La notion d’exercice spirituel, proposée par Hadot, désigne des pratiques nées en Grèce antique et qui se prolongent dans les méditations chrétiennes. Opposées à une philosophie théorique, elles poursuivent l’ambition d’apprendre à mieux agir et à se connaître soi-même. La thèse propose une vue d’ensemble de cette tradition associée à l’examen de textes précis de diverses périodes, afin de mettre en perspective les Essais de Montaigne qui se la réapproprient en poursuivant le projet de définir un art de vivre. À la fin du XVIe siècle, la confiance que les Anciens portaient à la raison n’est plus de mise : peut-on encore envisager de se maîtriser ou même de se connaître ? Les Chrétiens le croient possible en ayant recours à la grâce divine. Montaigne propose des exercices proprement humains et ordinaires. Prenant exemple sur une figure de Socrate idéalisée et associée à celle de l’Indien cannibale, il entend promouvoir un rapport à soi plus « naïf » et « primitif ». Cela lui demande d’effectuer un travail sur lui-même que seuls des exercices naturalisés pourront réaliser. Les élans de la fantaisie participent à cette démarche au même titre que le travail de la raison, tandis que cette dernière acquiert le droit de rêver. Il ne renonce pas pour autant à se poser en maître de lui-même, reprenant la méthode stoïcienne qui transforme en choix ce contre quoi on ne peut pas lutter. Au moment où la Contre-Réforme réclame le repentir, l’exercice permet à Montaigne de découvrir et d’assumer ce qu’il est. Et tandis que de nombreux traités cherchent la tranquillitas animi, il endosse le rôle d’agitateur, proposant des exercices qui maintiennent le mouvement, conçu comme élan vital. / The concept of spiritual exercise, proposed by Hadot, refers to practices born in ancient Greece and prolonged in Christian meditations. Opposed to theoretical philosophy, they pursue the ambition of learning to act better and to know oneself. The thesis proposes an overview of this tradition which is associated with examining precise texts of various periods, in order to put into perspective the Montaigne Essays which reclaim this tradition by pursuing the project of defining an art of living. At the end of the sixteenth century, the trust that the ancients brought to reason is no longer applicable : can we still consider mastering ourselves or even knowing ourself ? The Christians believe this is possible, by having recourse to divine grace. The exercises that Montaigne proposes are strictly human and ordinary. Taking the example of an idealized figure of Socrates, also associated with that of the Indian cannibal, the author of the Essays intends to promote a more « naïve » and « primitive » relationship to oneself. It requires to do self-work that only naturalized exercises can achieve. The impulses of fantasy participate in the process in the same way as the work of reason, whereas the latter acquires the right to dream. He does not give up the idea of setting himself up as a master of himself, taking up the Stoic method of transforming the inevitable into a choice. At the moment when the Counter-Reformation requires repentance, spiritual exercises allow Montaigne to discover and assume what he is. And when Neo-Stoic treatises look for tranquillitas animi, he assumes the role of agitator, proposing exercises that maintain movement, conceived as vital impetus.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2018AIXM0727 |
Date | 18 December 2018 |
Creators | Tsakas, Aurélie |
Contributors | Aix-Marseille, Fanlo, Jean-Raymond |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
Page generated in 0.0018 seconds