche. Il convient dailleurs de noter que, au sein de limmense bibliographie consacrée à lart mosan, les ouvrages de synthèse consacrés au phénomène artistique mosan dans son ensemble restent relativement peu nombreux. Leur approche est souvent superficielle et les différentes techniques y sont toujours envisagées séparément. Les approches synchroniques du phénomène artistique mosan, pour chaque période artistique donnée, restent particulièrement rares. Aussi, avons-nous également choisi daborder cet état de la question par domaine de recherche, non parce que cela correspond à notre perception personnelle du sujet, mais par souci de clarté et dexhaustivité. La période de recherche analysée dans le cadre de cette étude sétend, à lexception de quelques sources anciennes, du XIXe siècle jusquà nos jours. À titre documentaire, quelques notices biographiques sont, en fin de thèse, consacrées aux principales personnalités marquantes, actives avant 1950. Cette étude est complétée par un album. Comme il ne sagit pas dune étude artistique proprement dite, mais dune historiographie, cet album se limite à un rôle purement illustratif. Vu lampleur du sujet abordé, il aurait été irréalisable dy reproduire toutes les oeuvres qui sy trouvent mentionnées, aussi nous sommes nous limités aux principales, complétées de certains documents iconographiques illustrant certains points de vue représentatifs.
Identifer | oai:union.ndltd.org:BICfB/oai:ETDULg:ULgetd-01112009-143217 |
Date | 20 January 2009 |
Creators | Balace, Sophie |
Contributors | Piavaux, Mathieu, Van den Bossche, Benoît, Lemeunier, Albert, Kupper, Jean-Louis, Dierkens, Alain, Stratford, N. |
Publisher | Universite de Liege |
Source Sets | Bibliothèque interuniversitaire de la Communauté française de Belgique |
Detected Language | French |
Type | text |
Format | application/pdf |
Source | http://bictel.ulg.ac.be/ETD-db/collection/available/ULgetd-01112009-143217/ |
Rights | unrestricted, Je certifie avoir complété et signé le contrat BICTEL/e remis par le gestionnaire facultaire. |
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