De la fin du IXe au milieu du XIe siècle, la Lotharingie, ancien cœur de l’empire carolingien, devint une marge du royaume de Francie occidentale, d’abord, puis de Francie orientale, ensuite, sans que ne se développe pour autant une identité lotharingienne. Cette recherche, qui porte sur la Lotharingie méridionale, s’intéresse tout d’abord aux structures de parenté aristocratiques, qui demeurent résolument horizontales et cognatiques. L’interrogation principale porte ensuite sur l’évolution du rapport des aristocrates à leurs espaces de domination. Ce travail montre que l’exercice de la potestas des comtes se fit, jusqu’à la réforme grégorienne, selon des logiques davantage sociales que spatiales : pagus et comitatus ne furent pas des circonscriptions territorialisées. Le territoire ne constituait pas le pouvoir comtal : il en découlait. À l’inverse, les seigneurs furent les premiers à s’ancrer spatialement en fondant des centres castraux dont ils adoptèrent le nom comme cognomen toponymique. Pour ce faire, cette thèse étudie dans le détail les fonctions, la morphologie et la chronologie de l’apparition des différents centres, aussi bien ecclésiastiques que laïques, en s’interrogeant également sur l’existence de « modèles spatiaux ». Une double approche textuelle et archéologique permet de déconstruire l’image d’aristocrates prédateurs et de montrer que si les abbayes et les sièges épiscopaux furent, pour les laïcs, l’objet d’enjeux nombreux, ceux-ci n’étaient pas d’ordre territorial. Elle amène également à reconsidérer l’aimantation castrale, en se détachant notamment d’une compréhension légaliste de ce phénomène et en analysant la coexistence de fortifications d’architectures très différentes. La multipolarisation de l’aristocratie lotharingienne ne peut se comprendre qu’en considérant pleinement les différents acteurs politiques – notamment les évêques –, afin de saisir les rapports de force changeants et la « coopétition » permanente entre ces différentes parties qui expliquent le rythme de cet ancrage spatial à tâtons. Celui-ci est à la fois différent de ce que l’on rencontre en Francie occidentale et en Francie orientale, confirmant le statut singulier de cet espace de l’entre-deux. / From the end of the ninth to the middle of the eleventh century, the Southern part of Lotharingia – the former heart of the Carolingian empire – first became a periphery of the West Frankish kingdom, and then a march of Eastern Francia. However, that does not mean that a Lotharingian identity emerged. To start with, our research indicates that aristocratic kinship patterns remained definitely horizontal and cognatic. The main research problem focuses on the aristocrats’ relations to their spaces of power, and their evolutions. This work shows that, until the Gregorian reform, counts performed their potestas according to a logic which was more social than spatial: pagus and comitatus were not territorialized divisions. Territory was not the core of the counts’ power: it was a consequence of it. Even so, lords were the first to found fortified places thus establishing manifestations of spatial power by assuming the castles’ names as a toponymic cognomen. This dissertation examines the functions, morphologies and chronologies of the emergence of such centers, either ecclesiastical or secular. It also raises questions about the existence of « spatial models ». Evidence from texts and archaeology allows us to deconstruct the image of predatory aristocrats. It also proves that although nobles competed for abbeys and episcopal sees, this rivalry was not territorial; our findings have also brought us to reconsider the growing function of castles by moving away from a legalistic approach to the process of polarization and rather analyzing the coexistence of the quite different fortification styles. One can understand the multipolarization of Lotharingian aristocracy only by fully taking into account the different political protagonists – especially bishops – in order to better grasp the changing power balances and constant « coopetition » between different parties. Those dynamics can explain the uncertain pace of the manifestation of spatial power, the modalities of which were different from both West and East Francia and thus confirm the unique status of this in-between space.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017PESC0072 |
Date | 25 November 2017 |
Creators | Martine, Tristan |
Contributors | Paris Est, Bührer-Thierry, Geneviève |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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