Leptosphaeria maculans, agent de la nécrose du collet des crucifères, est un agent pathogène majeur du colza (Brassica napus). La lutte génétique est aujourd’hui le procédé le plus utilisé afin de protéger les cultures des attaques de ce champignon. Cette méthode se base principalement sur l’utilisation de cultivars possédant des gènes de résistance spécifique (Rlm) qui permettent le déclenchement des réactions de défense de la plante parla reconnaissance directe ou indirecte des produits des gènes d’avirulence correspondants (AvrLm) présents dans la population pathogène. Plusieurs de ces résistances ont déjà été massivement déployées en France et dans le monde, connaissant dans un premier temps un fort succès commercial grâce à la protection fournie, suivie d’une perte d’efficacité très rapide. Avant cette thèse, le nombre d’études au champ des processus impliqués dans le contournement d’un gène de résistance était très limité, en particulier chez les champignons. L’objectif de cette thèse était d'étudier l’évolution moléculaire du gène d’avirulence AvrLm4-7sous pression de sélection, en profitant de son clonage et de la commercialisation récente de cultivars Rlm7, afin d’obtenir une étude précoce et détaillée des mécanismes moléculaires à l’origine du contournement d’une résistance spécifique. Le gène AvrLm4-7 présente l’originalité de coder pour une protéine responsable d’une double spécificité d’interaction vis-à-vis des gènes Rlm4 et Rlm7. Dans un premier temps, j’ai pu valider par mutagenèse dirigée le rôle primordial de l’acide aminé 120 dont la mutation affecte la reconnaissance d’AvrLm4 par Rlm4 sans toutefois altérer la reconnaissance d’AvrLm7 par Rlm7.Le contournement de la résistance Rlm7 a été ensuite analysé à l’aide d’une importante collection de souches prélevée sur deux sites expérimentaux indépendants (Grignon ; Versailles) sur une période de trois ans. Sur le premier site était cultivée une variété Rlm7 en monoculture avec un travail du sol simplifié tandis que sur le second site, le mode de culture incluait rotation culturale et enfouissement par labour des résidus de cultures. Il a ensuite été montré que, au contraire de la reconnaissance AvrLm4/Rlm4, un grand nombre d’évènements de mutation peuvent être à l’origine de la virulence d’une souche vis-à-vis de Rlm7. L’analyse moléculaire des souches virulentes et avirulentes de cette collection a ainsi permis de répertorier sept catégories d’évènements de mutation. La grande majorité des cas concerne la délétion d’AvrLm4-7 mais des mutations dues au RIP et plusieurs autres évènements de mutation provoquant l’introduction prématurée de codons stop dans la séquence codante du gène sont aussi observés. La majorité de ces évènements de mutation sont liés à la reproduction sexuée du champignon et ont lieu au sein même de la parcelle d’étude. Le phénotypage de cette collection a par ailleurs révélé un fort contraste entre les deux sites expérimentaux, démontrant ainsi l’importance des pratiques culturales dans le maintien de l’efficacité de la résistance Rlm7 dans le temps. En effet, après trois années de culture de cultivars Rlm7, la fréquence des souches virulentes a7 dans les populations du site de Versailles reste inférieure à 1 % contre environ 30 % sur le site de Grignon. Finalement, le phénotypage de la collection de souches a également montré que le contournement de Rlm7 s’accompagnait dans plus de 98% des souches de la résurgence de l’avirulence AvrLm3. Par l’étude de cette collection et par croisements génétiques, j’ai pu montrer que AvrLm3 n’était pas un nouvel allèle d’avrLm4-7 mais un second gène situé en région télomérique à 19.3 cM d’AvrLm4-7. J’ai également démontré une interaction fonctionnelle antagoniste entre AvrLm4-7 et AvrLm3 qui empêche la reconnaissance Rlm3 /AvrLm3 en présence d’AvrLm4-7 et explique la restauration de l’avirulence AvrLm3 lors de la perte de l’avirulence AvrLm7.Par une association originale de biologie moléculaire, de génétique des populations et d’agronomie, j’ai ainsi pu apporter une nouvelle illustration à la course aux armements entre un agent pathogène et sa plante hôte, les gènes AvrLm3 et AvrLm4-7 utilisant deux stratégies distinctes afin d’échapper à la reconnaissance de leurs gènes de résistance spécifiques. / Leptosphaeria maculans is a filamentous ascomycete causing stem canker of oilseed rape (Brassica napus). This disease is often controlled by the use of B. napus cultivars harbouring major resistance genes (Rlm). Direct or indirect recognition of the corresponding avirulence protein (AvrLm) in the pathogen triggers plant defence reactions. Several resistances have been massively deployed in France and worldwide, they initially showed commercial success due to the protection provided and in a second time, a very fast decrease of efficiency (resistance breakdown).Prior to this thesis, field studies of resistance gene breakdown mechanisms were rare, especially for fungi. The purpose of this PhD thesis was to study the molecular evolution of the avirulence gene AvrLm4-7 under selection pressure, by exploiting our knowledge of the gene, and the recent release of Rlm7 cultivars, to obtain an early and detailed study of the molecular mechanisms involved in a resistance gene breakdown. AvrLm4-7 induces resistance responses in plant harbouring either Rlm4 or Rlm7 and I validated by targeted point mutagenesis the central role of the amino acid 120 in the avrLm4-7-Rlm4 interaction. Its mutation prevents AvrLm4-7 recognition by Rlm4 without affecting avrLm4-7-Rlm7 recognition.Loss of avirulence towards Rlm7 was then studied by the analysis of an important isolate collection originating from two independent French experimental fields (Grignon; Versailles) over three years. In the first field was cropped Rlm7 cultivars in monoculture with low tillage agronomical practices whereas crop rotation and ploughing were done in the second field. In contrast to AvrLm4-Rlm4 evolution, a great number of mutations were found to explain the “gain” of virulence towards Rlm7. Seven mutational event categories were found. The great majority of these categories involve AvrLm4-7 deletion but mutation due to RIP and several other mutational events causing premature apparition of stop codons in the coding sequence of the gene were observed too. The majority of these events are linked to the sexual reproduction of the fungus and occurs in the experimental field.In addition, our work showed the importance of the cultural practices in preserving Rlm7 efficacy. Indeed, after three years using Rlm7 cultivars, a7 frequency was below 1% whereas representing around 30% of the isolates observed in Grignon.Finally, phenotyping of the isolate collection also showed the resurgence of an A3 phenotype linked with the loss of AvrLm7 avirulence in more than 98% of the isolates. Genetic analysis and collection phenotyping showed that AvrLm3 is not a new AvrLm4-7 allele but a distinct gene located in a telomeric region at 19.3 cM of AvrLm4-7. I also demonstrated that an antagonistic interaction between AvrLm4-7 and AvrLm3 exists: the presence of Avrlm4-7 prevents Rlm3 to detect AvrLm3 and explains the surge of the AvrLm3 avirulence along with the loss of the AvrLm7 avirulence.By an original association of molecular biology, population genetic and agronomy, this work provided a new illustration of the plant-pathogen arms race, AvrLm3 and AvrLm4-7 using two different strategies to escape their respective resistance genes.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2011PA112022 |
Date | 04 March 2011 |
Creators | Daverdin, Guillaume |
Contributors | Paris 11, Balesdent, Marie-hélène |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text, Image |
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