L’environnement a un effet considérable sur les végétaux par différents facteurs abiotiques (climat,
sol, urbanisation) ou biotiques (pollinisateurs, herbivores). Les fortes pressions de sélection
exercées par ces facteurs sur certains traits phénotypiques aboutissent souvent à des adaptations
chez les plantes. Les pollinisateurs exercent une pression de sélection sur les traits floraux qui
résultent en des adaptations convergentes que l’on appelle syndromes de pollinisation. L’étude de
ses syndromes, mais aussi de la performance de pollinisation de chaque visiteur, permet de mieux
comprendre l’intensité de cette pression de sélection ainsi que l’évolution florale.
Dans cette thèse, nous nous sommes appuyés sur l’utilisation de deux modèles d’études végétaux :
la famille des Gesneriaceae des Antilles et l’Impatiente du Cap. Ces deux modèles, de par leurs
stratégies de pollinisation et leurs variations florales, sont appropriés pour étudier l’adaptation
florale aux pollinisateurs. Nous avons ainsi pu tester 1) si la forme florale est expliquée par la forme
du bec des colibris pollinisateurs chez les Gesneriaceae antillaises ; 2) si l’espèce Rhytidophyllum
bicolor Urb. est généraliste en pollinisation et si ses différents types fonctionnels de pollinisateurs
ont une performance de pollinisation similaire ; 3) si l’urbanisation affecte la forme florale de
l’espèce Impatiens capensis Meerb., à travers des changements dans les communautés de
pollinisateurs.
Pour tester ces hypothèses, des approches de morphométries géométriques ont été utilisées
(hypothèses 1 et 3), ainsi que des observations de pollinisation in situ et la mesure du taux de visite
(hypothèses 2 et 3). La mesure de performance de pollinisation a été réalisé via le comptage des
grains de pollen déposés sur le stigmate après chaque visite, et à la mesure du taux de visite. Enfin,
des tests statistiques (ANOVA, régressions linéaires) et analyses multivariées (analyses de
redondance, analyse en composantes principales) ont été réalisées sur les données obtenues pour
chaque étude.
Les résultats de la première étude montrent une corrélation positive entre la longueur de la corolle
de fleurs spécialistes aux colibris et la longueur du bec des pollinisateurs. Bien que moins
significatifs, les résultats des comparaisons de formes globales, obtenues par application de
morphométrie géométrique, indiquent que cette approche est prometteuse pour ce genre d’analyse.
Nous avons démontré que la forme florale des fleurs généralistes est impactée par les colibris
pollinisateurs, bien que d’une manière différente des spécialistes.
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Pour l’hypothèse 2, la prédiction de stratégie de pollinisation de l’espèce Rhytidophyllum bicolor a
été validée, puisque cette plante est pollinisée par des colibris, chauves-souris et abeilles.
Cependant, face au déclin des populations de colibris après le passage de l’ouragan Matthew sur
Haïti, seules les performances de pollinisation des abeilles et des chauves-souris ont pu être
mesurées. Les résultats montrent que les chauves-souris sont des pollinisateurs efficaces et
conséquents, bien que la performance des abeilles ne soit pas négligeable. Il a ainsi pu être mis de
l’avant que la stratégie de pollinisation généraliste semble être un avantage pour les plantes
présentes dans les zones sujettes aux fluctuations de populations de pollinisateurs, comme cela peut
souvent être le cas sur les îles à la suite du passage d’un ouragan.
La troisième étude montre que l’urbanisation n’a pas d’effet direct sur la forme florale de
l’Impatiente du Cap, mais qu’elle a des effets indirects significatifs via les changements causés sur
les communautés de pollinisateurs. Sur les six sites échantillonnées les pollinisateurs principaux,
Bombus sp. Latreille et Apis mellifera Linnaeus, sont les mêmes. Cependant les taux de diversité
obtenus montrent une variation entre les sites, due à la présence de certaines espèces de
pollinisateurs occasionnels dans certains sites et pas dans d’autres. Ces taux ne sont pas plus faibles
dans les sites les plus urbains. Les résultats indiquent que certaines formes florales sont associées
à des espèces de pollinisateurs particulières. Les différentes espèces de pollinisateurs ayant une
pression de sélection différente sur les traits floraux, l’urbanisation a ainsi un impact indirect sur la
forme florale chez l’espèce étudiée.
À travers trois études différentes, cette thèse a mis en avant l’impact que l’environnement peut
avoir sur les traits floraux, de manière indirecte, via les pollinisateurs. Alors que la deuxième et
troisième étude ont montré la pression exercée par les pollinisateurs sur les traits floraux dans
différents cas de perturbations de l’habitat, la première étude a permis de mieux comprendre
l’adaptation remarquable des fleurs à leurs pollinisateurs, même pour des espèces généralistes en
pollinisation. / The environment has a considerable effect on plants through various abiotic (climate, soil,
urbanization) or biotic (pollinators, herbivores) factors. The strong selection pressures exerted by
these factors on phenotypic traits often results in adaptations. Pollinators exert selection pressure
on floral traits that result in converging adaptations called pollination syndromes. The study of
syndromes, as well as the pollination performance of each floral visitor, allows us to better
understand the intensity of a/biotic selection pressure and floral evolution.
In this thesis, we relied on two plant models: the Gesneriaceae family in the Antilles, and the
common Jewelweed, Impatiens capensis Meerb. Due to their pollination strategies and their floral
variation, both of these models are suitable for studying floral adaptation to biotic factors,
specifically, their pollinators. We were thus able to test the following hypotheses: 1) whether the
floral form is explained by the beak shape of pollinating hummingbirds in West Indies Gesnericeae;
2) whether the Gesnericeae Rhytidophyllum bicolor Urb. has a generalist strategy for pollination
and whether their different functional types of pollinators have similar pollination performances;
3) whether urbanization affects the floral form of the common Jewelweed, through changes in
pollinator communities.
To test these hypotheses, geometric morphometric approaches were used (hypotheses 1 and 3), as
well as in situ pollination observations, and estimation of the visitation rate (hypotheses 2 and 3).
Pollination performance was measured by counting pollen grains deposited on the stigma after each
visit, and by measuring the visitation rate. Finally, statistical tests (ANOVA, linear regressions)
and multivariate analyses (redundancy analysis, principal component analysis) were carried out on
the data obtained to test each hypothesis.
The first results show a positive correlation between the length of the corolla of flowers specialized
for hummingbirds and the beak length of pollinators. Although less significant, our results of the
comparisons of global shapes, obtained by applying geometric morphometry, indicate that this
approach is promising for this kind of analysis. We show that the floral form of generalist flowers
is impacted by pollinating hummingbirds, albeit in a different way from specialists.
For the second hypothesis, our prediction that R. bicolor has a generalist pollination strategy was
validated, since this plant is pollinated by hummingbirds, bats and bees. However, faced with the
decline in hummingbird populations after Hurricane Matthew hit Haiti in 2016, only the pollination
performance of bees and bats could be measured. Our results show that bats are efficient and
consistent pollinators of R. bicolor, although the performance of bees is not negligible. Thus, it has
been possible to put forward that the generalist pollination strategy seems to be an advantage for
plants present in areas subject to fluctuations in their pollinator populations, as can often be the
case on hurricane-prone islands.
The third study shows that urbanization does not have a direct effect on the flower form of common
Jewelweed, but that urbanization does have significant indirect effects through changes caused on
pollinator communities. At the six sites sampled, the main pollinators, Bombus sp. Latreille and
Apis mellifera Linnaeus, are the same. However, diversity rates show variation between sites, due
to the presence of certain species of occasional pollinators in some sites and not in others. These
rates are not lower in the most urban sites. Our results indicate that certain floral forms are
associated with particular pollinator species. Since different pollinator species have different
selection pressures on floral traits, urbanization has an indirect impact on the floral form in the
species studied.
Through three different studies, this thesis highlighted the impact that the environment can have on
floral traits, indirectly, via pollinators. While the second and third studies showed the pressure
exerted by pollinators on floral traits in different cases of habitat disturbance, the first study helped
to better highlight the remarkable adaptation of flowers to their pollinators, even for generalist
species in pollination.
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/25267 |
Date | 10 1900 |
Creators | Faure, Julie |
Contributors | Joly, Simon |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | fra |
Detected Language | French |
Type | thesis, thèse |
Format | application/pdf |
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