Fondés en 1848 à Mayence par un ecclésiastique, Mgr Adam Franz Lennig, afin de défendre les libertés religieuses, les Katholikentage – littéralement « Congrès des Catholiques » ou « Journées des Catholiques » – rassemblaient à l'origine les représentants des principales associations catholiques et des personnalités en vue. Au cours des quelque vingt années suivantes, ils jouèrent un rôle majeur dans la mobilisation politique des laïcs. Le Kulturkampf prussien (1872-1878) resserra les liens entre le Zentrum, créé en 1870, et les Katholikentage qui firent progressivement office de congrès annuel du parti. Vers 1900, ils devinrent des assemblées de masse groupant plusieurs dizaines de milliers de participants dans le but de démontrer la solidarité des populations à la fois avec la hiérarchie ecclésiastique et avec les dirigeants du Zentrum. Après une interruption de huit ans, Francfort-sur-le-Main accueillit en 1921 le premier Katholikentag national d'après-guerre et inaugura la reprise des Congrès, organisés ensuite annuellement jusqu'en 1933, à l'exception du Katholikentag prévu en 1923 à Cologne et interdit par les forces d'occupation. Sous la République de Weimar, les Congrès furent les plus grandes assemblées de masse ayant lieu régulièrement : 250.000 personnes assistèrent à la messe dominicale de celui d'Essen, en 1932. Leur influence dépassa largement le nombre de participants, grâce au soutien du clergé au niveau local et national, ainsi qu'à celui du réseau d'associations catholiques et à la presse. <br /><br />Alors que le Zentrum a fait l'objet de nombreuses monographies, les Katholikentage ont été jusqu'à présent négligés par les historiens. Les quelques articles consacrés à la question ne retiennent souvent que la période antérieure à 1914 ou celle postérieure à la Seconde Guerre mondiale. Ils mettent en avant le caractère démocratique des Congrès considérés comme les précurseurs de la Démocratie chrétienne incarnée par Konrad Adenauer après 1945. L'un des objectifs de cette thèse est de montrer les ambiguïtés liées à la dépolitisation officielle des Katholikentage sous la République de Weimar, période qui a été jusque-là soigneusement ignorée. Elle cherche à vérifier entre autre l'interprétation selon laquelle la séduction exercée par les régimes autoritaires sur les élites et les populations notamment européennes pendant la période de l'entre-deux-guerres n'aurait pas influencé les catholiques allemands avant le 30 janvier 1933. <br /><br />Les comptes rendus publiés des Katholikentage sont des sources officielles qui ont constitué la première étape de mon travail. Celui-ci a ensuite été complété par les archives privées des principaux dirigeants des Congrès et des associations catholiques. Comme le Comité central ne possède aucun fonds pour la période antérieure à 1952, j'ai dû rassembler des sources réparties dans les archives ecclésiastiques et civiles de chacune des villes où un Congrès a été organisé entre 1921 et 1933. Au total, 42 fonds d'archives différents ont été consultés.<br /><br />La thèse est divisée en trois parties. La première a pour objet d'analyser la reprise des Congrès au lendemain de la Première Guerre mondiale, leur organisation, leur financement et la nature de leur cérémonial. La seconde partie étudie le contenu et l'esprit des discours tenus aux Katholikentage de Francfort-sur-le-Main en 1921, de Munich en 1922 et de Hanovre en 1924. La troisième partie est consacrée aux messages délivrés par les conférenciers à partir du Katholikentag de Stuttgart en 1925 jusqu'au Katholikentag d'Essen en 1932. <br /><br />Pendant les années vingt, aux Katholikentage, l'épiscopat et le prince Alois zu Löwenstein, à la tête du Comité central chargé de l'organisation des Congrès, contribuèrent contre leur gré à la consolidation du système républicain car ils cherchèrent avant tout à préserver et à étendre les acquis obtenus par la minorité catholique grâce à la Constitution de Weimar. Certes, les propos tenus par de nombreux conférenciers contre la politique économique, sociale et culturelle du gouvernement étaient des critiques à peine voilées du Zentrum. De plus, la symbolique utilisée accordait une place centrale à la transcendance en politique. Elle proposait un système global d'interprétation du monde tendant vers l'absolu, en rupture avec le pluralisme républicain : l'unité était à réaliser en Christ et non sur le terrain du consensus. Cependant, cette opposition ne s'incarna pas dans la pratique car les Congrès s'efforcèrent de préserver l'image de l'unité comme ils l'avaient fait avant la Première Guerre mondiale. <br />Pour préserver cette unité, la plupart des intervenants aux Katholikentage adoptèrent une attitude de repli, arc-boutés sur la défense des valeurs chrétiennes. En un sens, cette attitude les protégea au début des années trente de la séduction exercée sur beaucoup par les nationaux-socialistes. Toutefois, elle les empêcha de s'allier durablement à d'autres forces politiques, en particulier aux socialistes, pour lutter efficacement contre les nationaux-socialistes.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:halshs-00007954 |
Date | 07 March 2005 |
Creators | Reytier, Marie-Emmanuelle |
Publisher | Université Jean Moulin - Lyon III |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | PhD thesis |
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