Cette recherche porte sur le bouleversement épistémologique qui affecte la littérature patrimoniale, à l’ère du numérique et du multimédia. La première partie s’intéresse à la fondation de la notion de littérature patrimoniale en France. Elle propose une revue synthétique des contextes et des discours qui ont fondé cette notion à travers le temps. Les zones de fracture et de continuité entre conceptions passées et conceptions contemporaines y sont questionnées. L’analyse aboutit au constat que conceptions émergentes et traditionnelles forment une mémoire dialogique, vive et complexe, qui innerve de ses paradoxes les archétypes fondateurs : les notions d’auteur, d’œuvre et de « bibliothèque ». La deuxième partie examine la réception contemporaine de la littérature patrimoniale, pour laquelle « la bibliothèque » est une mémoire du passé mais aussi une réserve d’œuvres à venir dans le cadre du dialogue entre les arts et les modes que les techniques contemporaines favorisent. Pour le récepteur contemporain, la bibliothèque patrimoniale est intériorisée comme une triple mémoire formée de la bibliothèque collective, de sa propre bibliothèque intérieure, d’une bibliothèque virtuelle où se régénèrent le corpus patrimonial et les discours qui l’environnent. Ce récepteur connaît et pratique la bibliothèque collective, vouée à la conservation de la mémoire collective ; il est conscient aussi de posséder une bibliothèque intérieure où s’opère pour lui une double conversion : il devient sujet lecteur et l’œuvre patrimoniale texte du lecteur. Cette double conversion créative se concrétise et se réalise effectivement dans la bibliothèque virtuelle multimodale, lieu de partage et de discours sur les œuvres qui lui permet d’entrer en conversation avec d’autres sujets-lecteurs et en contact avec d’autres communautés discursives et, dans ce cadre, de produire à la fois de nouveaux discours sur les œuvres mais aussi des œuvres secondes. On pose que l’œuvre source et ses objets seconds forment alors une sémiosphère multimodale. Comme les objets seconds multimodaux émanent de communautés diverses, la notion de sémiosphère réinterroge les hiérarchies culturelles héritées. Etre cultivé aujourd’hui, ce n’est plus seulement connaître les œuvres de la bibliothèque collective mais investir la sémiosphère. Le sujet lecteur est amené à devenir sujet récepteur multi-compétent, capable de naviguer d’une communauté de discours et de pratiques à une autre. Il se nourrit de la diversité, assure la communication productive entre les objets et les communautés dans la sémiosphère et favorise, par sa seule navigation experte, le développement de la sémiosphère, c’est-à-dire de la culture partagée. / This research is concerned with the epistemological upheavals which affect literary heritage in the digital and multimedia age. The first part of this work explores the origin of the notion of literary heritage in France. It provides a synthetic review of the contexts and discourses which have underpinned this notion through time. Present and past concepts are examined in terms of continuity and discontinuity. The analysis leads to the conclusion that both emerging and traditional understandings blend together creating a dynamic, complex and dialogical trace which through its paradoxes informs the founding archetypical notions of author, literary work and ‘library’. The second part examines the contemporary reception of literary heritage for which the ‘library’ represents not only a record of past literary works but constitutes a stock for future ones given the increasing trend by which the Arts are distributed to the public using the medium of multimedia digital technology. The contemporary receiver conceives and internalizes the literary heritage library in three ways: as a public library, as an internal library, and as a virtual library where heritage corpus and discourses about corpus are regenerated. This receiver knows and uses the public library as a place which is dedicated to the conservation of the collective memory; s/he is also conscious of possessing an internal library where a double conversion takes place: s/he becomes a « reader-subject » and the heritage literature is the reader’s text. This double creative conversion takes a concrete form in the virtual multimodal library where literature can be shared and discussed. This enables the receiver to start up a conversation with other readers and be connected with other discourse communities. Within this framework, new discourses are generated concerning mainstream literary works and their offshoots. We consider then that the original literary work and its offshoots constitute a multimodal semiosphere. As the derived multimodal objects come from different communities, the notion of semiosphere re-interrogates the cultural inherited hierarchies. Nowadays, being cultured does not consist in knowing the contents of the public library but instead involves being invested in the semiosphere. The reader is encouraged to become a multi-skilled receiver navigating from one discourse community and/or community of practice to another. S/he feeds on diversity, ensures prolific communication within the semiosphere between objects and communities and, thanks to expertise in multimedia browsing skills, s/he enhances the development of the semiosphere, i.e. the shared culture.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017BOR30047 |
Date | 12 October 2017 |
Creators | Puidoyeux, Claude |
Contributors | Bordeaux 3, Louichon, Brigitte |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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