La maladie d’Alzheimer affecte un nombre grandissant de personnes au Québec et ailleurs dans le monde. Les impacts de la maladie sur les personnes qui en sont atteintes et sur leurs proches sont nombreux et les couples qui y sont confrontés rencontrent des défis qui leur sont spécifiques. Le conjoint se voit investi d’un rôle d’aidant qu’il endosse « naturellement ». Ainsi, l’union passe d’un rapport conjugal à une relation aidant-aidé. Les identités conjugale et individuelles sont donc menacées par l’arrivée de la maladie. Or, l’offre de services publics tient peu compte des réalités conjugales et s’adresse essentiellement aux individus. Pourtant, le bonheur est lié à la satisfaction conjugale et les bénéfices psychosociaux que procure la vie en couple sont plus grands que les coûts qui lui sont associés. C’est dans ce contexte que ce projet de recherche doctorale a été élaboré. Il vise d’abord à concevoir et à documenter une intervention psychosociale en art-thérapie auprès des couples touchés par la maladie d’Alzheimer. Puis, dans un deuxième temps, il cherche à saisir en profondeur l’expérience des couples qui ont bénéficié d’une telle intervention. Finalement, le projet souhaite porter un regard réflexif sur une pratique d’intervention qui allie deux identités professionnelles; le travail social et l’art-thérapie. Les cinq couples de participants ont été recrutés par le biais d’organismes communautaires qui s’adressent aux aînés. Une rencontre pré-intervention a d’abord eu lieu. Puis, l’intervention, inspirée de l’approche par le processus en art-thérapie, s’est déroulée au domicile des couples et s’est échelonnée sur une période de 10 semaines. Pendant les rencontres d’une durée de 60 à 120 minutes, les couples étaient invités à créer, parfois individuellement, parfois conjointement. Un rapport détaillé de chaque séance a été rédigé, constituant ainsi des récits des démarches vécues par les couples. Tous les couples ont également été conviés à tenir un journal de bord entre les séances. Une entrevue postintervention a ensuite permis de recueillir le vécu et les perceptions des couples sur leur expérience. Le contenu de cette dernière entrevue réalisée avec chaque couple a été enregistré et retranscrit pour l’analyse. En somme, plus de 80 heures d’intervention et de rencontres ont été réalisées auprès des couples. À ce corpus de données s’ajoutent le contenu des journaux de bord complétés hebdomadairement par trois des couples participants ainsi que plus de 90 oeuvres créées par les couples tout au long des séances. Finalement, un groupe de pairs a partagé sa compréhension des expériences vécues par les couples et contribué à l’analyse. Les échanges avec ce groupe ont aussi été enregistrés et retranscrits. Toutes ces données ont été analysées selon la méthode d’analyse par questionnement analytique développée par Paillé et Mucchielli (2012). Les conclusions suggèrent que l’art-thérapie est une approche d’intervention favorable à la consolidation des unions conjugales qui font face à la maladie d’Alzheimer. Certains couples ont exprimé avoir ressenti du plaisir, s’être rapprochés, avoir développé une sensibilité à la réalité de l’autre et avoir pu donner un sens à leur situation. La recherche permet de soumettre des hypothèses sur les modalités optimales de l’art-thérapie auprès de cette population ; elle suggère notamment de maintenir un outil, journal de bord ou autre, qui permet aux couples de s’exprimer entre les rencontres. Quelques pièges à éviter ont aussi été identifiés. Par exemple, certains conjoints parlent de leur proche devant lui. L’intervenant a intérêt à prévoir des mécanismes pour éviter que cela se produise; une rencontre individuelle avec chaque partenaire avant le début de la démarche conjugale serait une solution à envisager. La recherche a permis aussi d’identifier huit fonctions à l’expression artistique dans un contexte d’intervention psychosociale en art-thérapie : ludique, apaisante, expressive, libératrice, stimulante, révélatrice, identitaire et transformatrice. De plus, la recherche suggère que l’expression artistique est un outil de médiation du lien conjugal qui est affecté par la maladie d’Alzheimer et ce, à plusieurs niveaux. Bien qu’elle facilite la gestion des conflits, la médiation dépasse le rôle de l’arbitrage pour devenir un outil qui permet d’aller à la rencontre de soi, de l’autre, d’un nous qui est re-solidarisé face à la maladie. Finalement, le regard réflexif porté sur la double identité professionnelle de l’intervenantechercheure, travailleuse sociale et art-thérapeute, s’ouvre sur la perspective d’une identité globale transcendante : celle d’une intervenante. / Alzheimer's disease touches a growing number of people in Quebec and around the world. Impacts of the disease on people affected and on their loved ones are numerous. Couples confronted with the disease also face specific challenges. The spouse becomes invested in a role of caregiver endorsed "naturally". Thus, the union goes from a marital relationship to a caregiver-patient relationship. Marital and individual identities are therefore threatened by the arrival of the disease. Yet, public services take very little account of marital realities and aim primarily at individuals. However, happiness is linked to marital satisfaction, and the psychosocial benefits of living in a relationship are greater than the costs associated with it. It is in this context that this doctoral research has been conducted. It aims in the first place at designing and documenting a psychosocial intervention in art therapy for couples affected by Alzheimer's disease. It then seeks to capture in depth the experience of the couples who benefited from such an intervention. Finally, the project wants to reflect on a practice of intervention that combines two professional identities; social work and art therapy. The five participating couples were recruited through community-based organizations that serve seniors. To start, a pre-intervention meeting was held. Then, the intervention, inspired by the process approach in art therapy, took place at the couples' homes and was spread out over a period of 10 weeks. During the 60 to 120 minutes meetings, couples were invited to create; sometimes individually, sometimes together. A detailed report of each session was compiled, thus representing the stories of each couple's approach. All couples were also invited to keep a logbook between sessions. A post-intervention interview then collected the experiences and perceptions of each couple. The content of this last interview was recorded and transcribed for analysis. In total, more than 80 hours of intervention and meetings were done with the couples. We can add to this corpus of data the contents of the diaries completed weekly by three of the participating couples, as well as more than 90 works of art created throughout the sessions. Finally, a peer group shared their understanding of the experiences lived by the couples and contributed to the analysis. Exchanges with this peer group have also been recorded and transcribed. All this data was analyzed according to the analysis method of Paillé and Mucchielli (2012). The findings suggest that art therapy is a type of intervention which is helpful in strengthening the marital unions for people who face Alzheimer's disease. Some couples expressed that they found pleasure in the process, got closer, developed a sensitivity to the reality of the other, and made sense of their situation. The research allows for theory proposals about optimal methods of art therapy with this population; it suggests among other things the use of a logbook, or any other type of diary, which allows couples to express themselves between meetings. Some pitfalls to avoid were also identified. For example, some spouses talk about their loved ones in front of them. The facilitator should then provide means to prevent this from happening; an individual meeting with each partner before the beginning of the process would be a solution to consider. The research also helped identify eight functions of the artistic expression in a context of psychosocial intervention in art therapy: playful, soothing, expressive, liberating, stimulating, revealing, identity affirming and transformative. In addition, research suggests that artistic expression, on several levels, is a mediating tool for people affected by Alzheimer's disease, helping their marital bond. Although it facilitates the management of conflicts, mediation goes beyond the role of arbitration to become a tool that allows us to meet the self, to meet the other, and an "us" that is re-united in the face of the disease. Finally, the reflection on the dual professional identity of the researcher, social worker and art therapist opens up to the perspective of a transcendent global identity: that of a practitioner. / Résumé en espagnol
Identifer | oai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/34500 |
Date | 18 April 2019 |
Creators | Couture, Nancy |
Contributors | Éthier, Sophie, Villeneuve, Patrick |
Source Sets | Université Laval |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | thèse de doctorat, COAR1_1::Texte::Thèse::Thèse de doctorat |
Format | 1 ressource en ligne (xviii, 329 pages), application/pdf |
Coverage | Québec (Province) |
Rights | http://purl.org/coar/access_right/c_abf2 |
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