Nous décrivons les mutations des formes de communication médiatisées par les collections d'histoire naturelle dans le contexte de leur numérisation. Ces collections ont servi de paradigme pour penser le rôle des artefacts matériels dans la production de données scientifiques standardisées mobilisant des acteurs aux compétences hétérogènes, y compris des amateurs. Nous abordons leur numérisation dans le but de tester l'hypothèse de la possibilité de reconstituer à partir de dispositifs numériques leurs spécificités documentaires. Il en résulterait la possibilité d'utiliser le spécimen numérisé à toutes les étapes de la communication scientifique où interviennent les collections : document issu de collectes parfois associées à des activités de loisir, la planche d'herbier devient une source d'information examinée au début de la recherche scientifique, puis le support des résultats d'une nouvelle expertise conservée en vue de sa réexploitation future ; elle acquiert avec le temps une valeur patrimoniale renseignant sur l'histoire des collections. La reconstitution de ces fonctions ouvre la perspective d'une médiation des collections numérisées capable d'intégrer des objectifs d'exploitation scientifique et de valorisation patrimoniale qui pourrait être utile à d'autres corpus. L'augmentation des fonctionnalités des bases de données au-delà de la seule consultation des collections dépend de la volonté d'innovation des acteurs de la valorisation et de l'exploitation des collections. C'était l'un des objectifs de l'Infrastructure Nationale en Biologie Santé e-Recolnat, qui s'ajoutait à celui de la numérisation des collections détenues par les institutions partenaires. Ce projet a conduit à la participation d'un laboratoire de sciences de l'information et de la communication, Dicen-IDF, à l'infrastructure, avec une mission de conception et de développement d'applications destinées à la valorisation des collections numérisées. La conception s'est appuyée sur l'observation des pratiques d'usagers de différentes spécialités et sur la recension de leurs attentes à l'égard des outils numériques. C'est sur cette démarche de recherche-action articulant des phases d'observation, de conception et de test des dispositifs développés que s'appuie notre étude. À partir d'un cadre d'analyse de l'activité des différents usagers comme flux de transactions, définies comme des interactions produisant une transformation symbolique et artefactuelle au sein d'un collectif qu'elles participent à modeler, notre enquête a mis en évidence différentes formes de communication médiatisées par les collections numérisées, selon les types de dispositifs utilisés et les spécialités des usagers. Les collections numérisées facilitent la progression concomitante d'inventaires locaux, qui s'enrichissent chacun des données progressivement mises en ligne par d'autres. L'intégration des chercheurs à ce travail documentaire reste dominé par des interactions avec les gestionnaires, même si certaines bases de données ouvrent des droits de correction aux usagers. Les spécimens numérisés jouent un rôle qui va du simple intermédiaire facilitant l'accès à la planche à celui de document de référence. Le logiciel développé pour e-Recolnat par le laboratoire Dicen-IDF vise à encourager l'exploitation scientifique des spécimens numérisés en associant à la sélection dans la base de données des fonctions d'annotation, de tri et de mesure, sans encore permettre l'archivage des données issues de ces opérations. L'intégration de contributeurs amateurs à l'information des collections est reconstituée à travers une plateforme proposant la transcription des étiquettes des spécimens à des internautes non spécialistes : s'y déploient de nouvelles formes de médiation scientifique, entre animateurs impliqués dans des activités de conservation et de recherche et contributeurs réguliers qui s'en font les relais. / We describe evolving patterns of communication mediated by naturalistic collections in the context of their digitisation. Natural history collections have been a reference for theorising the role played by material artifacts in the process of standardised data production lead by multiple and heterogenous actors, including amateurs. We study the digitisation of naturalistic collections with the aim of validating the hypothesis that the characteristics of their documents and the principles of their organisation can be reproduced with a digital device. If so, digitised specimens could be used at each step of the scientific communication involving uses of naturalistic collections: sometimes collected during leisure botany practices, specimens are a source of information used during the scientific study, and in the end they are the medium for publishing the results of the study, using a new label ; over time, they become a scientific heritage documenting the history of knowledge creation. The digital reproduction of these functions of herbaria creates a model for digital mediation enabling scientific collections to be considered as both scientific information and scientific heritage. This model could be used for other kinds of digitised collections. The project of extending the functionalities of databases of digitised specimens can be lead only by curators and users. It was one of the goals of Recolnat, a national infrastructure in biology and health, in addition to digitisation of collections. In this aim, a lab in communication sciences, Dicen-IDF (Paris), has been part of the infrastructure. It had to design and develop digital tools for enhancing uses of digitised specimens. The designing process was grounded on the results of the observation of uses of digitalised herbaria and needs expressed by users working with different methods. We grounded our theoretical research on this inquiry involved in the design process in which we were taking part; user tests of devices developed by the lab were the last part of our inquiry. We analysed all the activities using specimen with the same theoretical framework grounded on a conception of communication as a set of interactions transforming artifacts and creating new meanings and new forms of social organisation. Thereby we analysed different models of communication mediated by digitised collections, depending on the functionalities of databases and on the domain and skill set of users. Digitised collections have been enhancing the numerous local efforts of inventorying collections by making available online the results of each of them. Researchers mainly communicate their results to curators in order to enrich collection data, because few databases integrate scientific annotations or corrections online. Scientific uses of digitised specimens are varying depending on the specialities : they can be used as a scientific reference, but are often used only for identifying the specimens owned by a herbarium. The software developed by the Dicen-IDF lab enhances scientific uses of digital specimen. Another software of the Recolnat project enables the traditional participation of amateurs in the curation of naturalistic collections by crowdsourcing online transcription of sheet labels. This platform creates new forms of scientific mediation between animators promoting the understanding of scientific collections and volunteers learning the principles of documenting collections.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017CNAM1141 |
Date | 01 December 2017 |
Creators | Chupin, Lisa |
Contributors | Paris, CNAM, Zacklad, Manuel |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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