Dans le malaise contemporain, où l’affichage d’une belle image de soi occupe une place prépondérante, la beauté est devenue plus qu’un droit, elle est un devoir. Si l’esthétisation et la technologisation du corps sont des productions sociales du discours hygiéniste, il semble que la laideur se signifierait comme une exclusion de ce qui n’est pas intégrable dans les canons esthétiques. Comment naît le jugement esthétique chez l’être humain ? Nous constatons que les représentations esthétiques, dans la dynamique inconsciente, présentent toujours une connotation phallique. En outre, la psychanalyse nous montre que si nous discriminons le laid, c’est parce que sa vue éveille en nous des angoisses de castration, de dégénérescence et de mort, en faisant travailler notre image corporelle. Nous nous demanderons donc si la médicalisation, le besoin de s’entretenir et de s’embellir font partie des solutions proposées par le social pour maîtriser son corps, le sentiment d’inquiétante étrangeté et la dysmorphophobie.En effet, de plus en plus de patients viennent consulter parce qu’ils se sentent laids et pas à la hauteur d’un tel idéal. Qu’est-ce qui fait qu’un sujet ne s’estime pas beau ? Y a-t-il des sujets qui sont plus susceptibles de se sentir laids que d’autres ? Le sentiment de laideur apparaît quand on ne se sent plus à la hauteur d’un idéal esthétique ; il dévoile au sujet son manque-à-être et à-avoir. La clinique contemporaine nous montre aussi que le rejet social de la laideur se présente comme un cercle vicieux, puisqu’en étant discriminé par le regard de l’autre, le sujet a tendance à fuir ce regard qui le met mal à l’aise. La représentation laide de soi naît alors comme production subjective d’un regard de l’autre projeté et d’un regard de l’Autre introjecté. En conséquence, le tissage psycho-somato-social que les figures cliniques de la laideur désignent, nous permet de soulever d’importants enjeux thérapeutiques et sociaux. Si le sentiment de sa propre laideur peut être le seul moyen que le sujet a trouvé pour parler de ce qu’il ne peut pas dire, alors éradiquer ce symptôme, comme le proposent les prises en charge dans certains champs thérapeutiques, ne présente-t-il pas le risque de faire péricliter unmécanisme de défense et de causer un effondrement psychique ? Se sentir laid peut alors constituer un moment passager dans l’appropriation psychique d’une image de soi, vécue comme châtrée, abîmée et métamorphosée. / Within contemporary discontent, in which good looks play an important role, beauty has become more than a right, it is a duty. If the aestheticization and technologization of the body are social products of the hygienist discourse, ugliness can be defined as an exclusion of what cannot be integrated in aesthetic standards. We are also questioning the construction of aesthetic judgment. We note that in the unconscious dynamic, aesthetic representations contain a phallic connotation. Furthermore, psychoanalysis shows that if we discriminate what is ugly, it’s because its view awakens in us degeneration, castration and death anxiety, having an impact on our body image. So, we are wondering if medicalization, the need to take care and embellish ourselves, are solutions that the social construct proposes in order to control our body, the uncanny, and dysmorphophobia.In fact, patients are increasingly consulting because they are feeling ugly and not measuring up to such ideals. What makes a subject feel not beautiful? Are there individuals that are more sensitive to feeling ugly than others? The feeling of ugliness appears when we are feeling like not measuring up to un aesthetic ideal; it reveals to the subject his/her lack-of-being and his/her lack-of-having. The contemporary clinical field shows that the social rejection of ugliness operates like a vicious ciercle, since the subject that is being discriminated by the look of the other, has the tendency to avoid the latter. The self-representation of ugliness is thus constructed as a subjective production of the projection of the other’s glance and the introjection of the Other’s glance.Consequently, analyzing the psycho-somato-social weaving that the clinical figures of ugliness are designating, raises important therapeutic and social questions. If the feeling of one’s own ugliness is the only way that the subject could find in order to speak about what he/she can’t say, then eradicating this symptom, as other therapeutic fields are suggesting, may constitute a risk of undoing a defense mechanism and causing psychic collapse. Feeling ugly can be considered as a transitional moment towards psychological appropriation of a self-image that is felt as castrated, damaged and metamorphosed.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017USPCC092 |
Date | 30 September 2017 |
Creators | Cernat, Cristina |
Contributors | Sorbonne Paris Cité, Birman, Joël |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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