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Nitshissituten : mémoire et continuité culturelle des Pessamiulnuat en territoires inondés

Gagnon, Justine 13 March 2019 (has links)
À partir des années 1950, la communauté innue de Pessamit voit son territoire ancestral radicalement bouleversé par l’intrusion de l’industrie hydroélectrique sur plusieurs des principales rivières qui le sillonnent. Culminant avec l’érection du célèbre barrage Manic-5 sur la rivière Manicouagan vers la fin des années 1960, cette période particulièrement florissante pour l’économie et la politique québécoises a ainsi contribué à l’attribution d’un caractère hautement symbolique à ces infrastructures bétonnées. Or, pour les Pessamiulnuat (les Innu.e.s de Pessamit), cette épopée industrielle a d’abord et avant tout signé la fin d’un mode de vie largement axé sur la navigation, si ce n’est la disparition de vastes territoires de chasse, sites culturels, sentiers de portages, etc. En l’absence de fouilles archéologiques ayant précédé la plupart des inondations, il n’est par conséquent resté de cet héritage que le souvenir qu’en conservent encore aujourd’hui ceux et celles ayant connu les rivières avant leur transformation. La thèse s’interroge sur le caractère intangible de cet héritage dorénavant ennoyé, puis sur les manières de le préserver et de le mettre en valeur, a posteriori. Au su de cette relation singulière liant la mémoire du territoire aux lieux et aux trajectoires qui la supportent et la rendent possible, il convient de s’interroger sur les voies qu’emprunte l’effort de rappel, alors même que ses référents disparaissent ou deviennent inaccessibles. Autrement dit, comment procède la réactivation de souvenirs à fortes composantes géographiques lorsque les lieux auxquels ceux-ci se rattachent n’existent plus dans leur forme matérielle? Y a-t-il quelque chose qui se transmet par-delà les ruptures historiques et culturelles, de sorte que la mémoire d’un lieu puisse être entretenue, sans nécessairement y avoir vécu ou y être passé ? Est-il même pertinent d’assurer à ces géographies d’autrefois une forme de pérennité ? Tablant sur les principes de la recherche-action et participative, la présente démarche s’est appuyée sur une série d’outils favorisant la collaboration avec le Conseil des Innus de Pessamit, tout en assurant des retombées concrètes pour les membres de la communauté. En plus des entretiens semi-dirigés réalisés auprès des Pessamiulnuat, des activités de cartographie participative ont été menées, alors que la tenue d’une exposition au Centre communautaire Ka Mamuitunanut a fait office de stratégie de diffusion et de validation des résultats préliminaires. Empruntant les sentiers que recomposent sans cesse les souvenirs de ceux et celles ayant navigué sur les rivières avant qu’elles ne soient harnachées, cette thèse met en lumière les particularités d’un patrimoine du « quotidien », profondément enraciné dans la culture de la navigation. Elle démontre à cet égard que l’effort de rappel, nécessaire dans la création des savoirs géographiques, rend par le fait même leurs composantes vivantes et pérennes, ce même longtemps après que les entités auxquelles elles réfèrent aient disparu. Elle s’intéresse en outre aux dernières avancées en matière de cartographie culturelle et critique pour supporter les pratiques mémorielles, puis aux stratégies commémoratives les plus adéquates pour révéler l’esprit de lieux radicalement transformés. Ainsi, les résultats obtenus ont servi de tremplin vers des initiatives très concrètes de mobilisation des connaissances et de mise en valeur patrimoniale, assurant à cet héritage intangible une inscription spatiale garante d’une plus grande visibilité. La conception d’une infrastructure informative (belvédère) a en effet permis d’interroger les catégories et les postulats propres à la gestion patrimoniale, révélant la nécessité, pour les Pessamiulnuat, de faire de ce patrimoine largement transformé un espace vivant, habité et utilisé dans le temps présent. Ces constats ont enfin jeté les bases d’une réflexion critique quant au rôle de la mémoire dans la construction et la documentation du passé, de même que dans la continuité culturelle, des éléments constitutifs de la reconnaissance des droits ancestraux autochtones au Canada. Les différents chapitres fournissent ainsi des clés d’analyse souvent négligées pour appréhender les tensions sous-jacentes à cette reconnaissance, qu’il s’agisse de l’opposition réductrice entre les patrimoines matériel et immatériel, ou encore de la tension persistante entre des recours au passé fondés sur l’écriture et la tradition orale. Alors que les preuves d’occupation du territoire et les stratégies d’affirmation culturelle sont au coeur des négociations et des revendications territoriales menées par les communautés innues du Québec, la question de la valorisation d’un patrimoine géoculturel invisibilisé par le développement hydroélectrique devient pour ainsi dire déterminante. Car le travail de mémoire constitue en définitive un impératif de justice. Mots-clés: Paysages ennoyés; patrimoine intangible; territoires autochtones; Innu.e.s de Pessamit; développement hydroélectrique; lieux de mémoire; continuité culturelle; justice spatiale; cartographie. / Beginning in the 1950s, the Innu community of Pessamit saw its ancestral land radically transformed by the intrusion of the hydroelectric industry on several of its major rivers. Culminating with the erection of the well-known Manic-5 dam on the Manicouagan River in the late 1960s, this flourishing period for Québec's economy and its political affirmation contributed to the highly symbolic character to these infrastructures. However, for the Pessamiulnuat (the Innus of Pessamit), this industrial endeavor has first and foremost brought about the end of a way of life relying largely on navigation, along with the disappearance of vast hunting grounds, cultural sites, portage trails, etc. In the absence of any archaeological surveys preceding the floods, what remains of this geocultural heritage are the memories of those who navigated the rivers before their transformation. This research project explores the now intangible nature of this flooded heritage, as well as the ways to preserve and enhance it, a posteriori. Drawing on the singular relationship linking memory to places and trajectories, it seems relevant to question the various paths memory – and the remembering process – take when those geographical bearings disappear or become inaccessible. In other words, how can the awakening of memories deeply intertwined with places and landscapes take place when these geographical features no longer exist in their tangible form? Furthermore, is there something that can be transmitted beyond historical and cultural disruptions, so that the memory of a place can be maintained, without necessarily having lived or been there? Is it even relevant to ensure a form of continuity for these past geographies? Based on participatory action research principles, this project relied on a variety of tools that promoted a deep collaboration with the Innu Council of Pessamit, while providing tangible benefits to the community members. In addition to semi-directed interviews that have been conducted with the Pessamiulnuat, participatory mapping activities were used, whereas the creation of an exhibition at the Ka Mamuitunanut Community Center served as a strategy for disseminating and validating preliminary results. Following the trails of memories shared by those who navigated the rivers before they were harnessed, this dissertation highlights the specificities of a « daily practice » heritage, deeply rooted in a navigational culture. It demonstrates that the remembering process, as part of geographical knowledge acquisition, renders its components alive and sustainable, even long after the places they refer to have disappeared. This dissertation also addresses the scope and opportunities recent advances in cultural and critical cartography may offer to support the remembering process, as well as to represent its visual components. Furthermore, it focuses on commemorative strategies that can reveal the spirit of places which have been drastically transformed. In fact, the research outcomes served as a starting point for very concrete knowledge mobilization initiatives and heritage preservation activities, aiming to provide this intangible patrimony a spatial inscription, guaranteeing greater visibility. The design of an informative platform (belvedere) allowed us to question the categories and assumptions promoted by heritage management institutions, revealing the need for the Pessamiulnuat to turn this largely transformed heritage into a living, inhabited and used space in the present time. These observations lay the foundations for a critical reflection on the role of memory in the construction and documentation of the past, along with cultural continuity, which are at the foundation of Aboriginal rights recognition in Canada. This dissertation thus provides analytical keys that are often overlooked in order to grasp the tensions underlying this recognition, be it the reductive opposition between tangible and intangible heritage, or the persistent tension between writing and oral traditions. Since proof of land use and Indigenous cultural affirmation strategies are at the heart of the negotiations and land claims led by the Innu communities of Quebec, the enhancement of such an invisibilized geocultural heritage is key. For memory work is ultimately a question of justice. Keywords: Flooded landscapes; intangible heritage; Indigenous lands; Innus of Pessamit; hydroelectric development; place of memory; cultural continuity; spatial justice; mapping.
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Thirsting for recognition : a comparative ethnographic case study of water governance and security in the highlands of Kalinga, Philippines

Bouchard, Karen 24 April 2018 (has links)
Basé sur une recherche ethnographique de neuf mois, ce mémoire présente une étude comparative des incertitudes, risques et vulnérabilités vécues à l’ère d’instabilités environnementales et climatiques aux Philippines, ainsi qu’aux enjeux contemporains liés à la sécurité ainsi qu’à la gouvernance de l’eau dans les hautes terres de Kalinga, une province située dans la région administrative de la Cordillère au nord de l’île de Luçon. Divulguant, pour ce faire, les fondements et les opérations du gouvernement coutumier de l’eau d’irrigation, cette étude souligne les fondements intrinsèquement politiques de la disponibilité et de l’accessibilité de l’eau comme ressource, ainsi que pour la protection des droits autochtones et le développement des ressources naturelles. Mots-clés : gouvernance et sécurité de l’eau, modalités et processus de gestion coutumière de l’eau d’irrigation, droits et savoirs autochtones, Kalinga, Philippines. / Based on a nine-month ethnographic research conducted in 2015 and 2016 amongst three indigenous communities of the Kalinga highlands, a province and ancestral domain located in the Cordillera Administrative Region of Northern Luzon (Philippines), this comparative academic study examines the local experiences and responses to contemporary threats to safe and sufficient supplies of irrigation water. It further provides a detailed account of the constitution and functions of prevailing customary water governance systems and practices. This study, thus, defends the need to correlate water security to governance, whilst insisting upon the importance of articulating preventive and responsive policies and interventions with local contexts and conditions. Keywords : water governance, water security, customary water governance systems and practices, indigenous knowledge, Kalinga, Philippines.
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Le rôle des représentations dans les projets de mise en valeur des rivières du Québec : les enjeux de l'implantation de la filière de la petite production hydroélectrique sur la rivière Batiscan

Gingras, Mathieu 13 April 2018 (has links)
Au début des années 1990, pour atteindre des objectifs de développement régional et de maximisation de la production hydroélectrique, le gouvernement du Québec a adopté des politiques visant la réfection et la construction de petites centrales par des producteurs indépendants. Pour assurer leur rentabilité, les petites centrales doivent être construites à proximité des infrastructures de transport d’énergie et des lieux de consommation. De plus, elles sont souvent situées là où les rivières présentent des chutes ou un encaissement importants. Ces sites sont souvent situés à proximité ou au cœur de lieux habités et mis en valeur, notamment à des fins récréotouristiques. De plus, les chutes sont souvent des symboles territoriaux, identitaires et paysagers forts pour les communautés locales. Il en résulte inévitablement des conflits d'usage où diverses perceptions de la mise en valeur des rivières se confrontent. Pour analyser plus en profondeur cette problématique, nous avons fait une étude de cas portant sur la rivière Batiscan (Mauricie), où des promoteurs ont envisagé la réalisation de trois projets de petites centrales hydroélectriques (1987-1990). À l’aide de 15 entretiens semi-dirigés et à travers une revue de cinq quotidiens québécois (1990-2007), nous avons analysé le discours des acteurs, afin de comprendre le rôle stratégique et l’évolution des représentations territoriales et du rapport à la rivière des acteurs concernés par les projets de petites centrales. Cette étude démontre que les tenants de la filière de la petite production hydroélectrique perçoivent ce type de mise en valeur de la rivière comme étant un mode de développement régional qui permettrait de générer des retombées économiques substantielles pour les milieux hôtes. D’autre part, les opposants se sont regroupés au sein de comités de citoyens pour revendiquer l’abandon des projets. Leur discours véhicule la représentation que la réalisation de petites centrales sur la Batiscan est contraire à la notion de bien commun et porterait atteinte au paysage, à l’intégrité environnementale du cours d’eau et au potentiel de développement récréotouristique de la région. Par un processus de réappropriation collective et de valorisation des éléments du territoire ayant une forte valeur patrimoniale et identitaire, ceux-ci ont cherché à élaborer et mettre en œuvre des projets alternatifs qui permettraient de contrer les projets de petites centrales de garantir la protection des caractéristiques naturelles de la rivière. / At the beginning of 1990s, to meet objectives of regional development and maximization of the hydroelectric production, the government of Quebec adopted energy policies aiming to retrofit and construct small power stations by independent producers. To ensure their profitability, small power stations must be built close to existent energy transport networks and consumption places. Moreover, they are often located where the rivers are banked or present important falls. These sites are situated near or in the heart of inhabited and attended places, notably for recreotouristic purposes. Furthermore, these falls and landscapes are symbols of identity and have territorial significance for the local communities. This situation inevitably generated river-use conflicts where many perceptions of the management and the development of the rivers are in opposition. To make an in-depth analysis of this problem, we made a case study concerning the Batiscan river (Mauricie), where promoters considered the construction of three small hydroelectric power stations (1987-1990). Using 15 semi-directed talks and through a review of five daily newspapers (1990-2007), we analyzed the speech of the actors, in order to understand the strategic role and the evolution of the territorial representations of those concerned with the projects of small hydroelectric power stations. This study shows that the promoters of the small hydroelectric power stations perceive this type of development of the river as being a type of regional development which would make it possible to generate substantial economic repercussions for host territories. On the other hand, the opponents, gathered within citizen committees to obtain the abandonment of the projects. Their speech conveys the representation that the realization of the hydroelectric power stations on the Batiscan river goes against the concept of common good and would undermine the landscape, the environmental integrity of the river and the recreotouristic development of the area. By a process of collective reappropriation and valorization of the elements of the territory having a strong patrimonial and identity value, those sought to work out and implement alternative projects which would make it possible to counter the projects of small hydroelectric power stations and to guarantee the protection of the inherent characteristics of the river.

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