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Regard sur la femme médiévale : la délinquance féminine à Manosque au tournant du XIVe siècleCourtemanche, Andrée 25 April 2018 (has links)
La recherche de la condition féminine de la Manosquine du tournant au XIVe siècle nécessite l'utilisation d'une documentation permettant de cerner la vie de la femme à travers les divers rites de passage et les actes de la vie quotidienne. Les procès criminels colligés pour la période de 1280 à 1330 permettent de suivre le cheminement féminin ainsi que de dresser un tableau évolutif de leurs conduites délictuelles. L'analyse de ce dernier aspect des agissements féminins doit être précédée d'un examen des différents rôles joués par les femmes au cours du processus judiciaire soit accusée, dénonciatrice, témoin, experte et garante. Les deux derniers attirent plus particulièrement l'attention dans le cadre d'une étude sur la condition féminine. Ils montrent que des femmes exercent un métier ou une activité professionnelle (tisserande, sage-femme) dans lequel elles ont acquis une certaine notoriété ou qu'elles sont propriétaires de biens qu'elles semblent administrer elles-mêmes et qu'elles peuvent engager pour aider autrui. L'évolution des comportements délictuels des Manosquines se révèle conforme à l'image traditionnelle de la criminalité des sociétés pré-industrielles où dominent très nettement les agressions contre les personnes. En effet, pour l'ensemble de la période étudiée, la violence occupe une large place de la criminalité mais légèrement décroissante. Une augmentation sensible des agressions physiques au détriment des injures marque la décennie 1320-1330. A ce déclin de la violence s'oppose une progression assez nette de la délinquance économique au seuil de la même période. Ce fait s'expliquerait par la dégradation des conditions économiques générales. Ces diverses statistiques s'inscrivent au sein d'une seconde lecture qu'autorisent les procès criminels. Au-delà des attitudes de délinquance qu'ils relatent, ces textes rapportent maints comportements quotidiens des femmes. Une analyse de type ethnologique fournit de nouvelles questions qui éclairent la vie féminine et permet de remettre en question la vision traditionnelle de la femme bien que le thème retenu pour suivre le cheminement des femmes soit l'institution matrimoniale. De l'enfance de ces fillettes, peu de détails percent si ce n'est le fait que leur éducation soit confiée à leur mère jusqu'à leur mariage qui est le but à atteindre. La qualité fondamentale requise pour nouer une union satisfaisante est la conservation de la bonne renommée et la jeune fille demeure tributaire de la vision manichéenne que manifeste la société à son égard, elle ne peut être que pure ou publique et le pas semble pouvoir se franchir aisément. A celles qui n'ont pu ou su conserver leur honneur, la chasteté, s'ouvrent souvent les portes du lupanar local où s'exerce l'amour mercenaire. L'union conclue, la reconnaissance de ce passage dans le monde des adultes se concrétise par la naissance d'une nombreuse progéniture. Le mariage marque aussi pour la femme son entrée dans une demeure dont elle devient la maitresse. L’accomplissement des nombreuses tâches domestiques est sous sa responsabilité. Ces multiples travaux se doublant parfois d'un emploi salarié qui est le prolongement naturel de certaines tâches accomplies pour le bien-être familial comme le filage et le tissage ou le travail de la terre. De nombreuses femme louent leur force de travail lors des moissons et des vendanges. D'autres sont propriétaires d'un négoce, taverne ou poissonnerie. Quelques-unes y ajoutent un aspect plus lucratif: le prêt sur gage exercé tant par des chrétiennes que des juives. L'âge et le fait d'avoir complété un cycle biologique complet sont les qualités requises de certaines femmes pour pouvoir être sage-femmes ou matrones. Cependant, la majeure partie des mentions d'activités "professionnelles" recensées touche à la domesticité. Ces servantes paraissent être des célibataires, sans attache, qui exercent ce métier dans l'attente d'un mariage peu probable. Tous ces travaux délimitent une aire de circulation féminine et surtout des lieux de socialisation et de sociabilité. En effet, ils servent de lieux de formation pour les jeunes filles mais aussi c'est là que seront jaugées ses capacités et sa renommée lorsque sera venu le temps de rechercher un conjoint. Toute la communauté féminine participe à ces deux étapes de la vie ces jeunes femmes. Le veuvage, dernière étape de la vie féminine que toutes ne peuvent vivre, est marqué du sceau de l'ambiguïté. Le décès du conjoint permet à certaines femmes d'accéder à un statut plus autonome où elles prennent en main les destinées familiales. D'autres doivent se résigner à l'indigence à laquelle les condamne l'impécuniosité du ménage ou des moyens de subsistance d'une veuve chargée de bouches à nourrir. Le remariage est une solution pour les plus jeunes, la mort délivrera les moins chanceuses. / Québec Université Laval, Bibliothèque 2012
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Femmes, solitude et société à Manosque au XIVe siècle (1314-1358)Guénette, Maryse 25 April 2018 (has links)
L'utilisation en détail d'archives judiciaires conservées pour la ville de Manosque de la première moitié du XIV siècle n'a pas servi ici à une étude sur la justice canne technique de répression. Bien sûr, le but premier de cette documentation est de retracer et de mémoriser les comportements criminels en les rendant publics, permettant ainsi de déceler et de quantifier plus ou moins facilement les valeurs et variables délictuelles. Mais au-delà de cette lecture classique, les archives criminelles offrent la possibilité de cerner certains phénomènes particuliers. La solitude féminine en est un; à travers la diversité des situations où elle se vit, elle fournit une approche problématique éclairante à" l'étude d'une société en relation avec les conditions qu'elle génère. Si certains principes sont globalement acceptés par la collectivité manosquine, celui de la solitude au féminin est pour sa part dénoncé et rejeté. Il ne peut être admis, car vivant seules, ces femmes n'entrent pas dans les normes reconnues; non seulement elles ne sont pas mariées, mais elles ne présentent pas cette nécessaire référence masculine. Elles n'ont d'autre garantie à offrir que leur solitude. Cette dernière devient alors le pôle central de leur existence, l'élément autour duquel s'articulent et s'expliquent les différentes attitudes adoptées par la collectivité à leur égard. Puisqu'elles ne se conforment pas aux modèles établis, les femmes seules sont marginalisées; les mécanismes et les conditions de cette marginalisation apparaissent au fil des documents. La collectivité met en place un processus de désignation, basé essentiellement sur des critères négatifs; corme ces femmes ne peuvent fournir de référence officielle, c'est leur solitude qui servira à les désigner. En les identifiant comme "femmes sans homme", non seulement on publicise leur état, mais on rend également officielle leur non intégration au réseau habituel des solidarités, ce qui a pour conséquence de les exposer plus facilement à la violence puisqu'elles ne sont pas protégées. Par leur mode de vie, les femmes seules se sont exclues des mécanismes fonctionnels de la communauté, justifiant par là-même les attitudes d'exclusion adoptées par la collectivité. Leur sociabilité apparait vécue à deux niveaux: tout d’abord, celui de la collectivité où elles vivent, mais aussi et surtout du fait de leur état; c’est leur solitude qui explique les conditions dans lesquelles se déroule leur vie. Bien sûr, la question de l’honneur sexuel est importante, mais elle n’apparait pas fondamentale. Plus que de défendre leur réputation il est important pour les femmes seules d’assurer leur subsistance et leur protection. La solitude explique ici encore leur délinquance; en les confinant à la pauvreté, elle fait des délits économiques la principale composante de cette délinquance. Elle les oblige également à assurer seules leur défense, et le nombre d’accusations d'agressions, tant physiques que verbales, portées centre ces femmes montre bien le besoin qu’elles ont de se protéger, d’autant plus qu’elles sont très souvent la cible de violences physiques plus ou moins graves. Les conditions de vie auxquelles font face les femmes seules les poussent souvent à changer de lieu de résidence, et de fait une population flottante assez importante, constituée d’étrangères, de vagabondes et de prostituées, est présente à Manosque dans les années retenues. L’errance apparait alors comme un mode de vie consécutif à la Solitude et à la pauvreté; il n’est pas choisi par les femmes seules, mais généralement imposé par les attitudes collectives adoptées à l’égard de ces déméres. Ces femmes éveillent d’autant plus la méfiance qu’elles mêlent l’embauche temporaire et la prostitution au vagabondage, au gré des circonstances; elles ne sont pas enracinées dans un milieu fixe. L’espace urbain dans lequel s'insèrent les femmes seules génère une sociabilité à la mesure de ses habitants; ce sont les habitudes de vie qu’ils se créent, les valeurs qu’ils se reconnaissent et les structures collectives qu’ils se donnent qui déterminent les conditions de leur existence sociale. Plus encore que de leur propre perception, l’existence des femmes seules dépend des attitudes pratiques et mentales de leur entourage. Se plaçant à l’extérieur de l’espace social normatif admis par le groupe, les femmes seules rompent le "contrat implicite" qui les lie à la communauté et sont ainsi reconnues isolées par leur différence. Elles sont acceptées au sein de la collectivité, à condition toutefois qu’elles ne réclament pas une reconnaissance morale et qu’elles acceptent de voir leur différence publicisée. En ce qui les concerne, il ne saurait être question d’une quelconque égalité sociale. / Québec Université Laval, Bibliothèque 2013
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