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Points de vue de scientifiques qui agissent sur les plans sociopolitique, scientifique et/ou éducatif dans le contexte de questions scientifiques socialement vives environnementales ou sanitairesArseneau, Isabelle 22 April 2024 (has links)
Titre de l'écran-titre (visionné le 19 avril 2024) / Le développement chez les jeunes d'une alphabétisation technoscientifique critique qui invite à l'action semble aujourd'hui nécessaire considérant l'état du Monde. Nulle journée ne passe sans qu'il ne soit question, dans les médias ou à l'école, de la crise climatique, du déclin de la biodiversité ou de la contamination des sols, de l'air et de l'eau. Ces questions scientifiques socialement vives (QSSV) se retrouvent d'ailleurs dans les programmes québécois de formation générale en sciences au secondaire et au collégial. Elles ont été conceptualisées dans le champ de l'éducation aux sciences, mais également dans celui des *science studies*, qui s'est attardé à comprendre l'apport des scientifiques et des citoyen.ne.s dans la gestion de ces questions porteuses de risques, d'incertitudes et d'enjeux sociopolitiques. Si des recherches nous informent quant aux façons dont les élèves s'approprient ces questions et se représentent les scientifiques, peu de travaux se sont attardés à détailler les points de vue de scientifiques qui agissent dans ces contextes en prenant la parole, en accompagnant des citoyen.ne.s ou en participant à la constitution des savoirs. Cette étude de cas multiples documente de tels points de vue. Des entretiens semi-dirigés ont été menés auprès de 10 scientifiques agissant dans le contexte de QSSV environnementales ou sanitaires. L'analyse thématique réalisée permet d'étayer leurs points de vue selon trois axes de questionnement, qui concernent leurs actions, les rôles, capacités et incapacités des citoyen.ne.s et des scientifiques dans la gestion des QSSV ainsi que l'enseignement de ces questions. Ces points de vue sont éclairés par les modèles théoriques de l'expertise (standard, procédural, forum hybride) et d'interactions entre scientifiques et citoyen.ne.s (déficit, débat public, co-production de savoirs) ainsi que par la notion de rapport au savoir. Cela nous mène à présenter des portraits de scientifiques authentiques et pertinents pour l'enseignement des sciences, qui contribuent à éclairer la participation des scientifiques aux affaires sociétales dans le contexte de QSSV. Une analyse intercas permet ensuite de discuter du type d'actions menées par les scientifiques, des motivations qui les poussent à agir, de ce qui facilite et freine ces actions ainsi que des manières dont les scientifiques composent avec les tensions et les dilemmes rencontrés. Il en ressort des rapports au savoir et à l'action caractérisés par un sentiment de responsabilité personnelle et professionnelle à l'égard de la société (rapport à soi), par des interactions fécondes avec les citoyen.ne.s concerné.e.s (rapport aux autres) ainsi que par une conception des scientifiques comme acteurs.trices de changements sociaux et de la production des savoirs comme acte politique (rapport au monde). L'analyse intercas met également en lumière que dans le contexte des QSSV, les interactions entre les citoyen.ne.s concerné.e.s et les scientifiques interrogé.e.s ne correspondent pas au modèle du déficit, voire que ces derniers.ères le considèrent limitant ou contre-productif. Ils.elles entretiennent en effet une conception de l'expertise qui tend vers une démocratisation, en soutenant que dans le contexte des QSSV, l'évaluation des risques et la prise de décisions devraient laisser une large place à la participation des citoyen.ne.s, à qui ils.elles reconnaissent la capacité d'élaborer des savoirs pertinents, de cadrer les problèmes, d'enrichir les arguments scientifiques et de devenir eux-mêmes expert.e.s des situations. Les scientifiques interrogé.e.s envisagent ainsi une formation générale et spécialisée en sciences de manière plus politisée et interdisciplinaire, qui reconnaît et valorise la capacité des citoyen.ne.s à enrichir la gestion sociopolitique des QSSV. Dans le contexte où des questions environnementales et sanitaires se posent quotidiennement dans les médias et dans les classes, il apparaît dès lors nécessaire de discuter des rôles que peuvent jouer les scientifiques et les citoyen.ne.s dans la gestion sociopolitique de ces questions, notamment en amenant les élèves à rencontrer des scientifiques et des citoyen.ne.s dont les actions contribuent à construire un monde plus juste et plus sain. Les jeunes et futur.e.s scientifiques pourraient ainsi en venir à développer un rapport plus émancipé aux savoirs et aux expert.e.s scientifiques, mais également un rapport à l'action qui reconnaît la capacité aux citoyen.ne.s et aux scientifiques de pouvoir changer les choses. / The development of a critical techno-scientific literacy among young people that encourages action seems necessary today, considering the state of the world. Not a day goes by without the media or schools addressing issues such as the climate crisis, biodiversity decline, or soil, air, and water contamination. These scientific socially acute questions (SSAQ) are also found in the Quebec programs for general science education in secondary and college levels. They have been conceptualized in the field of science education and science studies, which focus on understanding the contributions of scientists and citizens in managing these issues that carry risks, uncertainties, and socio-political stakes. While research informs us about how students engage with these questions and perceive scientists, few studies have detailed the perspectives of scientists who act in these contexts by speaking out, supporting citizens, or participating in knowledge building. This multiple case study documents such perspectives through semi-structured interviews with ten scientists engaged in environmental or health-related SSAQ contexts. Thematic analysis reveals their viewpoints across three lines of inquiry: their actions, the roles, capacities, and incapacities of citizens and scientists in managing SSAQ, and the teaching of these questions. These perspectives are illuminated by theoretical models of expertise (standard, procedural, hybrid forum) and interactions between scientists and citizens (deficit model, public debate, co-production of knowledge), as well as by the notion of the relationship to knowledge. This leads to the presentation of authentic and relevant portraits of scientists for science education, shedding light on their participation in societal affairs within the context of SSAQ. An inter-case analysis then discusses the types of actions taken by scientists, their motivations, what facilitates and hinders these actions, and how they navigate the encountered tensions and dilemmas. The findings highlight relationships with knowledge and action characterized by a sense of personal and professional responsibility towards society (relationship to oneself), fruitful interactions with concerned citizens (relationship to others), and a conception of scientists as actors of social change and knowledge production as a political act (relationship to the world). The inter-case analysis also reveals that in the context of SSAQ, interactions between the interviewed citizens and scientists do not correspond to the deficit model. Rather, they consider it limiting or counterproductive. They embrace a view of expertise that leans towards democratization, arguing that in the context of SSAQ, risk assessment and decision-making should heavily involve citizen participation. They recognize citizens' capacity to develop relevant knowledge, frame problems, enrich scientific arguments, and become experts in their own situations. As a result, the interviewed scientists envision a more politicized and interdisciplinary general and specialized science education, one that acknowledges and values citizens' ability to enhance the socio-political management of SSAQ. In a context where environmental and health-related questions arise daily in the media and classrooms, it becomes necessary to discuss about the roles that scientists and citizens can play in the socio-political management of these issues, particularly by encouraging students to meet scientists and citizens whose actions contribute to building a fairer and healthier world. Therefore, young people and future scientists may develop a more emancipated relationship with knowledge and scientific experts, as well as a relationship to action that recognizes the capacity of citizens and scientists to make social changes.
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