La contamination des ressources en eau potable et des terres agricoles par les pesticides qui entrent dans la chaine alimentaire est un problème environnemental et sanitaire majeur. Des études épidémiologiques ont montré un lien entre l’exposition aux pesticides et la maladie de Parkinson, mais peu d’études sont disponibles sur les autres pathologies neurodégénératives. Notre hypothèse est que les pesticides pourraient être des facteurs déclencheurs ou aggravants, communs aux maladies neurodégénératives.Au laboratoire, nous avons identifié par criblage sur la protéine prion, PrP, un composé nommé A6 décrit pour ses propriétés herbicides. A6 est un dérivé de l’α-terthiényl, molécule naturelle extraite des œillets d’inde. Le composé A6 a la capacité de promouvoir des formes oligomériques de la protéine prion sur une lignée cellulaire infectée par des prions. Mon projet de recherche visait à étudier les effets du bio-herbicide A6 sur l’agrégation et la propagation des prions in vivo. Des souris infectées par les prions ont été traitées avec différentes doses de cette molécule (5, 10 et 20 mg/kg). A la dose de 5 mg/kg, le composé A6 diminue le temps de survie des animaux avec une augmentation de la charge amyloïde. Tandis qu’aux plus fortes doses le traitement par A6 augmente la survie des souris avec une diminution de la charge amyloïde. Par un test de centrifugation rapide (RCA), nous avons montré que les faibles concentrations d’A6 favorisent la formation d’oligomères solubles de PrPSc SDS résistants (rSDS-PrPSc), alors que les plus fortes concentrations induisent des formes insolubles. L’analyse des cerveaux montre que seules les souris traitées avec 10 et 20 mg/kg d’A6 présentent des formes dimériques de rSDS-PrPSc. Cette étude montre une dualité d’effet du composé A6 : à de faibles doses, il favorise la pathologie probablement via des formes oligomériques solubles favorisant la réplication des prions. A de plus fortes doses, le composé A6 piègerait une partie de l’infectiosité des prions sous forme d’agrégats amorphes SDS résistants, bloquant la réplication des prions, et ayant un effet « protecteur ».Une recherche d’analogues structurels au composé A6 a permis l’identification d’une classe d’antifongiques commercialisés : les anilinopyrimidines. Cette famille est composée de 3 molécules : cyprodinil, mépanipyrim et pyriméthanil, qui luttent contre des champignons responsables de la pourriture grise des fruits. L’analyse de nombreux rapports a révélé que nous sommes chroniquement exposés à des résidus d’anilinopyrimidines. Dans cette deuxième étude, nous avons étudié l’effet de ces 3 fongicides dans plusieurs modèles de la maladie d’Alzheimer (MA) et les conséquences sur les marqueurs de la pathologie. Des études d’incubation ex vivo associées à des expériences de cinétique d’agrégation de peptides Aβ1-42 ont montré que ces composés interagissent directement avec les peptides et accélèrent sa cinétique d’agrégation. Afin de déterminer leurs effets in vivo, nous avons exposé chroniquement des souris J20 à un cocktail des 3 fongicides via l’eau de boisson. Les souris ont été traitées à 0,1 μg/L (0,44 nM) de chaque composé, correspondant à la concentration maximale autorisée dans l’eau potable. Après 9 mois de traitement, l’analyse des souris J20 a montré une augmentation du nombre et de la surface des plaques amyloïdes au niveau de l’hippocampe et du cortex. Pour déterminer à quel moment se produit l’effet proagrégant du cocktail, une étude longitudinale d’apparition des agrégats à 3, 6 et 9 mois par microscopie biphotonique, a montré que les plaques amyloïdes augmentent entre 6 et 9 mois et que les pesticides exacerbent les agrégats vasculaires. Les anilinopyrimidines modifient la production et la clairance des peptides Aβ en augmentant l’expression de BACE1 et en diminuant l’expression de la néprilysine. Nos travaux montrent que les antifongiques aggravent la MA. / Contamination of the drinking water and agricultural lands by the use of pesticides entering into the food chain is a major environmental and health problem. Epidemiological studies have shown a link between pesticide exposure and Parkinson's disease, but few studies are available on other neurodegenerative disorders. Our hypothesis is that pesticides may be triggering or aggravating factors common to neurodegenerative diseases.In the laboratory, we identified by a screening on the prion protein, PrP, a compound named A6 described for its herbicidal properties. A6 is a derivative of α-terthienyl, a natural molecule extracted from marigolds. A6 compound has the ability to promote oligomeric forms of the prion protein on a prion-infected cell line. My research project aimed to study the effects of the bioherbicide A6 on prion aggregation and propagation in vivo. Mice infected with prions were treated with different doses of this molecule (5, 10 and 20 mg/kg). At the dose of 5 mg/kg, A6 compound decreases the survival time of animals with an increase of the amyloid load. While at the higher doses, A6 treatment increases survival of mice with a decreased amyloid burden. Using a rapid centrifugation assay (RCA), we have shown that low concentrations of A6 promote soluble SDS-resistant oligomers of PrPSc (rSDS-PrPSc), while higher concentrations favour insoluble forms. Brain analysis shows that only mice treated with 10 and 20 mg/kg of A6 exhibit dimeric forms of rSDS-PrPSc. This study shows a dual effect of A6 compound: at low doses, it strenghtens the pathology probably via soluble oligomeric forms favouring the replication of prions. At higher doses, A6 compound would trap part of the infectivity of prions as SDS resistant amorphous aggregates, blocking prion replication, and thus having a “protective” effectA search for structural analogs of A6 compound allowed the identification of a class of commercial antifungals: anilinopyrimidines. This family is composed of 3 molecules: cyprodinil, mepanipyrim and pyrimethanil, used to fight against fungi responsible for the gray mold of fruits. Analysis of many reports have revealed that we are chronically exposed to residues of anilinopyrimidines. In this second study, we evaluated the impact of the 3 fungicides in several models of Alzheimer’s disease (AD) and their consequences on pathological markers. Ex vivo incubation studies associated to kinetics of fibril formation of Aβ1-42 peptides have shown that these compounds interact directly with Aβ peptides and accelerate its kinetics of aggregation. To determine their effects in vivo, we chronically exposed J20 mice to a cocktail of the 3 fungicides through drinking water. Mice were treated with 0.1 μg/L (0.44 nM) of each compound, corresponding to the maximal concentration allowed in the tap water. After 9 months of treatment, analysis of J20 mice showed an increase in the number and surface of plaques in the hippocampus and cortex. To determine the moment when the pro-aggregative effect occurs, a longitudinal study of appearance of aggregates at 3, 6 and 9 months by 2-photon microscopy was done. Our results showed that amyloid plaques increase between 6 and 9 months, and exacerbate vascular amyloid aggregates. Anilinopyrimidines modified the production and clearance of Aβ peptides by increasing BACE1 expression and by decreasing neprilysin expression. Our researches show a role of fungicides in the aggravation of AD.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2019MONTT005 |
Date | 02 April 2019 |
Creators | Lafon, Pierre-André |
Contributors | Montpellier, Perrier, Véronique |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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