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De Zadig a Candide: l'optimisme et le probleme du mal dans les contes philosophiques de Voltaire

Les contes philosophiques que Voltaire a écrits entre 1747 et 1759 témoignent d'une crise dans la pensée de l'auteur à l'égard de l'optimisme et du problème du mal. Nous avons examiné cet aspect des contes pour déterminer le développement de sa pensée à l'égard de ces deux points.
Nous avons traité les contes par ordre de dates. Micromégas, cependant, précède dans notre étude les autres contes parce que sa composition peut remonter à 1739 et que le genre d'optimisme qui s'y trouve ne provient pas spécialement de Leibnitz ni de Pope mais fait partie de la philosophie foncière de Voltaire.
II faut chercher dans la vie de Voltaire les origines de la crise qui le fait s'opposer à l'optimisme et lui fait examiner à nouveau le problème du mal. De 1730 à 1740 surtout, Voltaire était heureux. II favorisait alors la doctrine optimiste parce qu'elle approuvait l'homme tel que Voltaire le voyait et parce qu'elle envisageait le mal comme nécessaire au bien. On pouvait être légitimement content de soi et du monde. Bien entendu, à cette époque, l'optimisme voltairien fut aussi une des armes les plus fortes pour la défense du déisme; en ce qui regarde les contes, cependant, cet optimisme trahit plus souvent que sa doctrine l'humeur de Voltaire. Vers 1747, quand ses infortunes devinrent plus nombreuses, Voltaire commença à perdre son humeur optimiste. En même temps, l'optimisme philosophique cessa de le protéger contre le mal. II s'attaqua donc à cette doctrine parce qu'elle lui offrait peu de secours pour affronter ses souffranees et aussi, peut-être, parce qu'il était fâché d'avoir embrassé assez naivement ce système à une période plus heureuse de sa vie.
Le problème du mal dans les contes est ainsi une question qui intéresse l'être intime de Voltaire plutôt que sa raison. Voltaire est sans confiance et il veut être rassuré. Pour cette raison, nulle explication philosophique ne le satisfait. On a beau raisonner: le mal existe toujours. Déjâ dans Zadig, il met en question l'optimisme comme explication du mal et aussi la théodicée chrétienne selon laquelle le mal serait un arrêt de la Providence. Plus tard dans Candide, il refusera aussi le manichéisme et le pessimisme, car ces systèmes impliquent le désespoir que Voltaire, grand amoureux de la vie, ne peut admettre. Ayant rejeté toute théodicée, comme Candide il se retire dans le scepticisme.
Mais le scepticisme, pas plus que la philosophie optimiste, ne détruit le mal. Dans Candide, Voltaire, quoique désabusé, semble avoir maîtrisé son decouragement et avoir retrouvé sa confiance. Cependant, il lui faut encore réaliser le bonheur. A la fin de Candide, les voyageurs harassés apprennent qu'il ne suffit pas d'échapper à la souffranee pour être heureux. Quand on n'a rien à faire d'autre que de raisonner sur son sort, on s'ennuie. II faut en conclure que le seul moyen de rendre la vie supportable est de travailler sans raisonner, ou, autrement dit, de s'oublier. C'est ainsi, semble-t-il, que Voltaire lui-même a trouvé le bonheur.
L'aspect personnel du problème du mal disparaît quand Voltaire retrouve sa confiance, mais, ayant atteint le bonheur, il n'oublie pas que d'autres continuent à souffrir. Le problème du mal réclame toujours une solution. Alors que dans Zadig et dans Cosi-Sancta, Voltaire s'occupe du mal métaphysique, dans Memnon et dans Candide, il s'intéresse uniquement au mal qui dérive des hommes. On peut combattre ce mal moral. Le sceptique dans Candide ne veut plus raisonner sur les maux: il veut les détruire. Bien que Voltaire ne propose pas encore de s'opposer aux abus, il s'y prépare. Bientôt, il étendra à la société des hommes l'idéal que symbolise le jardin de Candide. C'est la réforme sociale qui sera enfin la solution au problème du mal. II est clair, donc, que la crise qui se développe autour des questions de l'optimisme et du mal aide à former le Voltaire réformateur. / Arts, Faculty of / Central Eastern Northern European Studies, Department of / Graduate

Identiferoai:union.ndltd.org:UBC/oai:circle.library.ubc.ca:2429/39672
Date January 1960
CreatorsJohnston, Marguerite Anne
PublisherUniversity of British Columbia
Source SetsUniversity of British Columbia
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeText, Thesis/Dissertation
RightsFor non-commercial purposes only, such as research, private study and education. Additional conditions apply, see Terms of Use https://open.library.ubc.ca/terms_of_use.

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