La gestion des risques est centrale au discours contemporain relatif à la régulation sanitaire et environnementale. Or, en dépit de son aura scientifique et technique et de décennies de travaux relatifs au paradigme du risque, on comprend encore mal quelles en sont les dimensions opératoires au moment du choix d’instruments d’action publique. La façon dont cette approche façonne les espaces à l’intersection du contrôle et de l’expertise dans la délégation politico-administrative demeure particulièrement peu problématisée.
Cette thèse a pour objectif de dénaturaliser la gestion des risques et d’en mettre en relief la nature et les contours dans le contexte de l’administration fédérale canadienne. À partir d’un ancrage dans les théories institutionnalistes critiques de la régulation, cette recherche qualitative s’appuie sur la documentation du processus décisionnel relatif à trois substances toxiques clés (bisphénol A, BNST, sulfate de diéthyle) dans le cadre d’une initiative récente de gestion des substances chimiques toxiques, soit le Défi à l’Industrie du Plan de gestion des produits chimiques.
L’argument central de cette thèse est que contrairement à certaines intuitions partagées, la gestion des risques n’a pas constitué un concept formalisé au sein d’artefacts administratifs ou législatifs, ni plus largement un cadre significativement orientant sur le plan du processus ou des facteurs décisionnels. Elle s’est plutôt cristallisée sur le plan du discours, en fournissant un narratif performatif de priorisation de l’action publique dans un contexte complexe et fragmenté.
Cette recherche montre que la portée opératoire d’une approche centrée sur la gestion des risques sociétaux doit être comprise à partir d’une mise en relation avec la gestion des risques institutionnels, telle qu’elle s’est formellement incarnée depuis 2001 au sein de l’administration fédérale canadienne sous l’égide de la gestion intégrée du risque. Le cadre discursif de la gestion des risques joue plus largement un ensemble de rôles-clés dans la gestion des substances toxiques (cadre de mise à l’agenda, vecteur de communication organisée, instrument de justification des agendas règlementaires) contribuant tant à amplifier certains espaces discrétionnaires qu’à en atténuer d’autres.
La principale contribution de cette dissertation pour le champ de l’administration publique est de proposer une problématisation critique originale de la gestion des risques qui soit empiriquement ancrée dans le détail des cadres administratifs et législatifs, et sensible à ses dimensions productives pour le renouvellement des approches de régulation environnementale et sanitaire.
Identifer | oai:union.ndltd.org:uottawa.ca/oai:ruor.uottawa.ca:10393/34325 |
Date | January 2016 |
Creators | Nadeau, Geneviève |
Contributors | Rouillard, Christian |
Publisher | Université d'Ottawa / University of Ottawa |
Source Sets | Université d’Ottawa |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thesis |
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