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Flux d'uranium et excès de 230Th dans les sédiments de la mer du Labrador : relation avec les conditions paléocéanographiques et la paléoproductivité du bassin

Ce mémoire présente les résultats d'une étude, portant sur les déséquilibres radioactifs dans les familles de l'uranium et du thorium, effectuée sur des sédiments quaternaires du nord ouest de l'Atlantique nord. Les teneurs et rapports d'activité U-Th ont été combinés à d'autres données: datation 14C, composition isotopique de l'oxygène et du carbone (518O et 813C), teneurs en carbonates, analyses micropaléontologiques, analyses granulométriques et composition minéralogique des argiles. Ces données permettent de présenter différents aspects du comportement géochimique de ces isotopes, en relation avec la paléocéanographie et la paléoproductivité.

Les échantillons de surface provenant d'une vingtaine de carottes boîtes, répartis principalement entre le bassin de la mer du Labrador et ceux d'Irminger et d'Islande, ont été étudiés pour leur contenu en uranium et thorium ainsi que leurs rapports d'activité. La composition isotopique des sédiments actuels et holocènes du bassin de la mer du Labrador indique un mélange entre les sources détritiques proximales (érosion des masses continentales voisines), les carbonates biochimiques (pluie peltomicritique) issus de la productivité primaire (ceux-ci peuvent représenter jusqu'à 50 % du poids sec du sédiment) et les apports distaux (argiles de la dorsale). Sur la base des teneurs en Th et des signatures isotopiques (rapports d'activité 238Tj/232Th), trois sources détritiques principales peuvent être identifiées, soit une source labradorienne, une source groenlandaise et une source associée à la ride médioocéanique. Les sédiments de la mer du Labrador ont été récoltés selon un profil transverse entre Hamilton Inlet (Labrador) et le Cap Farewell (Groenland). Ce profil démontre que la proportion de chacune de ces composantes est d'abord fonction de l'emplacement géographique de la station étudiée; ceci concerne principalement les apports proximaux (Labrador et Groenland). Des études antérieures ont mis en évidence le vannage des fractions les plus fines par le sous-courant côtier de l'ouest (WBUC) au cours des périodes interglaciaires. Ainsi, la profondeur de la station et sa position relativement à l'axe de débit maximal du WBUC, affectent la proportion de la composante distale dans les sédiments (argiles de la dorsale) et par conséquent la composition isotopique du sédiment. Dans les stations étudiées, la taille granulométrique des sédiments et les concentrations des différents isotopes mesurés, notamment du thorium, sont ainsi liées.

La carotte longue HU-90-013-013 (lat 58°12.59N, long. 48°22.40W, profondeur 3380) située sur le talus groenlandais couvre la période allant du stade isotopique 7 jusqu'à l'actuel. Les sédiments glaciaires (stades isotopiques 2,4 et 6) de la carotte 90-013-013 n'indiquent pas de changement de source sédimentaire au cours des épisodes correspondants et présentent un rapport d'activité 238U/232Th faible et à peu près constant. La quasi-absence de productivité primaire et donc de fixation d'uranium diagénétique ainsi que la faiblesse du WBUC nous autorisent à considérer ce rapport comme représentatif de la source détritique proximale groenlandaise.

Le flux total d'uranium sédimentaire est constitué de trois composantes principales: le flux terrigène, le flux particulaire authigène et l'uranium fixé au cours de la diagénèse précoce par diffusion et précipitation sous le front rédox. Cette étude ni démontre que dans les sédiments de la mer du Labrador seulement deux composantes semblent importantes, soient l'uranium détritique et l'uranium diagénétique. Différentes approches ont permis de calculer les flux d'uranium associés à la diagénèse précoce dans le sédiment. Ici aussi, une différence importante est observée entre les stations qui sont sous l'influence du WBUC et celles qui ne le sont pas. Les sédiments holocènes de la carotte boîte 90-013-011 (lat. 58°54.85N, long. 47°05.13W, profondeur 2805), prélevée à la base du talus groenlandais, dans l'axe de débit maximal du WBUC, présentent un flux d'uranium diagénétique trois fois plus faible que les sédiments se trouvant plus bas sur le glacis. Au cours de l'intervalle 0-40 000 ans, le flux des indicateurs rédox-sensibles: l'uranium, le soufre, le manganèse et le fer répondent principalement aux paléoflux de Corg.. La carotte longue 90-013-013 présente des indices qui tendent à démontrer une mobilité post sédimentaire de l'uranium aux interfaces entre les sédiments glaciaires (oxydés) et interglaciaires (réduits). Cette mobilité est illustrée, entre autre, par un défaut croissant en 234U, devant son ascendant 238U avec l'âge du sédiment, soit en passant du stade isotopique 2 au 4 et au 6 laissant supposer un mécanisme de "relocalisation" continue à travers le temps comme l'indiquent des pics d'excès en 234U de part et d'autres des horizons glaciaires oxydés, à la transition avec les couches interglaciaires/interstadiaires englobantes.

L'étude démontre aussi que les excès de 230Th mesurés dans les sédiments holocènes profonds de la mer du Labrador excèdent la production de la colonne d'eau sus-jacente d'un facteur ~7. Pendant le dernier maximum glaciaire, stades isotopiques 2 et 6, les excès rendent toutefois assez exactement compte de la production par la colonne d'eau comme l'indique les chronologies 14C et SPECMAP comparées aux inventaires de 230Th en excès. Les flux latéraux de 230Th de l'intervalle 0-40 000 ans présentent une très forte corrélation avec les flux de carbonates biogéniques liés à la production des coccolithophoridés. Il semble donc qu'en première approximation, dans les bassins sub-arctiques, les flux de 230Th puissent être un indicateur des changements de productivité primaire à travers le temps. Pour dresser un bilan du 230Th dans le bassin de la mer du Labrador, il est nécessaire de considérer des flux latéraux importants associés à un transport de moyenne et longue distance. Les modèles, en milieux marins ouverts, utilisant les excès de 230Th semblent donc inappropriés pour normaliser les flux sédimentaires dans ce bassin. Nous proposons dans cette étude que le WBUC, responsable des apports distaux fins liés à la ride médio-océanique, puisse "contraindre", en partie, les flux latéraux importants de 230Th observés dans le bassin de la mer du Labrador notamment au cours de l'Holocène.

Identiferoai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QCU.1090
Date January 1997
CreatorsVallières, Sylvain
Source SetsLibrary and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada
Detected LanguageFrench
TypeThèse ou mémoire de l'UQAC, NonPeerReviewed
Formatapplication/pdf
Relationhttp://constellation.uqac.ca/1090/

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