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Mouvements annuels, reproduction et compétition alimentaire chez un prédateur aviaire de la toundra, le labbe à longue queueSeyer, Yannick 13 December 2023 (has links)
La migration représente un déplacement saisonnier récurrent entre un site de reproduction et un site d'hivernage géographiquement distants. Les migrateurs profitent ainsi d'un environnement saisonnier où les conditions sont favorables à la reproduction avec des ressources abondantes et une réduction de la compétition et de la prédation. En contrepartie, migrer implique des contraintes phénologiques, en plus d'exposer les individus à une plus grande diversité d'environnements lors des déplacements. Il est toutefois difficile d'établir des liens entre les conditions rencontrées durant la période nonreproductrice et leurs répercussions sur la reproduction chez les migrateurs. L'objectif général de cette thèse est de mieux comprendre les principales étapes du cycle annuel et leurs interrelations chez le labbe à longue queue, un oiseau marin migrateur de longue distance exploitant la toundra arctique en été et les mers australes en hiver. Cette thèse se décompose en trois objectifs spécifiques : (1) examiner les mouvements annuels de cet abondant prédateur de la toundra arctique en décrivant sa migration transéquatoriale, sa phénologie et ses stratégies migratoires saisonnières; (2) évaluer les relations entre les périodes non-reproductrice et reproductrice via de possibles effets reportés réciproques, ainsi que les impacts directs de la disponibilité de sa principale source de nourriture estivale, les lemmings, sur sa reproduction; (3) étudier les mécanismes permettant la coexistence du labbe au sein d'une guilde de prédateurs aviaires partageant deux espèces de lemmings dont les populations fluctuent annuellement. De 2004 à 2019, la reproduction du labbe a été suivie sur l'Île Bylot (Nunavut) dans le Haut-Arctique canadien pour en estimer la phénologie et le succès. Parallèlement, les nids des principaux prédateurs aviaires présents dans la zone d'étude (harfang des neiges, goéland bourgmestre, buse pattue, labbe à longue queue) ont été géoréférencés et des pelotes de régurgitations récupérées afin d'identifier les proies consommées. De 2014 à 2019, 70 géolocalisateurs ont été déployés sur des labbes pour suivre leurs déplacements pendant une année entière. Les géolocalisateurs ont révélé que les labbes parcourent annuellement >32 000 km. Durant la période non-reproductrice, ils hivernent majoritairement dans la région d'upwelling du Benguela de l'Atlantique Sud et ils effectuent une halte migratoire printanière et automnale au large des Grands Bancs de Terre-Neuve, des régions océaniques hautement productives. Contrairement à la majorité des oiseaux, la migration d'automne est plus rapide que celle du printemps. Cette stratégie s'explique probablement par des contraintes écologiques au printemps ralentissant la progression vers l'Arctique, comme la présence de la banquise et la toundra enneigée, et des contraintes endogènes à l'automne incitant les individus à arriver rapidement au site d'hivernage pour amorcer la mue. Nous avons trouvé peu d'effets reportés de la période d'hivernage et de la migration printanière sur la reproduction. Toutefois, une réduction du temps en vol en hiver augmente la propension à nicher, alors qu'une arrivée trop hâtive au printemps la diminue. En revanche, une forte abondance de lemmings en été augmente la propension à nicher et le succès reproducteur, alors que pondre tardivement diminue celui-ci. Globalement, les conditions locales influencent fortement la reproduction, alors que les effets reportés ont un effet plutôt faible. Durant l'été, deux mécanismes permettent la coexistence de la guilde de prédateurs aviaires à laquelle le labbe appartient. D'abord, une ségrégation spatiale de l'habitat basée sur les préférences spécifiques réduit le chevauchement des territoires de nidification entre espèces. Ensuite, une ségrégation alimentaire dans les espèces et la taille des lemmings en fonction de la taille des prédateurs qui les consomment réduit le chevauchement des niches alimentaires. En l'absence du prédateur dominant, le harfang, un relâchement de la pression de compétition s'opère néanmoins sur le labbe, le plus petit prédateur, qui déplace sa niche alimentaire en consommant des proies plus grosses. Ces résultats suggèrent que les conditions variables et imprévisibles de l'Arctique comme les couvertures de neige et de glace, ainsi que l'abondance de lemmings influencent fortement le cycle annuel du labbe à longue queue et affectent davantage le succès reproducteur que la variabilité émanant de la période non-reproductrice. Cette thèse améliore notre compréhension des stratégies migratoires aviaires et du rôle de la compétition interspécifique dans un environnement caractérisé par une ressource pulsée, les lemmings. / Migration represents a recurring seasonal movement between geographically distant breeding and wintering sites. Migrants thus benefit from a seasonal environment where conditions are favourable to reproduce with abundant resources, and low competition and predation. However, migrating involves phenological constraints, and exposes individuals to a greater diversity of environments. Nevertheless, it is difficult to establish links between conditions encountered during the non-breeding period and their impact on reproduction in migrants. The overall objective of this thesis is to better understand the main stages of the annual cycle and their interrelationships in the long-tailed jaeger, a long-distance migratory seabird exploiting the Arctic tundra in summer and the southern seas in winter. This thesis consists of three specific objectives: (1) examine the annual movements of this abundant Arctic tundra predator by describing its transequatorial migration, phenology and seasonal migratory strategies; (2) assess the relationships between non-breeding and breeding periods through potential reciprocal carry-over effects, as well as the direct impacts of the availability of its main food resource in summer, lemmings, on its reproduction; (3) investigate the mechanisms allowing coexistence of the jaeger within a guild of avian predators sharing two species of lemmings whose populations fluctuate annually. From 2004 to 2019, reproduction of jaegers was monitored on Bylot Island, Nunavut, in the Canadian High Arctic to estimate its phenology and success. Also, nests of the main avian predators present in the study area (snowy owl, glaucous gull, rough-legged hawk, long-tailed jaeger) were georeferenced and regurgitation pellets collected to identify the prey consumed. From 2014 to 2019, 70 geolocators were deployed on jaegers to track their movements throughout an entire year. Geolocators showed that jaegers travel >32 000 km annually. During the non-breeding period, they winter mostly in the Benguela upwelling region of the South Atlantic and they make a stopover off the Grand Banks of Newfoundland in spring and in fall, both highly productive oceanic regions. Unlike most birds, fall migration is faster than spring migration. This strategy is likely due to ecological constraints during the spring that slow progression towards the Arctic, such as the presence of sea-ice and the snow cover in the tundra, and endogenous constraints in the fall, prompting individuals to quickly arrive at the wintering site to start molting. We found few carry-over effects of the wintering period and spring migration on reproduction. However, reducing time spent flying during the winter increases breeding propensity, while arriving too early in spring has the opposite effect. Conversely, high lemming abundance during the summer increases breeding propensity and breeding success, while laying late decreases the latter. Overall, reproduction is strongly influenced by local conditions and weakly influenced by carry-over effects. During the summer, two mechanisms allow the coexistence of the guild of avian predators to which jaegers belongs. First, spatial segregation of habitat based on species-specific preferences reduces overlap of nesting territories between species. Second, food segregation based on lemming species and size according to the size of predators that consume them reduces the overlap of food niches. The absence of the dominant predator, the snowy owl, nonetheless triggers a competitive release on the smallest one, the jaeger, which shifts its food niche by consuming larger prey. These results suggest that variable and unpredictable conditions in the Arctic as snow and ice covers, and lemming abundance strongly influence the annual cycle of the long-tailed jaeger and influence reproductive performance more than the variability encountered during the non-breeding period. This thesis improves our understanding of bird migratory strategies and the role of interspecific competition in an environment characterized by a pulsed resource, lemmings.
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Écologie alimentaire et dynamique de populations du labbe à longue queue (Stercorarius longicaudus) à Alert, Île d'Ellesmere, NunavutJulien, Jean-Rémi 18 April 2018 (has links)
Les échanges d'énergie et de nutriments entre écosystèmes sont des processus fondamentaux dans la dynamique et la stabilité des réseaux trophiques, mais leurs rôles demeurent peu connus. Dans ce contexte, nous avons tenté d'évaluer l'impact d'une source de nutriments allochtones d'origine anthropique sur une population de prédateurs aviaires. Notre aire d'étude est située à Alert (83° N, 62° W), île d'Ellesmere, où le rejet des eaux usées de la station militaire fournit une nourriture relativement stable pour le labbe à longue queue (Stercorarius longicaudus). Nous avons utilisé la technique d'analyse des isotopes stables ([delta]¹³C et [delta]¹⁵N) pour caractériser le régime alimentaire de cette population et évaluer la contribution de cette source de nourriture anthropique. Nous avons aussi mesuré certains paramètres reproducteurs afin d'évaluer l'impact de cette source de nourriture anthropique sur ceux-ci. Nous avons découvert que la nourriture acquise au rejet des eaux usées représente une part significative du régime alimentaire des labbes et que sa contribution est plus élevée lors d'une année de faible abondance en lemming comparativement à une année de forte abondance pour les individus reproducteurs. Également, la densité de nids de labbes lors d'une année de faible abondance en lemmings à Alert était plus élevée qu'à d'autres sites comparables sans source de nourriture d'origine humaine. Ces résultats suggèrent que l'utilisation d'une ressource allochtone d'origine anthropique représente un subside qui soutient la population de labbes à ce site. Un objectif secondaire était d'estimer la survie apparente du labbe à longue queue et d'examiner l'effet des variations annuelles des lemmings sur le taux de survie. Les analyses ont été basées sur 336 individus adultes marqués avec des bagues de métal et de couleurs pendant 11 ans. L'analyse a confirmé la présence de deux groupes dans notre population à l'étude, soit des oiseaux locaux et des individus de passage représentant 18 % de la population. Nous avons estimé le taux de survie apparente (corrigé pour la perte de marqueurs auxiliaires) des oiseaux locaux à 0.91 (± 0.04 SE), ce qui est comparable à des estimés similaires obtenus pour d'autres espèces d'oiseaux marins. Nous avons détecté une tendance pour une diminution du taux de survie apparente des oiseaux nouvellement marqués (première classe d'âge) lors des années d'abondance de lemmings. Nous suggérons que cet effet puisse être une conséquence d'une augmentation de l'émigration permanente en raison de la capture d'un plus grand nombre d'oiseaux de passage attirés par la forte abondance en lemming lors de ces années.
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