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L'imagerie dévote de petit format

Il semble y avoir, depuis une vingtaine d'années, un accroissement considérable de l'intérêt porté, à travers le monde, à l'étude de l'imagerie populaire sous toutes ses formes. De nombreuses publications, des études sérieuses, des communications et des expositions de plus en plus rapprochées illustrent bien le goût marqué des chercheurs et du public pour l'imagerie. Pourtant, l'intérêt que l'on porte à celle-ci est déjà ancien. En effet, à la fin du siècle dernier, Champfleury, par son Histoire de l'Imagerie populaire, sonnait l'alerte et lançait un courant qui ne cessera de s'amplifier. Tout en éveillant la curiosité des chercheurs, il les incita à se pencher sérieusement sur l'imagerie de création populaire que les historiens de l'art de l'époque considéraient comme une bien lointaine et pauvre parente de l'art savant:
De l'imagerie découlent encore divers enseignements historiques; et si on ne juge pas digne de faire entrer, même au dernier rang, l'image dans l'histoire de l'art, elle tiendra sa place au premier dans l'histoire des moeurs.
Ses appels furent bientôt relevés par quelques savants chercheurs dont des folkloristes comme Fertiault et Sébillot qui s'intéressaient particulièrement à l'imagerie populaire religieuse. Mais ce n'est que plus tard que fût véritablement lancée la recherche. En 1925, Pierre Louis Duchartre et René Saulnier publièrent L'Imagerie Populaire, un ouvrage bien construit et très documenté qui sera pendant longtemps considéré comme la bible de l'imagerie populaire. Les mêmes auteurs ont d'ailleurs publié, dans les décades suivantes, de nombreux ouvrages sur l'imagerie populaire européenne. Tout au long de leurs travaux, ils axèrent surtout leurs recherches sur l'étude de l'évolution des techniques de gravure et d'imprimerie et sur les différents centres de production. Par leur oeuvre, Duchartre et Saulnier donnèrent vraiment le ton à l'étude de l'imagerie populaire. Après L'Imagerie Populaire, les études se sont multipliées et la recherche s'est spécialisée; les érudits ont depuis divisé les époques de production, étudié, un par un, les centres de diffusion, décrit les techniques et établi une classification des sujets et des types d'images. Cependant, peu d'auteurs se sont occupés de la production moderne d'images qui fait immédiatement suite à l'imagerie de facture populaire. Cette production, datant approximativement du milieu du XIX siècle, se particularise par l'emploi de techniques modernes d'imprimerie permettant une plus grande et plus rapide production et, de là, une plus grande diffusion. En publiant "Philosophie de la petite imagerie dévote"/ Paul Toinet ouvrait une nouvelle voie de recherche car, après avoir fait l'historique de l'imagerie de petit format depuis le XV siècle, il débouchait sur l'étude de l'imagerie moderne dont il fixe approximativement les débuts aux environs de 1840. Il poursuit son étude en examinant les images de petit format depuis ce temps jusqu'au second concile du Vatican. Dans cet article, Toinet décrit aussi quelques types particuliers de l'imagerie moderne de petit format: les images à dentelles mécaniques, les montages, les cachets de communion, les images faites à la main et les textes de prières. Le travail que nous présentons maintenant complète, d'une certaine manière, l'étude de Paul Toinet qui portait surtout sur l'évolution de l'image de petit format depuis le XVe siècle jusqu'à nos jours. Pour notre part, nous ne nous attarderons pas à l'étude de l'évolution des techniques de gravure et d'imprimerie; nous concentrerons surtout nos efforts sur l'image de petit format telle qu'elle nous est présentée par la collection Larouche-Vilneuve. L'image qui retient notre attention est moderne; en effet, bien que la collection comprenne plusieurs pièces datant du début du XIX siècle et même quelques-unes du XVIII siècle, nous travaillerons sur l'ensemble des pièces qui vont des environs de 1860 à nos jours. Toutes les images de cette période ont d'ailleurs les mêmes caractéristiques générales: le format est de 12 cm par 8 cm environ (format livre de prières), les sujets sont exclusivement religieux, chacune des images est une pièce complète (feuille volante) destinée à être utilisée sans compléments et, enfin, toutes les pièces ont été recueillies au Québec. Nous examinerons donc toutes les images de la collection de façon à pouvoir détailler, d'une manière exhaustive, l'ensemble des informations véhiculées par ce genre de documents. Cependant, bien que nous soyons intéressé à saisir toutes les caractéristiques de ce type de pièces, nous laisserons de côté les renseignements qui pourraient nous conduire, pour les illustrations, à des comparaisons avec les modèles de l'art savant; de cette façon, nous écartons de notre étude les données d'histoire de l'art, préférant laisser cette tâche à des spécialistes. Afin de bien connaître l'imagerie religieuse de petit format telle qu'elle existe depuis la fin du XIXe siècle, nous effectuerons deux inventaires distincts dans la collection. Le premier inventaire, de nature iconographique, réalisé d'abord et avant tout comme méthode de classement pour les besoins de la recherche, nous permettra de nous renseigner sur les thèmes iconographiques supportés par les petites images. Le second inventaire, ne reposant aucunement sur les illustrations, ne tiendra compte que des textes imprimés et des autres marques (dimensions, forme, matériau, etc.) retrouvés sur les- images. Ce deuxième inventaire, surtout par l'étude des caractéristiques des textes imprimés, nous permettra de mieux saisir la véritable utilité sociale de l'image de petit format; en même temps, il deviendra plus facile de cerner les intentions (informations générales, propagande, sollicitation, recrutement, etc.) des créateurs et des diffuseurs. De plus, en regroupant les images à partir de caractéristiques comme la morphologie, la nature des textes imprimés, le format et le matériau, nous en viendrons à définir une vingtaine de types d'images qui rendront compte de la production moderne d'images de petit format. Nous verrons aussi que les images, en plus de véhiculer de nombreux textes imprimés, nous présentent une importante quantité de marques olographes qui peuvent nous renseigner sur les multiples utilisations possibles de ce genre de pièces. Nous partirons de ces indices pour consulter, en enquête, une trentaine d'informateurs québécois. Ceux-ci nous parleront de l'existence effective de l'image et de son utilisation régulière; nous pourrons alors constater que la petite image, comme bien d'autres petits objets de dévotion, était fort prisée des gens. Ainsi, au cours de ce travail, tout en nous attardant à bien connaître l'image sous différents aspects, nous ne perdrons pas de vue les deux pôles de son existence soit les diffuseurs et les utilisateurs. Nous verrons de cette façon que: "L'imagerie religieuse tient deux discours parallèles: l'un du pouvoir ecclésiastique, l'autre du peuple des fidèles". / Québec Université Laval, Bibliothèque 2012

Identiferoai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/28642
Date25 April 2018
CreatorsLessard, Pierre
Source SetsUniversité Laval
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
Typemémoire de maîtrise, COAR1_1::Texte::Thèse::Mémoire de maîtrise
Formatxiii, 208 f., application/pdf
CoverageQuébec (Province)
Rightshttp://purl.org/coar/access_right/c_abf2

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