La recherche scientifique est dans une période de transition. Les vagues de découvertes dont la plupart ont un fort impact potentiel économique et social ont été accompagnées par l'émergence de nouveaux modes de production de la science. Cependant, même si la recherche est une activité stratégique, elle demeure largement méconnue et les transformations récentes de la production scientifique accentuent le flou qui entoure cette activité. A une opposition simple entre science appliquée et science fondamentale, se substitue toute une gamme de catégories conçues pour rendre compte de la diversité et de l'imbrication des activités dans lesquelles chercheurs et ingénieurs sont engagés. Au-delà du modèle de la recherche académique et de celui de l'innovation, plusieurs modes de coopération et de fertilisation croisée entre la recherche universitaire et l'entreprise se conjuguent. Les modèles polaires sont la recherche universitaire et l'innovation dans l'industrie. Dans le premier modèle, la société délègue aux chercheurs la mission d'accroître le stock de connaissances disponibles et accessibles par tous. Au sein de la communauté académique, les modalités d'organisation, et plus particulièrement les règles de fonctionnement (Merton 1973; Dasgupta and David 1994) permettent une autorégulation des chercheurs. La compétition entre les chercheurs et la lutte pour la priorité des découvertes impose la divulgation des connaissances produites, ce qui permet de stimuler l'effort des scientifiques, de récompenser les meilleurs et de valider les connaissances produites. Sans contrôler le contenu de la recherche, la société peut intervenir par la seule fixation des règles pour s'assurer de la productivité et de la qualité du travail de recherche. Le second modèle est conçu pour gérer des projets destinés à concevoir de nouveaux produits, de nouveaux services et de nouveaux procédés de fabrication. Les chercheurs sont dans ce cas à l'écoute des utilisateurs de la technologie ou du service qui seuls valideront les développements effectués. Le projet d'innovation n'a d'autres ambitions que de les satisfaire. L'organisation de la recherche doit permettre ces liaisons avec l'environnement et doit rendre possible les réorientations nécessaires. Comme le remarquent Callon et al. (Callon, Larédo et al. 1995), ces deux modèles s'opposent terme à terme. Le premier s'inscrit dans une logique de l'autonomie de la communauté scientifique, le second est profondément ancré dans l'entreprise. Le premier requiert la divulgation de connaissances codifiées, publiées sous forme d'articles ou de livres, le second privilégie les savoirs tacites et locaux incorporés dans des dispositifs techniques destinés à être commercialisés. Cette opposition des principes de gestion des deux modèles d'organisation de la production scientifique et technique laisse la place à de nombreux modes d'organisation hybride qui permettent les transferts scientifiques et techniques. Les formes hybrides d'organisation permettent de mieux comprendre comment le développement conjoint d'innovations s'opère. Cependant, pour mieux saisir les mécanismes d'innovation que mobilisent différentes organisations (entreprises, laboratoires publics, ...), il est indispensable d'avoir une représentation adaptée de l'innovation.
Identifer | oai:union.ndltd.org:CCSD/oai:tel.archives-ouvertes.fr:tel-00471262 |
Date | 28 March 2000 |
Creators | Mangematin, Vincent |
Source Sets | CCSD theses-EN-ligne, France |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | habilitation ࠤiriger des recherches |
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