Cette thèse porte sur les pratiques de jugement en sciences humaines et sociales à l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, créée en 2007. Au moyen d’entretiens, d’observations et d’un travail sur archives, cette enquête approche l’élaboration et les usages des instruments d’évaluation au plus près des acteurs qui les conçoivent et les mettent en œuvre. Au croisement de la sociologie de l’action publique, de la sociologie des sciences, et de la sociologie des professions, cette thèse montre que la définition des « bonnes pratiques » scientifiques se façonne au gré d’alliances et de conflits intra-professionnels, plutôt qu’elle ne serait le produit de réformes imposées par le haut à la profession. Étudier une activité routinière au sein de la communauté académique -l’évaluation scientifique- dans les moments critiques où ses règles se reconfigurent, permet d’appréhender les réformes contemporaines qui affectent le monde académique. Si ces réformes peuvent affaiblir le pouvoir professionnel, dans notre cas, les scientifiques restent centraux dans le dispositif d’évaluation. L’AERES apparaît alors comme un microcosme où se jouent des conflits qui traversent la communauté académique elle-même. En effet, l’élaboration des instruments encadrant le jugement est innervée par des savoirs scientifiques en concurrence, et ces instruments peuvent être abandonnés face aux controverses qu’ils suscitent dans la profession. C’est alors la position de l’AERES vis-vis des autres instances scientifiques qu’il convient d’interroger, pour comprendre à quelles conditions ces instruments s’institutionnalisent et redéfinissent les pratiques de recherche légitimes. / This dissertation studies research assessment in the Humanities and Social Sciences, in a French evaluation agency (AERES) created in 2007. Based on interviews, ethnographic observations and archives, it approaches the elaboration and the uses of evaluative instruments close to the actors who conceive and implement them. At the crossroad of public policy analysis, sociology of science and sociology of professions, I show that the definition of scientific “good practices” is manufactured through intra-professional alliances and conflicts, rather than it would reflect top down reforms imposed to the profession. Studying a routine activity in the academic world – the scientific assessment – in the critical moments when its rules are reshaped, allows apprehending the contemporary reforms that affect the scientific sector. If those reforms might erode the professional power, in the case I study, the scientists remain at the heart of the evaluative system. The AERES appears then as a microcosm where conflicts within the academic profession can be seized. The construction of the evaluative instruments is nourished by competing scientific knowledge, and those instruments might be abandoned when they become controversial in the profession. Hence, the position of the AERES with respect to the other academic institution has to be questioned, in order to understand under what conditions those instruments redefine the legitimate research and assessment practices.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2016IEPP0020 |
Date | 14 November 2016 |
Creators | Gozlan, Clémentine |
Contributors | Paris, Institut d'études politiques, Musselin, Christine |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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