Mémoire numérisé par la Direction des bibliothèques de l'Université de Montréal. / Qu'en est-il de l'efficacité de la négociation ? Est-ce qu'une approche de négociation consensuelle et intégrative permet une plus grande satisfaction des deux parties à la fois, comparativement à une approche de négociation plus traditionnelle où les deux parties se positionnent sur chaque sujet abordé en négociation en utilisant les tactiques de confrontation ? Voilà la question investiguée dans une étude de cas réalisée dans quatre usines filiales d'une entreprise de transformation alimentaire. Le matériel principal qui a servi à l'analyse est le résultat d'entrevues réalisées auprès de négociateurs syndicaux et patronaux dans chacune des usines à partir d'une grille d'entrevue à questions ouvertes, de façon à recueillir les opinions et les perceptions des acteurs. Une étude de cas se prête bien à une approche méthodologique qualitative surtout, comme dans ce cas-ci, quand on cherche à comprendre un phénomène relativement récent pour lequel encore peu d'enquêtes ont été réalisées. L'auteure, en s'inspirant de la théorie enracinée (STRAUSS, 1987), a développé des outils de recherche appropriés à ce qu'elle souhaitait réaliser : une analyse en boucles toujours plus précises de la première étape (identification de concepts de départ découlant d'une première revue de la littérature et de l'expérience pratique de l'auteure), en passant par la deuxième étape (constitution de la grille et réalisation des entrevues, et première codification des entrevues réalisées), pour aboutir à la troisième étape (choix définitif des facteurs explicatifs de l'efficacité d'une méthode de négociation et codification finale des entrevues). C'est ce matériel qui a servi à l'analyse du cas en cherchant les similitudes et les contrastes au sein d'une même usine en regard des deux dernières négociations, et entre les quatre usines en regard de la dernière négociation principalement où deux d'entre elles ont utilisé la nouvelle approche alors que les deux autres ont utilisé l'approche traditionnelle. Cette analyse a ensuite été confrontée à la littérature spécialisée sur le sujet, pour enfin cerner les éléments explicatifs de l'efficacité d'une approche de négociation. Il ressort clairement que l'approche de négociation basée sur les intérêts s'est révélée plus efficace pour les deux parties impliquées que l'approche dite traditionnelle. Plus efficace, selon les acteurs, quant à l'évaluation des résultats concrets (modifications intervenues aux conventions collectives), à la qualité de la relation pendant et• après les négociations, et aussi à la capacité de régler les problèmes au quotidien, le tout dans un contexte où les rapports patronaux/syndicaux ne passent plus exclusivement par le canal de la négociation de la convention, mais aussi par différents lieux d'échange reliés tant au contrat de travail qu'à l'organisation du travail et au processus de production, tant sur le plan local qu'au niveau corporatif. Évidemment, on ne peut généraliser le résultat de cette enquête, mais il permet de cerner de nouveaux champs de recherche. Voici certaines conclusions que nous tirons, qui pourraient servir d'hypothèses de travail pour la réalisation d'enquêtes futures : • La négociation basée sur les intérêts est plus appropriée que la négociation traditionnelle pour l'atteinte des objectifs de chacune des parties : adapter rapidement et efficacement les règles de travail aux nouvelles contraintes de l'environnement, tout en permettant une amélioration des conditions d'exercice du travail et une meilleure répartition de la richesse. À l'instar de Fisher et Ury (1981), nous observons l'interdépendance entre le contenu et la relation. • La méthode de négociation choisie est une des conséquence d'un choix stratégique que font les parties. Or, dans un contexte où l'on doit s'occuper du court terme, mais aussi et surtout du long terme pour la survie de l'entreprise et par conséquent de l'emploi, la négociation basée sur les intérêts est un des moyens efficaces au service des parties pour assurer une continuité dans leurs réalisations. • Les changements les plus importants se sont révélés liés à la dynamique sociale entre les parties patronales et syndicales, mais aussi entre tous les acteurs au sein de l'entreprise. Peut-on parler d'émergence d'un nouveau contrat social ? Les résultats de l'enquête menée à CULINAR sont utiles aux praticiens qui auront intérêt à lire l'analyse des entrevues et les conclusions qui en sont tirées pour se conforter dans les choix qu'ils ont à faire au quotidien et la diffusion des exemples est important pour alimenter leur réflexion. L'enquête peut tout à la fois permettre aux chercheurs d'identifier des terrains de recherche plus exhaustifs qui aideront à préciser les modèles théoriques et enrichiront la connaissance des phénomènes sociaux..