Est-ce que les animaux pensent? Quelle est la nature des mécanismes qui dirigent leurs comportements? Peut-on comparer ces mécanismes au fonctionnement de l'esprit humain? Ces questions animent les débats scientifiques, philosophiques et théologiques depuis des millénaires. L'idée d'une discontinuité fondamentale entre l'esprit humain et les rouages de l'animal-machine, prônée par Descartes, s'oppose à l'hypothèse de continuité de Darwin selon laquelle la différence entre les capacités mentales de l'homme et de l'animal serait de degré et non de nature. Dans cette thèse, fort des récentes avancées méthodo-logiques et théoriques dans l'étude du comportement animal et des neurosciences, nous partons à la recherche de la pierre de Rosette pouvant éclairer ce débat: l'homologie neuro-cognitive fonctionnelle. Existe-t-il un fonctionnement nerveux commun à plusieurs espèces (et notamment à l'homme), supportant un même fonctionnement cognitif? Nous focalisons notre recherche sur l'une des fonctions clefs de l'esprit humain, qui semble aussi très répandue dans le monde animal : la catégorisation. Former des concepts - regrouper mentalement les objets ou événements auxquelles nous sommes confrontés en catégories - permet de simplifier, de donner un sens et de réagir de manière appropriée aux flux perceptuels incessants issus de nos sens. En testant des sujets humains et macaques dans un protocole rigoureusement identique de catégorisation visuelle rapide, en particulier en contrôlant l'influence de l'information contextuelle de la scène visuelle sur les performances de catégorisation de l'objet, nous montrons ici que les deux espèces de primates semblent bien avoir recours à des représentations ou concepts visuels similaires pour résoudre cette tâche. Mieux, le développement de nouvelles méthodes d'analyses multivariées des potentiels de champs corticaux nous permet de lire, essai par essai, l'émergence de représentations neuronales associées à cette tâche de catégorisation. En appliquant ces méthodes chez le singe, en EEG de surface chez l'homme et chez des patients épileptiques implantés pour raison médicale, on met en évidence le rôle analogue, chez ces deux espèces de primates, de la voie visuelle ventrale dans la formation ultra-rapide de ces représentations catégorielles. Pour résumer, la capacité de catégorisation visuelle rapide semble être un trait neurocognitif partagé par l'homme et le macaque, probablement héritée d'un ancêtre commun. L'existence d'une telle homologie est un argument pour l'hypothèse de continuité et permet donc d'envisager une évolution de la cognition. Enfin, si l'on considère la catégorisation comme un élément clef de la pensée humaine, alors ces résultats suggèrent l'existence d'une pensée chez le macaque, dont au moins une partie fonctionne comme la nôtre.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-00803494 |
Date | 03 December 2012 |
Creators | Cauchoix, Maxime |
Publisher | Université Paul Sabatier - Toulouse III |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | PhD thesis |
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