L’introduction de petites faunes au sein du régime alimentaire humain dans le passé constitue un sujet de recherche essentiel dans la compréhension des modes de subsistance des chasseurs-cueilleurs, notamment au Paléolithique supérieur. Durant cette période, et notamment au Dernier Maximum Glaciaire, le lapin de garenne (Oryctolagus cuniculus) domine les assemblages fauniques de nombreux sites archéologiques de la Péninsule Ibérique. Plusieurs hypothèses ont été avancées afin de comprendre le rôle que ce petit gibier a pu jouer dans la subsistance des groupes humains. Néanmoins, la multitude et la variété de ces hypothèses reflètent, d’un côté, le manque de consensus quant à la portée de l’exploitation du lapin dans la subsistance durant cette période dans la Péninsule Ibérique, et elles soulignent d’un autre côté que l’appréhension des implications économiques, technologiques, environnementales et sociales de son exploitation est une tâche complexe.
A partir de ce double constat, j’ai dès lors établi comme problématique d’explorer les potentielles motivations liées à la chasse du lapin et d'appréhender le rapport entre les humains et cette espèce de petite taille, et ce dans l’objectif d’obtenir une meilleure compréhension des modes de subsistance adoptés pendant cette période en Ibérie. L’approche développée dans cette thèse repose sur la proposition que l’explication du pourquoi les humains exploitaient le lapin doit être traitée par une compréhension du comment les humains chassaient ce petit gibier. Si nous voulons analyser le régime alimentaire humain dans le passé, nous devons effectivement comprendre comment les humains prenaient leurs décisions cynégétiques. A cette fin, un des cadres théoriques principalement utilisé en archéologie, la Optimal Foraging Theory, a été employé, en complément de la modélisation à base d’agents. La problématique a été répartie en trois questions de recherche distinctes et complémentaires, chacune faisant l’objet d’une publication. Dans le premier article, l’application du Diet Breadth Model issu de la Optimal Foraging Theory a permis d’observer que l’exploitation d’une garenne est optimale lorsque plusieurs individus capturent un minimum de 7 lapins à l’aide de filets au cours du Dernier Maximum Glaciaire dans la Péninsule Ibérique. Dans le second article, nous avons mené des expériences de simulation à travers le développement d’un modèle à base d’agents pour évaluer les implications de ce type d’exploitation dans un cadre plus réaliste au sein duquel les humains interagissent, avant de l'intégrer, dans le troisième article, dans différents contextes socio-économiques qui lui sont associés et observés dans le registre ethno-historique.
Nos résultats montrent que la composition du régime alimentaire humain et, par-là, le retour énergétique quotidien, sont influencés par l'organisation sociale entre les membres d'un groupe, la stratégie de chasse et la technologie associée afin d’exploiter une garenne. Particulièrement, la rentabilité de l’exploitation des ressources est encore plus grande si les femmes, les enfants et les ainés sont impliqués dans l’exploitation des garennes à travers des battues et/ou l’aide de filets. Par conséquent, cette thèse expose que le développement de formations socio-culturelles optimales basées sur une division des tâches de subsistance selon l’âge et/ou le sexe (et de la technologie qui leur est associée) a pu permettre aux groupes humains de s'adapter aux environnements de la Péninsule Ibérique au Dernier Maximum Glaciaire. Finalement, le lapin ayant probablement été un complément alimentaire important pendant cette période, cette thèse souligne la nécessité de considérer son exploitation (et celle de petites faunes en général) lors de l’interprétation du registre zooarchéologique car des changements d’un point de vue économique, technologique mais aussi socio-culturel dans les modes de subsistance adoptés dans le passé peuvent être ainsi appréhendés. / The introduction of small fauna into the human diet in the past is an essential research topic in the understanding of hunter-gatherer subsistence patterns, particularly in the Upper Paleolithic. During this period, and particularly during the Last Glacial Maximum, the European rabbit (Oryctolagus cuniculus) dominates the faunal assemblages of many archaeological sites in the Iberian Peninsula. Several hypotheses have been proposed to understand the role played by this small game in the subsistence of past human groups. Nevertheless, the number and diversity of these hypotheses first reflect a lack of agreement as to the extent to which rabbits played a role in subsistence during this period in the Iberian Peninsula. Secondly, they underline the complexity of understanding the economic, technological, environmental, and social implications of rabbit exploitation.
From these observations, I established as the problematic to explore the potential motivations behind rabbit hunting, and to apprehend the relationship between humans and this small game, with the aim of providing a better understanding of the subsistence patterns adopted during this period in Iberia. The approach developed in this thesis is based on that the explanation of why humans exploited rabbits must be addressed by an understanding of how humans hunted them. If we are to analyze human diet in the past, we must indeed understand how humans made their hunting decisions. To this end, one of the theoretical frameworks mainly used in archaeology, the Optimal Foraging Theory, has been adopted, complemented by Agent-Based Modeling. I divided the problematic into three distinct and complementary research questions, each the subject of a publication. In the first article, the application of the Diet Breadth Model derived from the Optimal Foraging Theory enabled us to observe that the exploitation of a warren is optimal when several individuals capture a minimum of 7 rabbits using nets during the Las Glacial Maximum in the Iberian Peninsula. In the second paper, we carried out simulation experiments through the development of an Agent-Based Model to assess the implications of this type of exploitation in a more realistic environment in which humans interact, before integrating it, in the third paper, into different socio-economic contexts related to it and observed in the ethno-historical record.
Our results show that the composition of the human diet and, consequently, the daily energetic return are influenced by the social organization between group members, the hunting strategy and the associated technology employed for exploiting a warren. In particular, the energetic efficiency of resource exploitation is even greater if women, children, and elders are involved in exploiting warrens through net hunting and/or drives. Consequently, this thesis argues that the development of optimal socio-cultural group configurations based on an age and/or gender-based division of labor (and their associated technology) may have enabled human groups to successfully adapt to the environments of the Iberian Peninsula during the Last Glacial Maximum. Finally, as rabbit was probably an important energetic source during this period, this thesis highlights the need to consider its exploitation (and that of small game in general) when interpreting the zooarchaeological record, as not only economic and technological, but also socio-cultural changes in subsistence patterns adopted in the past can be apprehended.
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/32446 |
Date | 07 1900 |
Creators | Seuru, Samuel |
Contributors | Burke, Ariane, Perez, Liliana |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | fra |
Detected Language | French |
Type | thesis, thèse |
Format | application/pdf |
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