La découverte de l'expansion de l'univers par Edwin Hubble en 1929 et l'étude de modèles cosmologiques ont retiré à l'univers son image statique et infinie; l'univers évolue depuis plus de 13 milliards d'années, depuis le Big Bang. Le modèle cosmologique standard hiérarchique ΛCDM prédit que, durant cette évolution, les halos de matière noire auraient principalement accrété de la masse par fusions successives. L'évolution des baryons, qui se trouveraient être en quantité bien plus faible, aurait suivi celle de la matière noire. Deux types de fusions auraient structuré l'évolution des galaxies : les fusions mineures et majeures. De plus, une accrétion continue de gaz froid, similaire à de nombreuses fusions mineures, aurait aussi pu jouer un rôle dans l'assemblage de la masse des galaxies. Les fusions mineures et l'accrétion de gaz entraînent une évolution douce des galaxies. A contrario, les fusions majeures modifient brutalement la morphologie aussi bien que la cinématique des galaxies en fusion et forment ainsi de nouvelles galaxies. Une dernière forme d'évolution apparaît lorsque la galaxie est isolée ou pendant une période séparant deux épisodes de fusion : l'évolution séculaire. La morphologie et la cinématique d'une galaxie peuvent alors changer via des perturbations internes ou générées par la dernière fusion. L'évolution séculaire n'ajoute pas de masse à la galaxie; seule, elle est insuffisante pour créer une galaxie. Pour mieux contraindre l'évolution des galaxies, je me suis tout d'abord penché sur l'évolution des galaxies durant les huit derniers milliards d'années. Dans cette optique, j'ai travaillé sur des données observationnelles du programme IMAGES (Intermediate MAss Galaxies Evolution Sequence), une étude, basée sur 63 galaxies situées à des redshifts intermédiaires (z ∼ 0.6), ayant pour objectif de dresser un portrait de l'état des galaxies à redshifts intermédiaires et de comprendre les mécanismes à l'oeuvre dans leur évolution. J'ai principalement utilisé les méthodes de travail développées sur l'échantillon du projet IMAGES pour 12 nouvelles galaxies ayant un redshift moyen légèrement plus grand (z ∼ 0.7 au lieu de 0.6). Avec les données du HST provenant du relevé GOODS, j'ai classé morphologiquement les galaxies du nouvel échantillon. Puis, utilisant les données du spectrographe multi-objets GIRAFFE, j'ai déterminé la cinématique de ces galaxies. Je retrouve, pour une plus petite statistique, les résultats du projet IMAGES : la fraction importante de galaxies particulières qui représentent plus de 50% des galaxies de masses intermédiaires à des redshifts intermédiaires, au détriment des galaxies spirales ; une corrélation entre la classe morphologique des galaxies spirales et celle cinématique des galaxies en rotation; une tendance pour les galaxies particulières à avoir une cinématique complexe ou perturbée. Ces résultats impliquent que les galaxies ont changé de morphologie entre z = 0.7 et z = 0. Les galaxies ayant une cinématique complexe ou perturbée sur de grandes échelles (> 5 kpc) requièrent des mécanismes bouleversant l'ensemble du gaz. Le mécanisme d'évolution le plus apte à les expliquer est la fusion majeure plutôt que l'accrétion lente de gaz ou la fusion mineure de galaxies naines. Les galaxies elliptiques de l'univers proche étant déjà en place à z > 1, les galaxies particulières ont dû alors évoluer en galaxies spirales. Tester le scénario de reconstruction des galaxies spirales après une fusion majeure a été le second axe de mon travail de recherche. La fraction de gaz, plus élevée dans le passé (> 50 % à z ∼ 1 − 2), joue un rôle primordial dans ce processus de reconstruction. Une partie du gaz en se refroidissant après une fusion majeure tombe dans le potentiel de la galaxie tout en conservant son moment angulaire et peut ainsi reformer un disque. Hammer et al. (2005a) interprète la formation stellaire sur les huit derniers milliards d'années ainsi que l'évolution de la morphologie et des abondances des galaxies par des épisodes de fusions majeures suivis de formation de galaxies spirales par reconstruction d'un disque. Suivant ce scénario, de nombreuses galaxies spirales de l'univers proche résulteraient d'une fusion majeure. La galaxie M31 semble être une bonne candidate pour ce type de phénomène. Elle a un nombre d'amas globulaires et de galaxies naines près de deux fois supérieur à celui de la Voie Lactée, plusieurs courants stellaires dont le Giant Stream et surtout un bulbe classique. J'ai participé au travail de reconstruction de M31 après une fusion majeure via des simulations numériques afin de tester cette hypothèse. Une fusion majeure de rapport de masse ∼ 3, avec des fractions de gaz dépassant les 60 % et comprenant un premier passage il y a 8-9 milliards d'années et une fusion il y a 5-6 milliards d'années, reproduit les structures morphologiques et cinématiques principales de M31 (bulbe, disque épais, disque mince, Giant Stream), renforçant ainsi le scénario de reconstruction du disque après une fusion majeure. Mon dernier travail de recherche a porté sur les conséquences des fusions majeures sur leur environnement. En effet, les débris éjectés d'une fusion majeure peuvent atteindre des masses de plus de 15 % de la masse baryonique totale des galaxies en fusion. La majeure partie de la matière éjectée à grande distance pourrait être due à la formation de queues de marée durant la fusion. A l'intérieur de ces queues de marée, de nouvelles galaxies naines peuvent se former, des galaxies naines de marée. Une fusion majeure peut donc être la source de la formation de nouvelles galaxies. Si la majeure partie des galaxies spirales se sont formées par fusions majeures, les conséquences de ces dernières ne peuvent être négligées. Plus particulièrement, la fusion majeure qui serait à l'origine de M31 aurait pu essaimer des galaxies naines dans le Groupe Local. Il se trouve que les galaxies naines de la Voie Lactée ont deux particularités : une distribution spatiale en forme de plan épais, dénommée VPOS (Vast Polar Structure), et la présence de deux galaxies naines irrégulières, les Nuages de Magellan (MC pour Magellanic Cloud), très proches de la Voie Lactée (< 60 kpc). Mon travail a consisté à tester l'hypothèse qu'une queue de marée, éjectée par la fusion majeure de M31, ait pu former les galaxies naines compagnons de la Voie Lactée. Ce scénario est probant pour reproduire leur distribution spatiale et la distribution de leur moment angulaire. Cependant, il semble en contradiction avec les rapports M/L élevés dans les galaxies naines sphéroïdales déduits des mesures de dispersion de vitesse. Ces rapports s'expliqueraient par la présence de grandes quantités de matière noire alors que les galaxies naines de marée en sont dépourvues par essence. Cette apparente contradiction pourrait s'expliquer si l'hypothèse de la stabilité interne des galaxies naines est abandonnée. Plus généralement, cette étude relance la question de l'origine des galaxies naines. Sont-elles des reliques des galaxies primordiales de l'univers ou le résultat de fusions majeures? Si le phénomène de fusion majeure est confirmée comme le mécanisme principal de formation des galaxies spirales et si des études démontrent qu'un grand nombre de galaxies naines de marée sont créées lors de ces événements, la recherche sur la formation, le nombre et la distribution spatiale des galaxies naines sera alors à revoir.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-00975096 |
Date | 24 June 2013 |
Creators | Fouquet, Sylvain |
Publisher | Université Paris-Diderot - Paris VII |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | PhD thesis |
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