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L’expérience de la violence en milieu psychiatrique : l’hypervigilance généralisée et le rôle du caring dans la modulation de la peur

L’exposition à la violence dans le secteur de la santé affecte les employés et a également des implications sur la qualité des soins offerts. Les agressions en milieu de travail peuvent engendrer divers émotions ou comportements chez le personnel soignant, tels que la peur et l’évitement des patients (Gates, Gillespie, & Succop, 2011). La présente étude phénoménologique tente de comprendre et de décrire l’expérience des intervenants d’un hôpital psychiatrique lorsque ceux-ci ont été victimes d’un acte de violence grave de la part d’un patient, ainsi que les impacts engendrés sur les services offerts. L’approche phénoménologique permet de porter un nouveau regard sur cette problématique en plongeant dans l’univers de chaque intervenant, comprendre l’interprétation donnée à l’acte de violence vécu. L’emploi de cette approche donne accès à davantage de contenu et permet de préciser de quelle façon leur quotidien est altéré par ce phénomène. Trente entrevues semi-structurées ont été réalisées, soit deux auprès de chacun des 15 participants (11 femmes) provenant de divers domaines professionnels œuvrant dans un hôpital psychiatrique. Les analyses sont basées sur la technique « Empirical Phenomenological Psychological » de Karlsson (1993). Une attention particulière a été portée quant à la possibilité d’expériences différentes selon le sexe des intervenants. L’analyse a fait ressortir quatre thèmes principaux qui sont présents indépendamment du sexe des intervenants, soit: l’hypervigilance, le caring, la peur spécifique du patient agresseur, puis la peur généralisée à tous les patients. Un état d’hypervigilance est retrouvé chez tous les intervenants qui ont été victimes d’agression de la part d’un patient. Comparativement aux intervenants qui ont assisté à l’escalade d’agressivité d’un patient, ceux ayant été agressés par surprise rapportent des répercussions de cette vigilance qui s’étendent jusqu’à leur vie personnelle. Une approche caring est présente chez la majorité des participants. Ceci implique une bienveillance et une authenticité envers le patient soigné. Mettant le patient au cœur de son intervention, l’intervenant « soignant » développe un lien de confiance et agit comme un agent de changement. Un sentiment de peur est également exprimé chez les participants. Celui-ci est modulé par la présence ou l’absence de caring. Les intervenants démontrant du caring ont développé une peur spécifique à leur agresseur, tandis que ceux ne manifestant peu ou pas de caring ont développé une peur généralisée de la clientèle. Suite à un évènement de violence, les intervenants étant caring le demeurent, alors que ceux n’étant peu ou pas caring seraient plutôt portés à se désinvestir et à se désengager des relations avec les patients. Engendrées par la violence subie en milieu hospitalier psychiatrique, l’hypervigilance et la peur, qu’elle soit spécifique ou généralisée, ont toutes deux des impacts sur la qualité des soins offerts. Un intérêt considérable devrait être porté au caring, qui vient moduler cette peur et les effets qui en découlent. Des recherches pourraient porter un éclairage sur l’origine du caring – est-ce que le caring est appris ou découle-t-il d’une vocation? Finalement, ces études pourraient établir des manières de renforcer ou de développer le caring. / Exposure to violence in the mental health sector both affects employees and has implications for the quality of care provided. These acts of aggression can have important effects on workplace conduct, generating various emotions and behaviors in healthcare workers, such as fear and avoidance of patients (Gates et al., 2011). This phenomenological study aims to describe and understand the ways in which acts of aggression from a patient may affect the health of workers in a psychiatric institute, their relationships with the patients and the services offered. The phenomenological approach allows for a novel outlook on this problem by diving into the experiential world of each participant and encouraging reflections on his or her own understandings and interpretations of violence. In this way, we gain key insight into the specific ways in which workplace violence affects daily life.

Two semi-structured interviews were conducted with each of the 15 participants (11 women and 4 men) from various professional fields within a psychiatric hospital, totalling 30 interviews. The analyses are based on Karlsson’s "Empirical Phenomenological Psychological" technique (1993). Our analysis reveals four main themes that are present regardless of the sex of participants: hypervigilance, caring, specific fear towards the aggressor and generalized fear of all patients. A state of hypervigilance is found among all participants who have been victims of assault by a patient. Yet, compared to participants who witnessed the escalation of a patient's aggression, those who were taken by surprise in the attack more often reported that this hypervigilance extends beyond the workplace and into their personal lives. An emphasis on caring is present among the majority of participants. This outlook implies kindness and authenticity in the treatment of patients. Putting patients at the heart of one's work, the healthcare worker develops a relationship of trust and acts as an agent of change. A feeling of fear is also expressed by participants and is modulated by the presence or absence of caring. Those approaching patients with a caring disposition developed a specific fear of their aggressor, while those showing little or no caring developed a generalized fear of all patients. Following a violent event, caring participants maintained this outlook, while those demonstrating little to no caring were more inclined to disinvest and disengage from all patients. Moreover, hypervigilance and fear (both specific and generalized) caused by experiences of violence impact the quality of care provided. Considerable interest should thus be paid to caring, which can modulate fear and its effects. Additional research could shed light on the origins of caring: Is it learnt or does it result from a vocation? Finally, studies of this kind could establish or strengthen ways of developing this outlook.

Identiferoai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/12462
Date12 1900
CreatorsForté, Lydia
ContributorsGuay, Stéphane
Source SetsUniversité de Montréal
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeThèse ou Mémoire numérique / Electronic Thesis or Dissertation

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