Cette thèse s'intéresse au système des pratiques enseignantes dans un contexte de changement paradigmatique sur le plan épistémologique. Au Québec, ce changement est formalisé par le renouvèlement des injonctions curriculaires et des finalités normatives qui les sous-tendent. Or, la recherche sur les changements curriculaires témoigne des relations complexes entre la nature du changement et les réactions des acteurs (Perrenoud, 1999). Elle démontre notamment que les curricula restent des prescriptions vides de sens et inopérantes si elles ne tiennent pas compte des logiques de fonctionnement des pratiques enseignantes. Ces dernières, en tant qu'actions sociales structurées et structurantes, impliquent que les enseignants, tant par leur conscience pratique (dont font partie les savoirs expérientiels et les normes intériorisées telles les croyances épistémologiques) que par leurs propres finalités et en fonction des conditions de leur action, évaluent la légitimité et la validité des énoncés curriculaires (Habermas, 1987). Chez les enseignants québécois du domaine Histoire et éducation à la citoyenneté, les changements au curriculum global ont été conjugués à un changement paradigmatique qui a engendré un débat sur la légitimité et la validité des finalités explicites de la discipline et de son apprentissage, particulièrement en ce qui concerne l'histoire nationale (Dagenais et Laville, 2007). C'est dans ce contexte que les enseignants d'histoire nationale doivent se construire une représentation de leur travail, donner un sens au programme de formation et interpréter les finalités qui s'y trouvent (Lessard et Tardif, 2002; Schutz, 1987). Il est toutefois difficile de savoir comment se joue cette dynamique dans la pratique enseignante au quotidien et de façon concrète. Dans le cadre de cette recherche, nous avons fait du système des pratiques enseignantes notre objet d'étude afin de comprendre par quels moyens les enseignants d'Histoire et éducation à la citoyenneté (HEC) au deuxième cycle secondaire concilient les finalités du programme avec la forme scolaire, les attentes sociales qui balisent leurs pratiques enseignantes et leurs schèmes subjectifs. La question de la dynamique entre les finalités curriculaires du programme d'HEC et le système des pratiques enseignantes a été abordée sous l'angle des pratiques sociales, plus particulièrement par le biais de la théorie de la structuration de Giddens (1979), qui s'inscrit dans une perspective culturaliste praxéologique. Le recours à cette perspective théorique a permis d'appréhender les pratiques enseignantes selon la double herméneutique qui caractérise la négociation entre le singulier (l'enseignant comme agent social) et le générique (la structure curriculaire, scolaire et culturelle). Afin de rendre compte de la complexité du système de la pratique sociale qu'est l'enseignement de l'histoire, nous avons privilégié une étude multicas d'orientation interprétative. Les croyances épistémologiques de 26 enseignants d'HEC du deuxième cycle secondaire ont été identifiées à l'aide d'un questionnaire portant sur les croyances relatives à l'enseignement et à l'apprentissage de l'histoire (Maggioni, VanSledright et Alexander, 2009). L'analyse des résultats issus de ce questionnaire a permis d'identifier quatre cas typiques et trois cas atypiques. Des entrevues semi-dirigées réalisées auprès de chacun de ces sept enseignants, portant sur leurs finalités subjectives et soumises à une analyse thématique (Paillé et Mucchielli, 2003), suivies de l'observation par vidéoscopie de deux séances de cours par enseignant, également soumises à l'analyse thématique, ont permis de générer un portrait de chaque système des pratiques de ces enseignants. Ces systèmes ont été comparés les uns aux autres (Yin, 2003) afin de dégager les patterns communs aux pratiques, ainsi que leurs dimensions singulières, puis une analyse situationnelle phénoménologique et structurale (Paillé et Muccchielli, 2003) de ces patterns a permis de saisir des logiques culturelles globales des pratiques. Ces résultats ont mis en lumière certains facteurs culturels structuraux et contextuels qui agissent sur l'évaluation par les enseignants de la non-légitimité du curriculum et de ses fondements, ainsi que sur la persistance de pratiques transmissives et magistrocentrées.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : pratiques enseignantes, épistémologie, analyse structurale, enseignement de l'histoire, histoire nationale
Identifer | oai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QMUQ.5079 |
Date | 11 1900 |
Creators | Demers, Stéphanie |
Source Sets | Library and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada |
Detected Language | French |
Type | Thèse acceptée, NonPeerReviewed |
Format | application/pdf |
Relation | http://www.archipel.uqam.ca/5079/ |
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