Un discours critique sur les systèmes scolaires publics contemporains dénonce la perte de vue d’idéaux pédagogiques transcendants, qui serait perceptible dans un renoncement à l’autorité de la tradition pédagogique et dans l’oubli de la vocation émancipatrice et réflexive de l’éducation. Partant des éléments de cette relation, instruction publique, autorité et idéaux pédagogiques transcendants, cette thèse interroge le sens qu’avait l’instruction publique québécoise pour ses concepteurs au moment de sa fondation. Inspirée de travaux de Durkheim et de Weber, elle compare les idéaux fondateurs de l’instruction publique québécoise avec un idéaltype de l’idéal pédagogique moderne, reconstitué à partir des réflexions sur l’éducation de Rousseau, Condorcet et Hegel. Cet idéal reprend de la philosophie moderne la valorisation d’une autonomie active, et du libéralisme occidental la confiance envers les bienfaits de la liberté questionnant toute autorité abusive. L’idéal de civilisation en progrès maintient toutefois l’autorité de la tradition pédagogique comme milieu d’accumulation de sagesse et source de réflexivité. Dans l’analyse des idéaux pédagogiques exprimés dans les projets et les lois scolaires de 1789 à 1875, et dans celle de la détermination de l’autorité pédagogique sensée les mettre en œuvre, cette comparaison avec l’idéaltype a mis en évidence la prédominance d’une préoccupation pour la société politique en formation, qui avait pour particularité la conscience de multiples attachements identitaires et de la distance aux métropoles européennes. Au fil des lois, la tolérance religieuse entre catholiques et protestants et l’acceptation des différences linguistiques entre francophones et anglophones ont été maintenues et ont abouti à une séparation étanche entre deux communautés culturelles instituée par les lois et les écoles. Malgré cette séparation progressive, ces lois enregistrèrent l’idéal de l’instruction publique commun aux libéraux francophones et anglophones en créant des écoles supérieures au niveau primaire qui contenaient des passerelles vers les collèges classiques. Cet idéal articulait les vocations utilitaire et intellectuelle universaliste de l’instruction publique, et revêtait pour les Canadiens français le sens d’une émancipation collective dans la société politique et vers la civilisation en progrès. Jusqu’à ce qu’elle soit laissée aux autorités confessionnelles, l’autorité pédagogique de l’État demeurait restreinte. / A critical discourse on the contemporary public school systems denounces the loss of transcendent teaching ideals, which would manifest itself in the weakening authority of the pedagogical tradition, and by gradually forgetting the emancipator and reflexive vocation of education. As a starting point for this thesis, three elements (public education, transcendent authority and teaching ideals) helped us understand the sense of the Québécois state education for its founders. Inspired by work of Émile Durkheim and Max Weber, we compare the original ideals of the Québécois state education with an ideal type of the modern teaching ideal, based on reflections from Rousseau, Condorcet and Hegel. This ideal supports both the valorization of an active human autonomy (in modern philosophy) and the trust in the benefits of human freedom (in western liberalism, questioning any abusive authority). The ideal of civilisation in constant evolution, however, maintains the authority of teaching’s tradition as an essential source of reflexivity, and thus for its role in acquiring wisdom. The analysis of the ideals expressed in school projects and laws from 1789 to 1875, and of the authority implementing them, highlighted the prevalence of a concern for the political society in development. This society was characterized by the awareness of multiple identity attachments and the distance with European metropolises. With each new law, the tolerance between Catholics and Protestants, and the acceptance of the linguistic differences between French-speaking and English-speaking people were maintained, leading to a tight separation between two cultural communities. In spite of this growing division, these laws enforced the ideal of the state education common to the French-speaking and English-speaking liberals by creating higher degree schools following elementary education, as a stepping-stone towards classical colleges. This ideal combined the utilitarian and universal intellectual vocations of public education. For the French Canadians, this was a mean of collective emancipation in the political society and towards the evolution of civilization. The teaching authority of the State remained quite limited until it was gradually granted to the religious authorities.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/26428 |
Date | 23 April 2018 |
Creators | Bédard, Mélanie |
Contributors | Lacombe, Sylvie |
Source Sets | Université Laval |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | thèse de doctorat, COAR1_1::Texte::Thèse::Thèse de doctorat |
Format | 1 ressource en ligne (xii, 374 pages), application/pdf |
Coverage | Québec (Province) |
Rights | http://purl.org/coar/access_right/c_abf2 |
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