Cette thèse se donne pour objet les relations entre psychiatrie, psychanalyse et communisme durant la période 1934-1985, du Front populaire au déclin du PCF dans les années 1980. Elle étudie cette histoire dans sa relation au courant réformateur de l’ordre psychiatrique institué par la loi sur les aliénés du 30 juin 1838 qui émerge dans le champ médical dans les années trente, jusqu’à la normalisation du sous-champ de la psychiatrie publique à la fin des années 80, courant conforté par l’introduction en France de la psychanalyse. A partir de l’analyse des trajectoires biographiques des psychiatres communistes et de la biographie collective du groupe qu’ils constituent en 1945, il s’agit d’articuler l’analyse compréhensive des raisons d’agir avancées par les acteurs et l’objectivation des positions occupées, tant au plan professionnel qu’au plan politique, dans la perspective d’un engagement partisan rapporté à son insertion dans l’histoire sociale du groupe des psychiatres publics. Articulant sociologie des mobilisations et sociologie des professions, l’étude se centre sur les formes d’hybridation sociale pratique et intellectuelle qui se nouent dans l’action entre pratiques militantes et activité professionnelle vécue comme un engagement.Après avoir mis au jour les dispositions des acteurs et les événements qui créent les prémisses d’une identité de psychiatre communiste, seront étudiées l’action conjointe des mécanismes d’homogénéisation et d’encadrement mis en place par le PCF et les appropriations réalisées par les acteurs, en relation avec les différentes configurations de l’entreprise militante et les reconfigurations de l’espace professionnel. On montre en quoi le capital acquis dans l’espace professionnel est mis au service des objectifs de l’entreprise politique, et en quoi le capital militant est une ressource dans les luttes de reconnaissance de la psychiatrie dans le champ médical. Dans le jeu de ces interactions se construit une identité de psychiatre communiste appelée à se rénover suite à la crise internationale du communisme de 1956 et à l’autonomisation de la psychiatrie qui se réalise en 1968.A la différence d’autres espaces médicaux spécialisés, la nature de l’objet de la psychiatrie, la maladie mentale, met en jeu des conceptions indissociablement médicales et philosophiques quant à la nature de l’individu, à son rapport au monde social et aux normes qui définissent le normal et le pathologique. A ce titre les débats qui traversent la psychiatrie ne sont pas indépendants des controverses philosophiques et du développement des sciences sociales. L’étude s’inscrit donc aussi dans une sociologie historique des intellectuels et dans la problématique du rapport des professions intellectuelles avec le politique. Sont aussi interrogées, les relations entre professions intellectuelles et cadres ouvriers devenus des intellectuels d’institution au sein de l’intellectuel collectif communiste, le lien entre discours savant et discours politique, et les tensions entre définition identitaire et clôture du groupe, et vocation messianique impliquant une ouverture aux évolutions du monde social. En modulant l’image d’un affrontement irréconciliable entre marxisme et psychanalyse, la thèse met au jour un lien fort, fait d’alliances et de concurrences entre le marxisme et la psychanalyse, contre les conceptions biologiques du psychisme. / This thesis focuses on the relationship between psychiatry, psychoanalysis and communism during the period 1934-1985, from the Popular Front period to the years of decline of the French Communist Party (FCP) in the 1980s. It investigates this history regarding its relation with the reformist trend in the psychiatric environment organized under the law on the insane dated June 30, 1838 which emerges out of the medical field in the thirties until the normalization of the public psychiatry subfield at the end of the eighties, reinforced by the introduction in France of the psychoanalysis.Based on the analysis of the biographical career of the communist psychiatrists and the collective biography of the group they constitute in 1945, the purpose is to articulate the comprehensive analysis of the cases for action put forward by the actors with the objectification of their held positions, in their career as well as politically, in the context of a political commitment considered in relation with the shared history of the public psychoanalysts group. Articulating the sociology of political mobilizations and the sociology of careers, the investigation focuses on the various kinds of social, practical and intellectual hybridization that are formed in the action between militant practices and professional activity experienced as a political commitmentAfter having brought to light the players’ capacities and the events that create the premises of a communist psychiatrist identity, we will investigate, the joint action of the mechanisms of homogenization and supervision put in place by the FCP and the appropriations realized by the considered psychiatrists, in relation with the different configurations of the activist undertaking and the reconfigurations of the professional field.We show how the know how gained in the professional field is brought at the service of the political undertaking targets and how the acquired militant know how is used as a resource in the struggles for recognition of psychiatry in the medical field. In the course of these interactions, an identity of communist psychiatry is built up and required to be updated after both the international crisis of communism in 1956 and the fact that psychiatry becomes a self- sustaining part of psychiatry in the years near to1968. As opposed to other specialized medical fields, the nature of the object of psychiatry, mental illness, involves profound logical interrelationships, medical and philosophical conceptions as to the nature of the individual, his relation to the society and the norms which segregate the normal from the pathological. In this respect, the debates that go through psychiatry are not independent of the philosophical controversies and the development of the social sciences. This essay is thus part of a historiological sociology of intellectuals including the issue of the relations between the intellectual professions and politics. Are also discussed,the relationsips between intellectual professions and workers' leaders reaching the position of political institution’s intellectuals within the communist collective intellectual, the link between scholarly and political discourses, and the tensions between assertion of identity and the lock of the group and messianic vocation implying to be opened to the social world evolutions. Modulating the image of an irreconcilable confrontation between Marxism and psychoanalysis, the thesis reveals a strong link, made of alliances and competitions between Marxism and psychoanalysis against the biological conceptions of the psyche.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017PA100191 |
Date | 16 June 2017 |
Creators | Papiau, Danielle |
Contributors | Paris 10, Pudal, Bernard |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
Page generated in 0.0027 seconds