La fin des années 1980 a été, dans les pays ouest-africains, synonyme de crise socioéconomique et politique sans précédent, mais elle y a aussi ouvert la voie, non sans contrainte, à des réformes sur la gouvernance et les options de développement. Le multipartisme, la démocratie et la décentralisation furent alors adoptés pour une meilleure gouvernance et un développement plus équilibré à partir des nouveaux territoires mis en place par la décentralisation. Cette dernière devait alors contribuer à améliorer sensiblement les conditions de vie des populations. Mais pratiquement plus de trente ans après le début de l'aventure décentralisation, quel bilan peut-on faire de la mise en œuvre de cette réforme? Le développement local escompté est-il au rendez-vous? Mieux, dans un contexte désormais rythmé par les effets récurrents des changements climatiques, comment l'expérience de gouvernance décentralisée telle qu'elle est comprise et qu'elle fonctionne influence-t-elle la capacité adaptative des populations locales aux CC? Partant d'abord d'une analyse comparée des processus de décentralisation dans plusieurs pays de la sous-région francophones ouest-africaine (chapitre 1), la thèse s'est ensuite intéressée aux innovations territoriales des acteurs locaux des CT pour combler les insuffisances que colporte encore cette réforme (chapitre 2), avant de vérifier, par une comparaison dans deux communes au sud du Bénin (Aguégués et Sô-Ava), l'efficacité de ces innovations, surtout celles institutionnelles, dans les projets d'ACC (chapitre 3). Les résultats révèlent que, malgré la diversité dans la mise en œuvre de la décentralisation au Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée, Mali, Sénégal et Togo, le processus recèle toujours, au sein de ces pays, des insuffisances similaires : compétences attribuées aux collectivités par les lois, mais non transférées réellement; manque d'autonomie de décision et de gestion des collectivités (prévues par les lois) du fait des contrôles massifs et de la mainmise des gouvernements centraux sur les ressources financières que la fiscalité locale inadaptée ne permet pas de facilement recouvrer; capacité réduite des CT à réellement influencer les décisions des pouvoirs centraux à cause du caractère toujours inachevé ou en perpétuelle reconstruction du processus. Toutefois, la thèse note la présence, au sein de ces pays, des dynamiques portées par les OSC s'investissant aujourd'hui là où les pouvoirs publics sont défaillants. Dans cette logique, d'autres résultats démontrent le poids des innovations des acteurs locaux, surtout celles institutionnelles, en réponse aux défaillances constatées de la décentralisation sur le développement d'un ou de plusieurs territoires. L'exemple de la commune de Sô-Ava et de sa proximité avec les villes économiques de Cotonou et d'Abomey-Calavi (au Bénin), met en exergue comment la mobilisation des OSC locales et leur implication dans des projets de développement, les structures de gouvernance (comme le CCEC, le COSC, et l'UCP) créées par l'ensemble des acteurs locaux ont contribué à installer un climat de concertation servant de socle aux projets de développement comme Climat'Eau. S'appuyant sur ces dynamiques préexistantes, Climat'Eau s'est ancré dans la continuité des innovations, mettant aussi en place d'autres, technologiques, organisationnelles et institutionnelles dont les effets, en termes de production agricole et d'écosystème d'affaires, entre autres, favorisent le développement de la commune et des villes environnantes. La thèse montre aussi que ces innovations n'auraient pu advenir sans une perspective de gouvernance collaborative où autorités locales, nationales, OSC, secteurs privés, chercheurs, partenaires techniques et financiers, populations locales, etc. participent ensemble à la définition et mise en œuvre de projets communs d'ACC. Par ces résultats, cette thèse démontre que malgré les insuffisances de la gouvernance dans les pays décentralisés africains, il existe encore des dynamiques portées par les acteurs et qui témoignent toujours de la présence d'une démocratie locale. Elle permet aussi de voir, sous cet angle, l'influence positive des innovations initiées par les acteurs locaux, surtout celles institutionnelles, sur le développement des collectivités et leur ACC. Globalement, cette thèse a permis de relever et de mettre en relief des approches bottom up de développement et de la gouvernance décentralisée dans un contexte de décentralisation avec des innovations institutionnelles. / The end of the 1980s was synonymous with an unprecedented socioeconomic and political crisis in West African countries, but it also paved the way, not without constraints, for reforms in governance and development options. Multipartyism, democracy and decentralisation were adopted for better governance and more balanced development based on the new territories established by decentralisation. Decentralisation was supposed to contribute to a significant improvement in the living conditions of the population. But almost thirty years after the start of the decentralisation adventure, what assessment can be made of the implementation of this reform? Has the expected local development been achieved? Better yet, in a context now punctuated by the recurrent effects of climate change, how does the experience of decentralised governance, as it is understood and as it functions, influence the adaptive capacity of local populations to CC? Starting with a comparative analysis of decentralisation processes in several countries of the West African francophone sub-region (Chapter 1), the thesis then focused on territorial innovations by local TC actors to address the shortcomings that this reform still carries (Chapter 2), before verifying, through a comparison of two communes in southern Benin (Aguégués and Sô-Ava), the effectiveness of these innovations, especially institutional ones, in CCA projects (Chapter 3). The results reveal that, despite the diversity in the implementation of decentralisation in Benin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinea, Mali, Senegal and Togo, the process still has similar shortcomings in these countries: competencies attributed to communities by law but actually transferred; lack of decision-making and management autonomy of communities (provided for by law) due to massive controls and control by central governments over financial resources that inadequate local taxation does not allow for easy collection; reduced capacity of TCs to really influence the decisions of central authorities due to the still unfinished or perpetually reconstructed nature of the process. However, the thesis notes the presence, within these countries, of dynamics carried by CSOs investing today where public authorities are failing. In this logic, other results demonstrate the importance of innovations by local actors, especially institutional ones, in response to the observed failures of decentralisation in the development of one or more territories. The example of the commune of Sô-Ava and its proximity to the economic cities of Cotonou and Abomey-Calavi (in Benin), highlights how the mobilisation of local CSOs and their involvement in development projects, the governance structures (such as the CCEC, COSC, and UCP) created by all local actors have helped to install a climate of consultation that serves as a foundation for development projects such as Climat'Eau. Building on these pre-existing dynamics, Climat'Eau has anchored itself in the continuity of innovations, putting in place other technological, organisational and institutional innovations whose effects, in terms of agricultural production and business ecosystems, among others, favour the development of the commune and the surrounding towns. The thesis also shows that these innovations could not have occurred without a collaborative governance perspective where local and national authorities, CSOs, private sectors, researchers, technical and financial partners, local populations, etc. participate together in the definition and implementation of common CCA projects. Through these results, this thesis demonstrates that despite the inadequacies of governance in decentralised African countries, there are still dynamics carried by the actors and which still testify to the presence of local democracy. It also allows us to see, from this angle, the positive influence of innovations initiated by local actors, especially institutional ones, on the development of communities and their CCA. The research approach of the thesis also revealed the importance of collaborative research involving professional researchers and practitioners without the latter being directly involved in the research itself. This serves as an example and reinforces the collaborative approach between practitioners and research professionals who have long lived in two parallel worlds. Overall, this thesis has allowed bottom-up approaches to development and decentralised governance to emerge in a context of decentralisation with institutional innovations.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/104164 |
Date | 12 November 2023 |
Creators | Dansou, Dossa Hyppolite |
Contributors | Carrier, Mario |
Source Sets | Université Laval |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | COAR1_1::Texte::Thèse::Thèse de doctorat |
Format | 1 ressource en ligne (xvi, 164 pages), application/pdf |
Coverage | Afrique francophone, Bénin. |
Rights | http://purl.org/coar/access_right/c_abf2 |
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