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Exploration qualitative de l’expérience de tristesse pour des patients souffrant d’un trouble de personnalité limite

La représentation que se font les patients souffrant d’un trouble de personnalité limite (TPL) de leur expérience de tristesse est un domaine de recherche important tant pour la conceptualisation du trouble que pour son traitement. Ces patients sont connus pour vivre une grande détresse qui se manifeste à travers divers symptômes (Bland, Williams,
Scharer, & Manning, 2004). Un nombre élevé de patients présentant un TPL se suicident (Paris, 2002), font au moins une tentative de suicide au cours de leur vie (Oldham, 2006)
et s’automutilent (p.ex., Brown, Williams, & Collins, 2007). La recherche sur la souffrance du TPL s’entend sur un paradoxe : ces patients souffrent beaucoup, mais ils
vivent peu de tristesse. Leur souffrance prend une forme distincte en qualité, celle-ci demandant à être davantage étudiée empiriquement et théoriquement.
L’objectif de cette thèse est d’explorer la représentation de la tristesse de participants souffrant d’un TPL. Alors qu’à notre connaissance aucune étude n’a encore poursuivi
cet objectif spécifique, différentes pistes de réflexion ont été soulevées dans la documentation scientifique pour expliquer la nature de la souffrance du TPL en ce qui a
trait au tempérament, au fonctionnement mental, à la dépression, à l’organisation de la personnalité et aux événements traumatiques.
La première étude de cette thèse vise à réfléchir théoriquement et cliniquement à la tristesse, afin d’en raffiner la définition, entre autres par opposition à la détresse. Elle propose une distinction tant au plan métapsychologique que phénoménologique de ces
deux expériences, en se basant sur des théories évolutionnistes des émotions et sur différentes conceptions psychanalytiques du fonctionnement mental et des relations
objectales. Une vignette clinique illustre cette réflexion.
La seconde étude vise à explorer, par une démarche qualitative, les principaux thèmes abordés par des participants souffrant d’un TPL lorsqu’ils racontent des épisodes de tristesse. Sept participants avec un diagnostic de TPL évalué à l’aide du SCID-II (First, Gibbon, Spitzer, & Williams, 1997) ont participé à une entrevue semi-dirigée visant le rappel de deux épisodes relationnels de tristesse. Suivant la méthode d’analyse phénoménologique interprétative (Smith, 1996), une analyse thématique de quatorze épisodes de tristesse a été effectuée conjointement par deux candidates au doctorat pour
décrire la représentation de la tristesse de ces participants. Cinq thèmes ont été identifiés : 1) agression, 2) relation brisée par l’autre, 3) affectivité négative indifférenciée, 4) soi défectueux et 5) débordement. Les résultats suggèrent que la représentation de la tristesse du TPL n’est pas associée à la perte, mais plutôt à l’impression d’avoir été endommagé par une attaque infligée par quelqu’un d’autre. Il s’agit d’une expérience peu mentalisée que l’individu semble tenter de réguler dans la sphère interpersonnelle. Cette expérience ne représenterait pas de la tristesse à
proprement parler. Les conclusions ont permis d’élaborer une nouvelle hypothèse de recherche : l’expérience de tristesse des patients souffrant d’un TPL ne correspond pas à la tristesse proprement dite, mais à une forme de détresse interpersonnelle impliquant à la fois des déficits du fonctionnement mental et une organisation particulière de la personnalité. Les implications cliniques et théoriques sont discutées. / The exploration of the phenomenology of sadness in patients with Borderline Personality Disorder (BPD) is relevant to the understanding of the pathology and to its
treatment. BPD patients tend to experience distress intensely and frequently, and inefficient attempts at regulating this emotional experience is known to be associated with symptoms, such as suicidal or parasuicidal gestures (Bland, Williams, Scharer, & Manning, 2004; Brown, Williams, & Collins, 2007; Oldham, 2006; Paris, 2002). The
literature on psychological suffering in BPD reveals an apparent contradiction: these patients experience a large amount of suffering, but they appear to not experience
sadness. The nature of their suffering seems to be distinct from sadness, and has yet to be more fully explored empirically and theoretically. The present thesis aims at
exploring the phenomenology of sadness in BPD. To our knowledge, no research has specifically attempted to investigate this particular topic, but some etiological pathways for understanding BPD suffering have been explored: temperament, mental functioning,
depression, personality organization and traumatic events.
The first study proposes a theoretical and clinical investigation of the concept of sadness and defines it in opposition to distress. This distinction between sadness and
distress focuses on phenomenological and metapsychological perspectives, and is in line with evolutionary theories of emotion and psychoanalytic formulations on mental functioning and object relationships. A case study illustrates this investigation.
The second study aims at exploring the phenomenology of sadness through an investigation of the major themes that BPD participants talk about when they are asked
to recall episodes of sadness. Seven individuals with a diagnosis of BPD on the SCID-II (First, Gibbon, Spitzer, & Williams, 1997) participated in a semi-structured interview.
Following the Interpretative Phenomenological Analysis principles (Smith, 1996), a thematic analysis of 14 transcripts was performed by two doctoral students in order to outline the representation of sadness of BPD participants. Five themes were found: 1) aggression, 2) relationship broken off by the other, 3) undifferentiated negative affect, 4) self being defective, and 5) overwhelming experience. The results suggest that ‘sadness’ in those episodes is not associated with a representation of loss, but with a state of being ‘damaged’ by the aggression and/or the breaking off of the relationship inflicted by the other. This is a non-mentalized experience that the participants tend to regulate in the interpersonal field. This experience should not be conceptualized as sadness proper.
In conclusion, a new hypothesis emerges: the experience of sadness for BPD patients is not really sadness, but a form of interpersonally-focused distress. This emotional experience is characterized by a deficit in mental functioning and by a
particular personality organization. Clinical and theoretical implications are discussed.

Identiferoai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/7088
Date03 1900
CreatorsBriand-Malenfant, Rachel
ContributorsLecours, Serge
Source SetsUniversité de Montréal
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeThèse ou Mémoire numérique / Electronic Thesis or Dissertation

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