Cet essai est le fruit de plusieurs années de recherche pluridimensionnelle et interdisciplinaire sur le thème: Espace urbain, Perception et Aménagement. Il constitue l'aboutissement d’une réflexion constante sur la nature des rapports que l’être humain entretient avec l’environnement .Si nous avons privilégié l'univers urbain comme objet d'étude c'est en fonction de plusieurs raisons. D’abord, parce que la ville est devenue le mode majeur de regroupement de la population, parce que c'est en son sein que les orientations politiques et économiques de nos sociétés se dessinent et finalement, parce qu'elle constitue dans les faits un espace riche et fécond d'interactions humaines. Et c’est de là que sont nées cette préoccupation et cette nécessité de mieux comprendre les attitudes et les comportements des citadins envers cet environnement urbain prédominant et de plus en plus complexe. A l'origine de ce processus de relations-décisions en milieu urbain, le phénomène de la perception urbaine nous est apparu fondamental; mais les études qui se sont penchées sur le sujet, bien que constituant une base de réflexion solide, n’ont pas suffisamment abordé selon nous, le rôle des perceptions dans la création-production d'espaces urbains. Ainsi, notre recherche s'élabore autour de cette problématique de plus en plus pertinente en géographie sociale et environnementale, à savoir comment les perceptions interfèrent sur les attitudes et les comportements des individus et des groupes en milieu urbain. Le fait d'aborder la ville primordialement comme un phénomène socioéconomique selon une affiliation non-dogmatique à la pensée matérialiste de l'histoire, nous a poussé très tôt à remettre en question certains cadres d’analyse traditionnels du mécanisme des perceptions urbaines. Nous pensons ici aux cadres de la psychologie "behaviorale" et "gestaltique". Si nous utilisons l'approche marxiste, ce sera avant tout comme une médiation, comme un outil intellectuel, comme un instrument d'analyse sociale, utile pour la compréhension de la réalité sociale urbaine dans laquelle s’inscrivent les perceptions urbaines. Par cette approche néomarxiste, qu'on peut qualifier sommairement ici, d'humaniste, de pluraliste et de moins mécaniste que l'approche orthodoxe, nous voulons explorer un terrain encore vierge dans la connaissance du processus des perceptions urbaines, c'est-à-dire celui de son univers politique. Dès lors, cette recherche sur la dimension politique des perceptions urbaines ne pouvait être conçue qu’en s’intégrant à une analyse socioéconomique de la ville en relation avec le pouvoir. L'espace, particulièrement urbain, est loin d’être neutre et apolitique. Le concept d'espace dominant reste central à toute problématique société-espace-individu. Il convenait de la préciser une fois de plus pour ceux qui en douteraient encore. Parallèlement et conjointement à cette recherche, des expériences personnelles et professionnelles à travers l'enseignement régulier en sciences humaines et sociales, l'expérimentation cinématographique et audio-visuelle, l’implication active dans des groupes populaires et sociaux sont venus constamment enrichir cette réflexion théorique sur l'urbain.Sans ces expériences, la théorie se serait vite appauvrie. Tout comme certaines dimensions de cet essai sont redevables indirectement à la connaissance issue de nombreux voyages d'études et d’expérimentations sociales en Europe, en URSS, au Moyen-Orient, en Asie et en Amérique Latine. C’est à travers et par ces voyages que nous avons pu saisir concrètement l'articulation des mécanismes politico-économiques qui déterminent autant les réalités internationales, nationales que locales, tout en nous insufflant ce nécessaire relativisme culturel propre à toute révocation ethnocentriste ou "occidentriste". Cet essai surgit donc au carrefour de ces influences et de ces expériences interdisciplinaires.