Le bâti ancien est aujourd’hui confronté à des enjeux normatifs, environnementaux et patrimoniaux qui favorisent sa réhabilitation et engagent une multiplicité d’acteurs dans cette activité. Ces engagements mettent en débat les savoirs, les mondes professionnels et les attachements que ces acteurs tissent autour des espaces édifiés. La thèse explore ces dynamiques autour du cas particulier du bâti ancien en pisé (bâtiments construits en terre crue damée dans des coffrages) dans le département de l’Isère. L’objectif de ce travail est de comprendre et de décrire comment et par qui ce bâti est mis en projet et réhabilité, dans un double sens d’amélioration physique et de revalorisation d’un objet aux significations multiples. Nous faisons l’hypothèse que les projets de réhabilitation, par les multiples formes d’engagement qu’ils construisent, participent à détacher l’expérience de ce bâti d’une expérience ordinaire. Ces projets mettent à l’épreuve les attachements que leurs porteurs développent autour du bâti existant et de la matière terre qui le constitue autant que les savoirs et les pratiques constructives qui s’y appliquent. Ces épreuves participent à l’émergence de collectifs qui tissent un maillage politique au sein duquel se composent des espaces de dialogue et d’appropriation des usages, de la pratique et du devenir du bâti existant.Pour explorer cette hypothèse, la recherche s’inscrit dans une perspective interdisciplinaire qui articule ressources théoriques et méthodes développées en architecture, en ethnologie et en sociologie. Elle développe une anthropologie pragmatique des cultures constructives qui compose une problématisation commune entre ces disciplines autour des questions soulevées par la réhabilitation du bâti ancien. L’exploration de ces questions se base sur un travail d’enquête qualitative multi-située. Il décrit les mondes de la réhabilitation en action, en suivant des parcours de projet portés par plusieurs catégories d’acteurs (habitants, professionnels, institutions). La thèse revient d’abord sur les différentes formes d’engagement qui participent à mettre le bâti ancien en projet, de l’intervention sur un bâtiment spécifique à sa mise en valeur de manière générale. Ces expériences de réhabilitation portent l’attention sur différentes qualités du bâti et contribuent à le faire sortir de l’ordinaire. Le bâti ancien en pisé est ainsi engagé – et engage lui-même – dans de multiples réalités. À la fois maison, lieu de vie, lieu de travail, patrimoine local ou architecture de terre, il fait agir, réagir et rentrer en relation les acteurs qui s’y intéressent. La deuxième partie de l’analyse décrit comment la difficulté d’appliquer des protocoles de réhabilitation entraine les porteurs de projet à s’engager dans des épreuves et à chercher des prises leurs permettant de mener à bien leurs projets. Ces épreuves entrainent les acteurs qui s’y investissent à ajuster leurs relations entre eux et avec le bâti au fur et à mesure du processus de projet. À mesure qu’ils s’approprient les savoirs de la réhabilitation, ils développent différentes formes d’attachement autour du bâti. Les projets de réhabilitation contribuent alors à l’émergence de collectifs plus ou moins pérennes qui se réapproprient les modalités d’intervention sur le bâti et les décisions qui le concernent. La thèse s’attache finalement à mieux comprendre les dimensions plurielles (matérielle, constructive, architecturale et interactionnelle) des cultures constructives du pisé et de sa réhabilitation et propose les éléments d’un dialogue à poursuivre avec les acteurs de terrain autour de l’intérêt et des conditions permettant de faire tenir un espace politique autour des usages et du devenir du bâti existant. / Ancient buildings face today normative, environmental and patrimonial issues which foster their renovation and engage a great diversity of actors. This multiplicity initiates a debate around knowledge, professional worlds and attachments which are woven around existing buildings. This thesis delves into these dynamics focusing on the case of ancient rammed earth building (raw earth compressed into an external formwork) in the French department of Isere, France. It aims at describing how and by whom rammed earth buildings are involved in retrofitting projects, considering both their physical and representational improvement. We make the hypothesis that retrofitting projects, through the multiple ways of engagement they imply, help to free the experience of this buildings from an ordinary experience. Indeed, they put on trial the attachments developed by the actors around existing buildings and earthen material as much as the building knowledge and practices. These trials bring out collectives that weave a political meshwork. At different scales, this meshwork composes spaces for dialogue and appropriation of uses, practices and futures of existing buildings.The exploration of this hypothesis follows an interdisciplinary perspective that connect theoretical resources and methods developed in architecture, ethnology and sociology. It develops a pragmatic anthropology of building cultures composing a common problematic for these disciplines to discuss ancient building retrofitting. The investigation is based on multi-sited qualitative ethnography. Following projects paths carried by different actors (inhabitants, professionals, institutions), it describes the retrofitting worlds in action. First, the thesis describes the various forms of engagement in retrofitting projects, from the intervention on a specific building to its evaluation as heritage. These experience draw attention on different qualities of the buildings and bring them out of their ordinary status. Ancient rammed earth buildings are therefore engaged – and engage themselves – in multiple realities: house, place of life, workplace, local heritage, earthen architecture. It makes the actors act, react and interact. Then, the analysis shows how the difficulty of applying strict rehabilitation protocols leads the actors to engage in trials and to develop holds to carry out their projects. As the project progresses, these trials lead them to adjust their relations with each other and with existing buildings. As they grasp knowledge about retrofitting, they develop different attachments. Therefore, retrofitting projects contribute to the emergence of collectives, more or less durable. At their own scale, these collectives reclaim the methods of interventions on buildings and the decision that concern them. The thesis eventually aims to better understand the plural dimensions (material, constructive, architectural and interactional) of rammed earth building retrofitting and propose components for a dialogue to carry on with local stakeholders around the interests and conditions that would make possible to hold a political space around the uses and futures of existing buildings.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2018GREAH018 |
Date | 24 September 2018 |
Creators | Genis, Léa |
Contributors | Grenoble Alpes, Guillaud, Hubert, Rautenberg, Michel |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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