Les consignes sont des aides informationnelles à la réalisation d'une tâche. Les problèmes liés à leur efficacité s'amplifient, ils interrogent l'ergonomie. La recherche en ergonomie présentée dans cette thèse propose de mettre en évidence quelques éléments pour comprendre comment les consignes apportent une aide. Pour ce faire, elle se focalise sur des tâches pour lesquelles on suppose que la fonction d'aide est importante : des tâches rares, dans des situations de travail comportant des risques.<br />Après avoir proposé une définition des consignes, quelques éléments qui rendent compte de la diversité des consignes sont relevés. Leurs spécificités en situation de travail sont examinées plus en détail. On retient qu'elles sont des aides obligatoires. La définition des consignes et leur caractéristique d'obligation amènent à s'intéresser à la notion de "tâche".<br />A partir d'une revue de la littérature, on distingue la tâche prescrite et les représentations mentales de la tâche qui, pour leur part, sont une composante de l'activité de l'agent. Ces représentations interviendraient dans l'utilisation des consignes. Deux composantes des représentations de la tâche sont définies. D'une part, les "règles comprises" recouvrent ce que l'agent comprend de la tâche prescrite et d'autre part, les "règles autoprescrites" sont les règles dont l'agent ne peut pas affirmer l'hétéronomie.<br />Une revue des travaux qui portent sur les activités mentales assistées par les consignes, met en évidence les rôles combinés de la consigne, du contexte et des représentations initiales de la tâche. Ces représentations initiales interviendraient dans la compréhension des consignes par un processus de comparaison. Le modèle de la situation, élaboré par construction issue de la perception de la consigne et par contextualisation, serait comparé aux représentations initiales de la tâche pour donner lieu à une nouvelle représentation de celle-ci. En ce qui concerne les situations de travail pour lesquelles les agents sont formés, on peut supposer que le rôle des représentations initiales de la tâche ne peut être négligé dès lors que l'on s'intéresse à décrire comment les consignes aident les agents. Par ailleurs, les travaux sur l'utilisation des consignes soulignent des problèmes de non-consultation des consignes et en identifient quelques facteurs.<br />A partir de ces constats et d'études ergonomiques menées dans une société ferroviaire (SNCF), la problématique de la recherche se construit autour de deux axes. Dans le premier axe, il s'agit de mieux comprendre comment les agents se représentent les tâches, d'approcher les écarts entre ces représentations et les tâches prescrites, d'identifier d'éventuels facteurs (en relation aux caractéristiques des agents et des tâches) d'apparition de ces écarts. Le second axe vise à compléter les recherches sur les constats de sous-utilisation et à identifier les rôles des consignes dans le processus de comparaison du modèle de la situation issu de la consigne, avec les représentations initiales de la tâche.<br />Un double recueil de données a été effectué auprès de 22 agents de sécurité du domaine ferroviaire : des conducteurs de trains et des aiguilleurs. Pour chaque agent, de manière individuelle, trois phases de recueil se sont succédées : un entretien pour identifier les représentations initiales de l'agent à propos de plusieurs situations d'incident, une série d'observations sur simulateurs avec consultation libre des consignes et enfin des entretiens post-simulation.<br />Concernant les représentations de la tâche, les résultats montrent que les agents connaissent assez bien les tâches prescrites des situations d'incident sélectionnées, mais qu'ils ont également des représentations erronées de ces tâches. Le nombre de règles comprises varie en fonction des situations d'incident et non en fonction de l'expérience des agents. Ce résultat suggère qu'en matière de tâche rare ni l'ancienneté des agents, ni la fréquence de rencontre de la situation ne détermine les connaissances sur le prescrit. Le nombre de règles autoprescrites varie, quant à lui, en fonction des agents, certains agents s'autorisant plus que d'autres des écarts au prescrit. Par ailleurs, on relève que ces écarts "selon l'agent" ne correspondent pas toujours à des écarts réels avec le prescrit. Les justifications qu'apportent les agents à leurs autoprescriptions complètent les travaux existants sur le sujet. Elles introduisent des aspects métacognitifs et des cas d'autoprescriptions pour augmenter le respect d'autres règles comprises.<br />Les résultats confirment une importante sous-utilisation des consignes. Ils montrent que les consignes ne sont parfois pas utilisées alors que les agents ont des besoins informationnels et affirment vouloir respecter le prescrit. Des éléments métacognitifs de surconfiance sont évoqués par les conducteurs pour justifier leurs sous-utilisations massives des consignes.<br />Les effets des consignes sur le processus de comparaison sont examinés pour les quelques cas où les agents ont des représentations initiales erronées de la tâche prescrite et consultent les consignes. Ces cas montrent que les agents appliquent majoritairement les règles prescrites par les consignes sans prendre nécessairement conscience des effets des consignes sur les transformations de leurs représentations des tâches. Ces résultats sont mis en perspective dans la discussion avec d'une part, le rôle de la mise en forme des consignes dans la profondeur du traitement de l'information et d'autre part, le rôle des consignes dans la prise de conscience de la situation.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-00317438 |
Date | 23 September 1998 |
Creators | Veyrac, Helene |
Publisher | Université Toulouse le Mirail - Toulouse II |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | PhD thesis |
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