Tenue à Rome du 10 avril au 8 m ai 1994, l’Assem blée spéciale pour l’Afrique du synode des évêques a été un m om ent favorable qui a perm is aux Pères synodaux de faire le bilan de l’œuvre évangélisatrice en Afrique au seuil du troisièm e millénaire. D ans ce présent travail, nous som m es revenus sur l’histoire récente de Pévangêlisation en Afrique et sur la dynamique qui avait conduit à la convocation et à la célébration d’une telle rencontre. Nous avons essayé de faire ressortir les enjeux, de dégager les m éthodes d’évangélisation et les « théologies » qui ont été développées au cours de cette période d’avant et après Vatican II. En situant par la suite l’essentiel de notre travail dans les grands débats qui ont entouré le Synode pour l’Afrique, notre deuxièm e préoccupation a été d’analyser 1 Exhortation apostolique post-synodale E cdesia in Africa. Nous avons pu faire ressortir les avancées et les reculs d’un tel docum ent par rapport aux autres docum ents du Synode. Enfin, nous avons essayer de préciser le projet qui émerge de l’Exhortation : ÉgliseFamille de Dieu. L’enjeu a été de montrer la pertinence d’un tel projet avant de proposer les bases théologiques qui le fonde et les orientations pratiques qu’il suscite.

La présente recherche analyse l'œuvre passée, présente et future de l'Église méthodiste parmi les Tetela du Zaïre Central, population évangélisée par la Mission méthodiste américaine de 1914 à 1960 (1964). Fondamentalement, la thèse poursuit deux groupes d'objectifs. Le premier est d'analyser l'impact du christianisme dans la culture et dans la société tetela. Le second est de proposer un modèle d'Église aux populations du Zaïre tout entier et du reste de l'Afrique. Le principe fondamental qui a guidé l'étude est le suivant : l'enracinement de la foi chrétienne dans la vie quotidienne d'un peuple se réalise de manière suffisante si le mariage d'amour et de respect mutuel a effectivement eu lieu entre l'Évangile et la culture locale. À la lumière de ce principe, nous avons formulé l'hypothèse suivante : Pour avoir refusé toute référence à la culture locale, pour n'avoir pas assuré l'intégration effective de la population évangélisée dans l'entreprise de fonder une Église parmi les Tetela, la Mission méthodiste a d'emblée manqué une occasion exceptionnelle d'enraciner l'Évangile au Zaïre Central. Deux modèles d'action missionnaire ont, à cet égard, servi de cadre de référence à notre recherche, à savoir : la mission accomplie par le Seigneur Jésus-Christ lui-même au cours de son ministère terrestre et l'œuvre missionnaire réalisée par l'apôtre Paul. Trois traits caractérisant ce dernier modèle ont particulièrement attiré notre attention, notamment les efforts déployés par "l'apôtre des païens" en vue de concrétiser le caractère universaliste de l 'Évangile la dimension inaugurée par le Seigneur Jésus-Christ), le recours constamment fait à ce qui est connu par ses auditeurs pour annoncer l 'Évangile et le climat de respect et de confiance que Paul instaura entre lui et les populations évangélisées. Dans cet ordre d'idées, nous avons analysé les principaux concepts courants en missiologie, entre autres la culture, l'acculturation, la déculturation, 1 'inculturation et la contextualisation. Parmi ces concepts, nous avons constaté que la contextualisation permet de réaliser les modèles christologique et paulinien. Nous avons également montré l'inadéquation de quelques concepts dans l'entreprise missionnaire, en l'occurrence l'indigénisation, l'adaptation et l'assimilation. L'analyse de la situation a, en effet, montré qu'en se servant de ces concepts, quelques Missions chrétiennes ont réduit la chance q u 'avaient des nouveaux convertis de s'épanouir dans la foi. C'est dans ce contexte que le concept de syncrétisme a été analysé en tant que résultat d'une œuvre d'inculturation manquée. Quatre sources ont permis de réunir les données de la thèse : l'observation participante, l'analyse de documents, l'interview et l'enquête par questionnaires. Les résultats obtenus ont été résumés en quatre points : a) Deux périodes symbolisent les deux attitudes manifestées par la Mission méthodiste au Zaïre Central. La première, de 1914 à 1939, est caractérisée par un conflit chez les missionnaires et la Société des Missions relativement au désir d'intégrer ou d'exclure le peuple évangélisé de la démarche conduisant à la fondation de l 'Église. Au cours de la seconde période, de 1940 à 1959 (1964), la volonté d'intégration s'est accrue, mais les mesures pratiques ont été freinées par des préjugés d'ordre culturel. b) La Mission n'a pas envisagé la possibilité de favoriser un quelconque dialogue entre l'Évangile et la culture locale. Avant leur arrivée au Congo, les missionnaires étaient convaincus qu'ils allaient travailler dans un terrain vierge. c) Les relations personnelles entre les missionnaires et la population locale étaient placées sous le signe d'un rapport entre propriétaire et nécessiteux. d) La destruction injustifiée de la quasi-totalité des valeurs culturelles et sociales tetela par la Mission a provoqué une transformation aliénante de la vie et de la vision du monde chez les Tetela. Les conséquences de cet état de choses sont multiples. Nous en avons retenu quatre : a) Le nouveau chrétien est non seulement placé devant deux Dieux, celui de ses ancêtres et celui annoncé par la Mission, mais aussi se sent incapable de découvrir un quelconque lien entre les deux. b) Qualifiant ses ancêtres de "Saints inconnus" tout en aspirant à la vie nouvelle, ce chrétien finit par afficher une attitude ambiguë vis-à-vis l'Évangile. c) Pour plaire aux missionnaires et aux membres du clergé, il a dû cultiver des sentiments d'hypocrisie et de dépendance. ; d) Tenant l'Évangile d'une main et les coutumes ancestrales de l'autre, le chrétien tetela finit par professer une foi chancelante. La page de la Mission étrangère étant tournée, force nous est de proposer aux peuples du Zaïre Central un modèle d'Église capable de réaliser un enracinement volontaire de l'Évangile dans cette région. Ce modèle a, entre autres, trois missions de base à remplir, à savoir : a) instaurer un dialogue officiel entre l 'Évangile et les cultures locales, b) assurer, dans l'œcuménisme, sa souveraineté administrative, financière et missionnaire, c) assurer son avenir afin de faire face aux vents et marées du monde changeant. À ce sujet, deux importantes références ont été faites, la première à la théologie de 1'africanisation du christianisme, que nous croyons être l'approche idéale pour contextualiser l'Évangile en Afrique et, la deuxième aux mouvements de recouvrement de l'identité africaine, notamment la Négritude. Cette dernière partie de la thèse a pour but de montrer aux Tetela et aux autres peuples tant zaïrois qu'africains que le christianisme peut être un projet respectueux de l'intégrité de la culture africaine. De ce fait, il leur revient de se sentir responsables de leur Église afin que celle-ci puisse répondre au principe suivant de sa mission : "Là où est le peuple, là doit être l'Église". Seule une telle Église peut répondre aux attentes des populations africaines qui, actuellement, s'efforcent de remonter la glissante pente vers la modernisation de leurs sociétés.