Les processus affectant le coin mantellique situé au-dessus d’une zone de subduction (déformation et interaction avec les fluides/liquides magmatiques libérés par la plaque inférieure) ont des implications importantes sur la dynamique de la subduction et le budget géochimique global de la Terre.Afin de mieux contraindre ces processus, ma thèse a porté sur l’étude de l’unité rubanée de l’ophiolite du Semail. Cette unité de 200-500m d’épaisseur s’est (dé)formée, juste au-dessus de l’interface interplaque, pendant l’initiation de la subduction ou du chevauchement intra-océanique (qui a mené, à terme, à l’obduction de l’ophiolite). Elle est en effet située au-dessus de la semelle métamorphique HT (amphibolites à granulites ; 750-850°C et 0.9-1.1GPa) interprétée comme des écailles de la plaque inférieure métamorphisées et sous-plaquées à la plaque supérieure (actuelle ophiolite) lors des premiers stades de la convergence.Après une caractérisation structurale de terrain de cette unité rubanée et la collecte de plus de200 échantillons tout le long de l’ophiolite, j’ai mené une analyse intégrée (Microscopie optique, MEB, microsonde, EBSD, (LA-)ICPMS) sur une sélection d’entre-eux, afin de caractériser l’évolution P-T, pétrologique, géochimique et structurale des péridotites de l’unité rubanée pendant cet épisode de déformation.Les résultats montrent que cette déformation a mené à la formation de zones de cisaillement (proto)mylonitiques (~850-750°C) puis ultramylonitiques (~750-650°C) et que cette déformation BT s’est faite en décompression (d’~3kbar, i.e. 10km). Les résultats pétrologiques indiquent que des fluides silicatés hydratés ont percolé à travers (et intéragi avec) ces péridotites pendant cette déformation. Ces processus d’interaction ont mené à (1) la précipitation de minéraux métasomatiques (Ol+Opx+Cpx+Spl+Amp±Sulf), et (2) l’enrichissement des phases en éléments mobiles dans les fluides (surtout B, Li et Cs :concentrations de 1 à 40 fois celles du manteau primitif).L’analyse des isotopes du bore (δ11B des péridotites métasomatisées jusqu’à +25‰) démontre que ces fluides ont une signature de subduction et qu’ils sont vraisemblablement issus de la déshydratation de la semelle HT lors de sa formation à 750-850°C.En combinant ces résultats avec une analyse microstructurale, j’ai ensuite étudié les mécanismes et les rétroactions entre la circulation de ces fluides, la déformation des péridotites et la localisation de cette déformation. A l’échelle macroscopique, on observe une focalisation des fluides dans les zones de cisaillement actives, associée à une localisation progressive de la déformation.Nous avons aussi exploré les conséquences rhéologiques de l’hydratation de ce manteau sur le régime, couplé ou découplé, de l’interface. Les lois rhéologiques indiquent que l’affaiblissement des (proto)mylonites de l’unité rubanée, par hydratation, peut expliquer le couplage de l’interface de subduction à 850-750°C et, ainsi, l’accrétion de la semelle HT. Nous interprétons les zones de cisaillement ultramylonitiques ultérieures (~750-650°C) comme étant liées au stade d’exhumation simultanée de l’unité rubanée et de la semelle HT d’environ 10km au-dessus de l’interface, jusqu’à leur position actuelle sous l’ophiolite.Les résultats de cette étude suggèrent donc que l’interface semelle HT/unité rubanée représente une interface de subduction fossilisée et le manteau (proto)mylonitique sus-jacent, un coin mantellique qui s’est (dé)formé et a intéragi avec des fluides de subduction pendant l’initiation de la subduction. L’unité rubanée de l’ophiolite du Semail représente donc un des rares objets géologiques permettant d’étudier les processus à l’oeuvre dans un coin mantellique, et d’en traquer, avant sa fossilisation, les transformations mécaniques et chimiques sur ~1 million d’années. / The processes affecting the mantle wedge atop a subduction zone (deformation and interaction with fluids/melts released by the downgoing plate) play a major role on subduction zones dynamics and the global geochemical budget of the Earth.To better constrain these processes, my Ph.D. research project has focused on studying the basal banded unit of the Semail ophiolite. This 200-500m thick peridotitic basal unit was (de)formed, directly above the interplate interface, during the intra-oceanic subduction (or underthrusting) initiation (that ultimately led to the ophiolite obduction). The banded unit indeed overlies the HT metamorphic sole (amphibolites to granulites ; 750-850°C and 0.9-1.1GPa) interpreted as slices of the downgoing plate underplated to the upper plate (the ophiolite) during early subduction (or subduction "infancy").After a field-based structural characterization of this banded unit and more than 200 samples collected all along the strike of the ophiolite, I carried out an integrated analysis (Optical microscopy, SEM, microprobe, EBSD, (LA-)ICPMS) on selected samples, in order to constrain the P-T, petrological, geochemical and structural evolution of the banded unit peridotites during this deformation event.Our results show that this deformation led to the formation of (proto)mylonitic (at ~850-750°C) then ultramylonitic (at ~750-650°C) shear zones and that this deformation was associated with peridotites decompression (of ~3kbar, i.e. 10km). Petrological results suggest that hydrated silicate fluids have percolated through (and interacted with) these peridotites during their deformation. These interaction processes triggered (1) the precipitation of metasomatic minerals (Ol+Opx+Cpx+Spl+Amp±Sulf), and (2) the enrichment of phases in fluid mobile elements (parti- cularly B, Li and Cs;concentrations from 1 to 40 times higher than those of the primitive mantle).The analysis of boron isotopes (δ11B of metasomatized peridotites up to +25‰) demonstrated that these fluids had a "subduction signature" and that they presumably derived from HT sole dehydration while forming at 850-750°C.By combining these results with microstructural analyses, I then studied the mechanisms and feedbacks between the circulation of these fluids, peridotites ductile deformation and strain localization. At the macroscopic scale, we observe a focusing of fluids in actively deforming peridotites associated to progressive strain localization during peridotites cooling.We also investigated the rheological consequences of banded unit peridotites hydration on the regime (coupled or decoupled) of the interface. Rheological laws indicate that the hydration-related weakening of banded unit (proto)mylonites is able to explain the coupling of the subduction inter- face at 850-750°C and, thereby, HT sole slicing and accretion. We interpret the later development of the ultramylonitic shear zones (at ~750-650°C) as being associated to the subsequent exhumation stage, i.e. the coeval exhumation of the banded unit and the HT metamorphic sole over around10km along the interface, up to their present-day position under the ophiolite.The results of this work suggest that the HT sole/banded unit contact represents a fossilized subduction interface and the overlying (proto)mylonitic mantle, a frozen-in mantle wedge that was (de)formed and interacted with subduction fluids during subduction infancy. The Semail ophiolite banded unit therefore provides a rare glimpse of processes affecting a mantle wedge, and enables tracking its mechanical and geochemical transformations over 1My (prior to its fossilization).The processes highlighted in this Ph.D. research project thus bring new constraints on the (petrological-geochemical-rheological) consequences of mantle wedge peridotites interaction with subduction fluids.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017GREAU005 |
Date | 23 January 2017 |
Creators | Prigent, Cécile |
Contributors | Grenoble Alpes, Guillot, Stéphane, Agard, Philippe |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French, English |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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