La bioéthique est une discipline à caractère scientifique visant à produire systématiquement des normes de l’intervention sur le vivant. Lorsqu’elle agit comme une approche à la résolution des problèmes éthiques liés à une prise de décision technique et singulière, elle se pense une éthique visant la bonne opération à faire dans un contexte de soin, de la santé ou de la recherche. En dépit de son caractère reconnu et exprimé comme composite, la bioéthique tend à s’institutionnaliser comme « discipline » dite interdisciplinaire, suivant une organisation pédagogique et scientifique qui lui semble propre. Ce mémoire vise à comprendre les manières par lesquelles la bioéthique s’institutionnalise à l’université en formant une classe d’experts dits « bioéthiciens ». Or, devenir bioéthicien – alors que le titre n’est ni clairement défini ni consacré par des expériences académiques et professionnelles codifiées et validées – pose à la sociologie la question même de son existence. Nous étudions donc le travail symbolique de définition du groupe et de la discipline accompagnant sa formation. L’analyse d’entretiens auprès de quinze professeurs, chercheurs ou éthiciens ayant ou ayant eu des activités en bioéthique révèle que la diversité des situations ne correspond pas nécessairement à des scissions : les bioéthiciens partagent à différents degrés des conceptions métaphysiques, des valeurs et des expériences, correspondant à des modes d’entrée – et parfois, de sortie – au sein de la discipline. Nous retraçons pour s’en donner une vue d’ensemble la genèse du groupe, son histoire et celle de son institutionnalisation qui s’accompagne, sans doute paradoxalement, d’une certaine résistance au modèle disciplinaire jugé hiérarchique, fermé et faillible. Afin d’évoluer à l’université tout en demeurant « pertinente » pour la résolution de problèmes singuliers, nous verrons que la bioéthique et ses participants tentent d’innover par la discussion rationnelle et interdisciplinaire entre experts et, par là, modifient le champ scientifique à leur image. / Bioethics is a discipline of a scientific nature aiming to produce systematically norms aimed to intervene on the living. When bioethics acts as an approach dedicated to solving ethical problems requiring a technical and singular decision, it thinks itself as an ethics engaged in the finding of the “good” intervention to be made in a context of care, health or research. Despite its acknowledged heterogeneous nature, bioethics tends to its institutionalization as an “interdisciplinary” discipline, following a pedagogical and scientific organization of its own. This thesis aims to understand how bioethics’ institutionalization is “objectively” and “subjectively” experienced, in other terms, for the institution itself and for the bioethicists. Now, becoming a “bioethicist” – as the title is not clearly defined, nor sanctioned by codified and validated academic and professional experiences – asks sociology the question of its existence. We, therefore, study the symbolic work of the group and the discipline’s social definition, going together with its formation. The analysis of comprehensive interviews conducted with fifteen professors, researchers or ethicists having or having had activities in the field of bioethics reveals that the diversity of situations does not necessarily tally with scissions or divisions within the field: bioethicists share, on different levels, values and experiences corresponding to different ways of initiating – and possibly leaving – the discipline. We then glance through the early process of the group’s unification, the history and the institutionalization of the discipline, going with – what might appear as paradoxical – a critique of the “disciplinary”, denounced as hierarchical, exclusive, and perhaps outmoded. In order to thrive in the academic world whilst staying “pertinent” to problem solving, bioethics and bioethicists try to innovate through rational and interdisciplinary discussion between experts, which, intrinsically, modifies the scientific field in the image of their practices and representations.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/34011 |
Date | 14 March 2019 |
Creators | Dussault, Catherine |
Contributors | Morin, Dominique |
Source Sets | Université Laval |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | mémoire de maîtrise, COAR1_1::Texte::Thèse::Mémoire de maîtrise |
Format | 1 ressource en ligne (x, 228 pages), application/pdf |
Coverage | Québec (Province) |
Rights | http://purl.org/coar/access_right/c_abf2 |
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